Une proposition de loi précisant les modalités d’informations sur les émissions de CO2 dans la publicité pour les voitures a été rejetée dès son premier article à la Commission Santé-Environnement de la Chambre ce mardi 22 février. Les constructeurs, (bien) représentés par la FEBIAC, peuvent continuer à enfreindre la loi en toute tranquillité… Le point.
Petit historique pour bien comprendre
En 1999, une Directive européenne (1999/94/CE) fixe ces obligations d’information relative à la consommation de carburant et aux émissions de CO2 lors de la commercialisation des voitures neuves. Cette directive a été transposée en droit belge par l’arrêté royal du 5 septembre 2001 qui requiert, notamment, que les informations soient « facilement lisibles et au moins aussi visibles que la partie principale des informations ». La législation exige également que, quand plusieurs variantes sont regroupées sous un même modèle, les valeurs retenues pour la consommation de carburant et les émissions de CO2 de ce modèle soient celles de la variante et/ou de la version présentant les valeurs les plus élevées.
Début 2008, le collectif AffichezleCO2.be a dénoncé le non-respect quasi systématique de ces impositions légales et porté plainte auprès du Service public fédéral Economie (SPF Economie, organe public chargé du contrôle de la bonne application de la loi) et du Jury d’éthique publicitaire (JEP, structure privée sans aucune légitimité démocratique et qui vise à rendre la pub socialement acceptable). Poussés dans le dos par les citoyens, le SPF et le JEP ont interpellé la fédération de l’industrie automobile (FEBIAC). Celle-ci, arguant avec une mauvaise foi évidente de la difficulté d’interprétation de la loi, a proposé de redéfinir les choses dans son code d’auto-régulation (lequel n’a aucune force légale…). Elle a donc opté pour l’illégalité… Et plainte fut déposée auprès de l’Europe… qui a mis en demeure la Belgique de faire le nécessaire pour que la loi soit respectée. (Pour plus de détails, rendez-vous sur le site affichez le CO2)
Ce mardi 22 février, une nouvelle proposition de loi (0427/001) (déposée par le socialiste Philippe Blanchart) modifiant l’AR du 5 septembre 2001 est mise en discussion à la Commission Santé-Environnement de la Chambre et rejetée dès son premier article, flamands contre francophones. En bref, la proposition visait à imposer que 20% de l’espace publicitaire soient consacrés à la mention des émissions de C02 et de la consommation de carburant.
Un lobbying intense
D’un côté, la FEBIAC avait balisé le débat, en écrivant aux parlementaires pour promouvoir les vertus de son code déontologique et de l’autre, les associations environnementales (Bond Beter Leefmilieu, Brusselse Raad voor het Leefmilieu, Greenpeace, Pierre Ozer) avaient également envoyé un courrier dont les conclusions précisaient que :
− l’auto-régulation du secteur ne fonctionne pas et est en porte-à-faux avec la loi ;
− la clarification proposée de la loi permettra d’éviter toute ambiguïté et d’améliorer sensiblement la qualité de l’information au consommateur ;
− les mesures proposées sont simples à mettre en ½uvre et n’entraînent aucun surcoût significatif.
La Febiac l’a emporté, forte de l’appui des députés néerlandophones pour qui l’industrie automobile est intouchable, au risque de mettre à mal la relative santé économique de leur Région.
La FEBIAC prône l’illégalité !
Il n’est cependant pas inutile de rappeler qu’a travers cet épisode, c’est également l’illégalité qui a été confortée : le code de la FEBIAC « officialise » en effet l’illégalité avec l’aval incroyable du SPF Economie et aujourd’hui des députés flamands ! Soulignons au passage l’inertie des ministres compétents sur ce dossier qui se complaisent dans une politique de l’autruche.
Une information claire et une (vraie) régulation de la Pub!!
Il importe donc, pour les associations environnementales :
que les exigences légales soient explicitées de manière indiscutable par le législateur. La communication de l’information relative aux émissions de polluants atmosphériques dès le stade publicitaire et de manière absolue – 20 % de l’espace – et standardisée – l’échelle colorimétrique – peut orienter efficacement l’acte d’achat vers des véhicules moins polluants;
que le secteur automobile respecte son devoir d’information vis-à-vis des consommateurs;
que les règles d’encadrement du secteur publicitaire en Belgique soient révisées de manière globale, tant sur les lieux de diffusion (et notamment l’espace public) que sur les messages qui y sont véhiculés (greenwashing, stéréotypes, etc.). Les crises environnementale et sociale actuelles poussent à reconsidérer cet outil de pression à la surconsommation qu’est la publicité.
Pour ces raisons, les organisations environnementales plaident pour la mise en place rapide d’un observatoire fédéral de la publicité, indépendant du secteur et doté de pouvoirs de sanction.