Greenpeace, Canopea et Bond Beter Leefmilieu s’indignent de l’accord déséquilibré entre Engie et le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral fixe une facture maximale à Engie pour les déchets nucléaires détenus par le groupe industriel français. Si le coût est plus élevé, il sera supporté par le contribuable. Et ce, alors qu’aucun site ni aucune technologie ne sont encore disponibles pour l’élimination des déchets nucléaires et que le montant de cette gestion demeure inconnu. Selon les organisations, cette affaire pourrait bien devenir le plus grand hold-up de l’histoire de la Belgique.
Les organisations environnementales voient dans cet accord la preuve ultime que l’énergie nucléaire n’est pas rentable. Engie refuse d’assumer le risque d’investissement et l’État doit participer. Aucune entreprise privée ne veut plus assumer le risque financier que représentent des centrales nucléaires.
En termes de sécurité d’approvisionnement – notamment pour les hivers 2025 et 2026 – Engie n’offre aucune garantie que les centrales seront disponibles. Qui sera responsable si les centrales ne sont pas disponibles au cours d’une vague de froid ? Pour rappel, la disponibilité des vieilles centrales pose question et elles ont été arrêtées à de nombreuses reprises au cours des dix dernières années, y compris en hiver.
« Le gouvernement belge ne tire aucune leçon de la crise nucléaire française, où près de la moitié des centrales nucléaires ont été mises hors service l’année dernière, en partie à cause de problèmes de corrosion du système de refroidissement”, déclare Jan Vande Putte, expert en énergie chez Greenpeace. “Ces problèmes persisteront au cours des prochaines années. Pourtant, le gouvernement belge mise précisément sur l’énergie nucléaire, alors que son manque de fiabilité a été démontré tant en Belgique qu’en France ».
« En co-investissant dans le capital de la centrale nucléaire, le gouvernement organise un conflit d’intérêts », ajoute Arnaud Collignon, expert énergie chez Canopea. « Avec la croissance rapide des énergies renouvelables, les périodes de prix de l’électricité très bas, voire négatifs, seront de plus en plus fréquentes. La rentabilité des centrales nucléaires non flexibles va donc se réduire de plus en plus. On peut d’ailleurs se demander si l’État ne sera pas tenté de freiner le développement renouvelable pour consolider son investissement nucléaire ».
Le fait de voir l’État intéressé financièrement par la rentabilité du nucléaire risque aussi d’augmenter la pression sur le gendarme nucléaire afin qu’il ne se montre pas trop exigeant quant au respect de certaines normes. En effet, chaque fois qu’une centrale doit être fermée, l’État perd de l’argent.
« Il est particulièrement cynique de la part du gouvernement d’invoquer la guerre en Ukraine pour prolonger les deux centrales. L’occupation par la Russie de la centrale nucléaire de Zaporizhzhya vient de démontrer que l’énergie nucléaire est particulièrement vulnérable. S’il y a une leçon à tirer de la guerre, c’est qu’il faut fermer ces centrales dangereuses le plus rapidement possible », conclut Jan Vande Putte.
Enfin, les organisations de défense de l’environnement soulignent que toute cette construction reste un château de cartes bancal, puisqu’il n’y a pas encore de permis. La base juridique d’un futur permis est également problématique en raison de l’absence de consultation publique. Les organisations de protection de l’environnement ont présenté le mois dernier un rapport montrant les lacunes dans ce processus. [1]
Note
[1] Lire le rapport complet d’Oda Becker et Gabriele Mraz ici (version originale en allemand / traduction par Greenpeace en anglais).
Contacts presse:
- Jan Vande Putte, Greenpeace Belgique : 0496 16 15 84
- Arnaud Collignon, Canopea : 0477 70 04 56