Coktails chimiques sous surveillance minimale

Le constat n’est pas neuf, mais sa fréquence augmente de manière inquiétante : alors que la situation requiert la prise de mesures concrètes et efficaces pour relever les défis environnementaux et ce, de manière urgente, les décideurs politiques paradent comme des paons et font de la musculation de salon. Si la très médiatisée conférence de Copenhague en fut le parfait exemple, le conseil Environnement qui, quelques jours plus tard, devait se pencher sur la nocivité des cocktail chimique fut lui aussi le théâtre, certes de manière plus discrète, des mêmes gesticulations stériles. Explication.

Si l’ordre du jour de ce conseil Environnement du 22 décembre 2009 était particulièrement chargé, – biodiversité, OGM, déchets d’équipements électriques et électroniques… – deux points ont retenu plus particulièrement l’attention des associations environnementales et des ONG actives dans le domaine de la protection de la santé. Le premier concerne la directive biocides (lire cet article), dont nous ne manquerons de vous reparler dans les mois à venir, et le second les effets de la combinaison des substances chimiques, généralement appelés « effet cocktail ».

L’enjeu est d’importance: nous sommes en effet exposés quotidiennement à de multiples substances chimiques qui exercent leurs effets dommageables sur notre santé non pas de manière isolée mais bien combinée. Si l’Europe a entrepris de nombreux efforts pour protéger ses citoyens des effets indésirables des substances chimiques isolées, les règlementations actuelles ne tiennent pas compte de cet effet cocktail et ne permettent donc pas d’atteindre une protection élevée de l’environnement et de la santé humaine. Les effets potentiels de cette exposition combinée, en particulier dans le cas des perturbateurs endocriniens, suscitent de sérieuses inquiétudes chez les scientifiques, les professionnels de la santé et le grand public.

Des études récentes[[The Endocrine Society (2009). Endocrine-Disrupting Chemicals: An Endocrine Society Scientific Statement.

 http://www.chemtrust.org.uk/documents/ProfRSHARPE-MaleReproductiveHealth-CHEMTrust09.pdf

 http://www.chemtrust.org.uk/documents/BCexposuretochemicals.pdf
]] démontrent par exemple que les substances chimiques perturbatrices du système endocrinien sont suspectées de jouer un rôle dans le nombre croissant d’endométriose, de cancers du sein, des testicules et le déclin des quantités de spermes ; dans plusieurs pays européens, on estime qu’un homme jeune sur cinq souffre d’infertilité. Vous trouverez une explication plus détaillée de la chose en lisant cet article paru de le dernier numéro d’Imagine.

Si les ministres européens ont exprimés leur inquiétude face à ce constat en invitant la Commission à fournir un rapport analysant les lacunes de la législation européenne actuelle et proposant des modifications appropriées, ils ont néanmoins fait preuve de beaucoup de tolérance (mais de devrait-on pas dire de laxisme) en fixant le délais pour la rédaction et la remise de ce rapport à 2012. Plusieurs années vont donc encore s’écouler avant que le moindre amendement ne soit discuté au niveau européen.

Suffisamment d’éléments d’aide à la décision sont dès à présent disponibles : l’heure n’est plus aux rapports, mais à l’action. Réduire notre exposition aux substances chimiques dommageables pour notre santé et l’environnement, en veillant à réduire leur présence dans les produits utilisés quotidiennement et en veillant à promouvoir l’utilisation d’alternatives moins dangereuses doit devenir une priorité politique.


Pour en savoir plus:

[
Le site sante-environnement.be->http://www.sante-environnement.be]

Valérie Xhonneux

Anciennement: Santé & Produits chimiques