En 2009, des scientifiques définissaient 9 limites planétaires qui, en cas de franchissement, feraient craindre de graves dysfonctionnements. En mai 2023, 6 des 8 limites étaient déjà dépassées.
Aujourd’hui, 33% de l’eau de surface et 47% de l’eau souterraine dans le monde ne répondent plus aux critères pour assurer un développement sûr et juste de l’humanité. Et en Wallonie ? On constate que les limites pour l’eau sont déjà partiellement franchies.
FACTS:
- En mai 2023, 6 des 8 limites planétaires étaient dépassées.
- 33% de l’eau de surface et 47% de l’eau souterraine dans le monde ne répondent plus aux critères pour assurer un développement sûr et juste de l’humanité.
- En utilisant les même critères sur notre territoire, on constate que les limites pour l’eau souterraine et pour l’eau douce sont déjà partiellement dépassées en Wallonie.
Petit historique des limites planétaires
En 2009, 26 scientifiques publiaient un article qui a fait date1: celui des 9 limites planétaires. Ils ont ainsi défini 9 limites à la planète, qui, lorsqu’elles sont franchies, font craindre de graves dysfonctionnements. En 2009, ils ont estimé que 3 des 9 frontières étaient franchies.
En 2012, l’économiste Kate Raworth a complété ce modèle en développant la théorie du Donut. En ajoutant un cercle concentrique au cœur des limites planétaires, elle a permis de représenter les conditions de vie décentes du point de vue des droits humains. Ainsi, l’humanité devrait évoluer entre ces deux bornes : un plancher inférieur représentant les conditions de vie décentes, et un plafond constitué par les limites planétaires. Très récemment, en mai 2023, les mêmes scientifiques qui avaient créé le modèle des 9 limites planétaires l’ont réactualisé, en fusionnant certaines qui avaient une même origine, et en y incluant les besoins humains tels que définis par Kate Raworth. Ils ont également inscrit la notion de limite “juste”, mettant ainsi en évidence que même si certains dépassements ne menaçaient pas directement la survie de l’humanité, ils causent un dommage significatif, pouvant varier en fonction de la précarité des publics exposés et de leur lieu de vie sur la Terre. Ils introduisent ainsi la notion de “No significant harm” dans les limites planétaires. Ils estiment ainsi que 6 des 8 limites sont dépassées, et que 1 d’entre elle a n’est pas encore critique du point de vue environnemental, mais bien du point de vue de la justice.
L’eau comme limite planétaire… et Wallonne ?
Dans cette nouvelle mouture des limites planétaires : 2 d’entre elles concernent l’eau. Eau de surface et eau souterraine sont ainsi considérées comme deux limites distinctes, deux limites pour lesquelles les conditions “safe and just” sont déjà dépassées.
Les auteurs définissent ainsi pour chacune des deux limites, une condition “safe” et une condition “just”, à mettre en parallèle avec l’état actuelle des ressources mondiales. Mais un parallèle intéressant peut également être fait avec l’état des ressources wallonnes. Comment se portent les limites planétaires… en Wallonie ?
Condition « safe » | Condition « just » | ||
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Eau de surface | Limite planétaire | Le débit dans les cours d’eau varie de moins de 20% d’un mois à l’autre | La qualité de l’eau répond aux normes de l’OMS |
Critère adapté en Wallonie | Les eaux de surface sont en bon état écologique | Les eaux de surface sont en bon état chimique | |
Etat planétaire | 33% des eaux de surface dans le monde ne répondent plus au critère | 33% des eaux de surface dans le monde ne répondent plus au critère | |
Etat en Wallonie | 53 % des eaux de surface ne répondent pas à ce critère | 33% des eaux de surface de répondent pas à ce critère (ou 100% en considérant les PBT) | |
Eau souterraine | Limite planétaire | La quantité pompée ne dépasse pas la recharge annuelle | La qualité de l’eau répond aux normes de l’OMS |
Critère adapté en Wallonie | Les eaux souterraines sont en bon état quantitatif | Les eaux souterraines ont en bon état chimique | |
Etat planétaire | 47% des eaux souterraines dans le monde ne répondent plus aux critères | 47% des eaux souterraines dans le monde ne répondent plus aux critères | |
Etat en Wallonie | 1 seule masse d’eau wallonne ne correspond pas à ce critère | 40% des masses d’eau souterraines ne répondent pas à ce critère |
Cette comparaison permet de mettre en évidence que les limites planétaires, telles quel définies par Rockström et al, sont partiellement dépassées en Wallonie.
Heureusement, le chemin pour reconquérir le bon état de nos masses d’eau est connu. La Wallonie, avec les autres états membres de l’UE, s’est engagée à atteindre un bon état de l’ensemble de ces masses d’eau d’ici 2027. Les efforts à consentir sont identifiés : réduire la pollution d’origine agricole (nitrates et pesticides), améliorer la collecte et le traitement des eaux usées domestiques, renaturer et reméandrer les cours d’eau afin de favoriser le maintien des écosystèmes aquatiques,… Pourtant, l’engagement politique et le soutient des acteurs dans la concrétisation de ces efforts n’est pas suffisante. A travers ces chroniques de l’été, Canopea propose de mettre en lumière la ressource en eau et de donner autant de raisons d’en assurer sa restauration et son utilisation durable.
Et après ?
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Crédit photo d’illustration : Adobe Stock
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- Rockström, J., Steffen, W., Noone, K. et al. A safe operating space for humanity. Nature 461, 472–475 (2009). https://doi.org/10.1038/461472a
- Rockström, J., Gupta, J., Qin, D. et al. Safe and just Earth system boundaries. Nature (2023).