Avec un peu de retard sur ses obligations européennes, notre Région s’apprête à accélérer et renforcer la protection des sites Natura 2000 en adoptant cette année un régime de protection primaire et en préparant la désignation de l’ensemble des sites, prévue dès 2012. Cette accélération importante de la mise en ½uvre de Natura 2000, qui devrait se terminer en 2016 selon le schéma initial, s’accompagnera également de nombreuses améliorations et simplifications du régime de protection des sites.
Modification décrétale
Cette révision du régime Natura 2000 fait suite aux constats et propositions du Forum Natura 2000[Regroupant la Fédération IEW, la Fédération Wallonne de l’Agriculture et Nature, Terre et Forêt]], propositions déposées et concertées avec l’administration et le Ministre. Il a fallu également amender la Loi de la Conservation de la Nature pour assurer la mise en ½uvre de ces propositions. [Les modifications décrétales adoptées ce 22 décembre permettront d’instaurer dans les semaines qui suivent un régime de protection primaire pour tous les sites Natura 2000. Ce régime s’inspire largement des mesures générales de protection des sites existantes limitées aux seuls sites désignés. Ce décret permettra également l’adoption d’un seul arrêté spécifiant les mesures particulières qui s’appliqueront dans les différentes unités de gestion plutôt que de reprendre, comme c’est le cas actuellement, ces mesures particulières dans chacun des arrêtés de désignation.
Le décret clarifie et corrige également la notion d’ « objectifs de gestion active », propre à la Wallonie. Ces objectifs sont redéfinis en « objectifs de conservation » des habitats et des espèces, conformément au droit européen. Cela clarifie l’interprétation qui doit en être faite et résout l’insécurité juridique actuelle. Le décret autorise ainsi la fixation des objectifs de conservation, à l’échelle de la Wallonie, mais ils devront également être défini impérativement à l’échelle des sites. Ces objectifs conservent la valeur réglementaire octroyée précédemment aux objectifs de gestion active. Ce volet précis est toujours en concertation avec le Forum Natura 2000.
Révision des mesures générales
Sans apporter de modifications importantes, les nouvelles mesures générales simplifieront profondément les mesures existantes sans pour autant réduire la protection des habitats. Le régime de protection primaire introduira également un ensemble de mesures destinées à développer la biodiversité forestière : il s’agit des « bonnes pratiques » introduites par la révision du code forestier en forêt publique tel le maintien d’arbres morts, d’arbres de grand intérêt biologique, d’îlots de sénescence et de lisières arbustives. Ces mesures ne s’appliqueront que dans les propriétés d’une certaine taille, en renforçant le seuil qui prévaut actuellement. De même, la protection des cours d’eau des plantations de résineux devrait être renforcée par le biais d’une mesure assurant la protection de tout le réseau hydrographique en Natura 2000 plutôt que sur une base plus étendue mais limitée aux seules grandes propriétés. Ce régime primaire, outre les mesures de protection, apporte également les exonérations fiscales attendues par les propriétaires et des indemnités de base tant pour les agriculteurs que les propriétaires tenus de respecter les mesures similaires à celles du code forestier.
Implication des gestionnaires
Le climat plutôt positif issu de la concertation entre propriétaires, gestionnaires agricoles et environnementalistes semble également porter ses fruits quand à l’implication des gestionnaires. Plus d’un tiers des propriétaires concernés par les mesures de gestion en forêt se sont signalés auprès de l’administration pour pouvoir bénéficier du régime d’aide qui sera mis en place dans les semaines à venir soit un taux de participation bien plus important que dans les sites pilotes. Ce régime prévoit une indemnité de 20 ¤ /ha pour le régime de protection primaire, somme qui sera doublée dès l’adoption des mesures spécifiques aux unités de gestion.
Révision des mesures particulières et enquête publique
La révision des mesures particulières devrait faciliter l’implication des agriculteurs et simplifiera également ces mesures à travers notamment une réduction très significative du nombre d’unités de gestion. La mise en ½uvre de ce régime prévoit également une médiation socio-économique auprès des agriculteurs les plus concernés par Natura 2000 dans leur gestion. Le Ministre a chargé la structure d’encadrement Naturawal de réaliser ce travail de concertation préalable. Cette médiation ne portera pas sur les habitats naturels et sera limitée aux seules prairies importantes pour les espèces. Pour les agriculteurs effectivement affectés dans leur gestion par l’importance de ces prairies « espèce » dans leur exploitation, des bandes extensives gérées aux bénéfices des espèces seront aménagées. L’adoption de ce régime, passera comme pour les huit premier sites, par une enquête publique qui devrait être organisée mi-2011.
Si ces modifications du décret et du régime de gestion peuvent apparaître comme « cosmétiques », il faut se rappeller que Natura 2000 s’adresse à des dizaines de milliers de propriétaires et gestionnaires ainsi qu’à des centaines d’agents de l’administration qui seront chargés de sa mise en ½uvre, du suivi et du contrôle de ces mesures. La complexité du système actuel conduisait irrémédiablement les propriétaires et gestionnaires les mieux intentionnés à une véritable saturation cognitive : c’était l’un des constats faits par la structure d’encadrement qu’il importait de corriger.
Extrait de nIEWs (n°86, du 20 janvier au 3 février 2011),
la Lettre d’information de la Fédération.
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