En février 2007, la Région wallonne adoptait son Programme de gestion durable de l’azote en agriculture (PGDA) après avoir été condamnée par la Cour de justice des communautés européennes pour une transposition insuffisante de la directive 91/676/CEE relative à la protection des eaux contre la pollution par les nitrates d’origine agricole. Dès son adoption, la Fédération n’a pas manqué de critiquer ce programme en avançant des arguments de fonds.
Inter-Environnement Wallonie a d’ailleurs introduit un recours en annulation devant le Conseil d’Etat contre l’arrêté du Gouvernement wallon. Un des arguments avancés par la Fédération concernait la violation du droit communautaire et, plus particulièrement, l’absence d’évaluation des incidences environnementales conformément aux exigences de la directive 2001/42/CE relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement.
Dans le cadre de ce recours, une des questions qui s’est posée était notamment de savoir si le PGDA constituait ou non un plan ou un programme au sens de la directive 2001/42/CE. Des questions préjudicielles ont été posées à la Cour de Justice de l’Union européenne. Au terme de l’arrêt de la Cour de justice, le Conseil d’Etat devait statuer à son tour. Verdict : le Conseil d’Etat fait droit à l’argumentation de la Fédération en indiquant que le PGDA est un plan ou un programme au sens de la directive 2001/42/CE et, en conséquence, qu’il doit faire l’objet d’une évaluation des incidences environnementales laquelle n’a pas eut lieu. Est-ce pour autant que tout est terminé ? Loin de là ! En effet, en principe, l’annulation prononcée par le Conseil d’Etat entraîne une annulation de l’acte (càd une disparition de l’ordonnancement juridique) avec effet rétroactif. Dans le cas présent, le Conseil d’Etat estime qu’une annulation pure et simple pourrait avoir des répercussions néfastes en terme de protection de l’environnement le temps de procéder à la réfection du PGDA. Le Conseil d’Etat s’en réfère également à la jurisprudence de la Cour de Justice qui prévoit que « (…), à titre exceptionnel, l’effet d’éviction exercé par une règle de droit de l’Union à l’égard du droit national contraire à celle-ci puisse être provisoirement suspendu ; que les conditions d’une telle suspension ne peuvent toutefois être déterminées que par la Cour elle-même »[[Arrêt du Conseil d’Etat du 18 janvier 2011, n° 210.483]].
C’est la raison pour laquelle le Conseil d’Etat interpelle à nouveau la Cour de Justice par le biais d’une nouvelle question préjudicielle afin de savoir si, après avoir constaté que le PGDA ne respectait pas la directive 2001/42/CE, illégalité qui doit conduire à son annulation, l’on peut néanmoins différer les effets de cette annulation le temps nécessaire pour procéder à la réfection du PGDA dans le but de maintenir un niveau de protection élevé de l’environnement. A ce stade donc, le dossier n’est pas définitivement terminé et les chassés croisés entre les instances juridictionnelles nationales et européennes se poursuivent…