Le Comité ENVI (pour environnement) du Parlement européen votera ce 19 septembre son avis sur le projet de règlement relatif aux émissions sonores des véhicules. Le texte de compromis proposé aux membres de la commission ENVI par le député rapporteur sur ce dossier a été rédigé par… le constructeur automobile Porsche !
Le projet de règlement établit des limites de bruit pour les voitures, camionnettes, camions et autobus. Le texte envoyé aux députés (« compromise amendment » dans le jargon européen) est censé réaliser un arbitrage entre les positions des membres de la commission et être rédigé par le rapporteur, en l’occurrence Miroslav Ouzký, membre du groupe des Conservateurs et Réformistes européens (voir la fiche de procédure). En fait, c’est Porsche qui a rédigé le texte !
Les parlementaires ont attendu le « compromise amendment » durant tout l’été. Lorsqu’ils l’ont enfin reçu, ils se sont rendu compte que l’auteur en était « Gerhard, Hans-Martin, Porsche AG ». Initialement prévu en juin, le vote avait été reporté par M. Ouzký pour avoir le temps de trouver les bons compromis. Il apparaît maintenant qu’il attendait en fait l’avis de Porsche, lequel a été rédigé début juillet.
Si les eurodéputés votaient en faveur du texte émanant de Porsche, cela pourrait mener à un affaiblissement des normes de bruit actuelles (qui datent d’une quinzaine d’années) et à une exemption pour de nombreux véhicules. La proposition de Porsche inclut des dispositions spéciales – qui s’en étonnera ? – pour les voitures de sport. Tout cela constituerait un retour en arrière sans précédant dans la législation environnementale européenne. Le bruit du trafic routier est un problème environnemental majeur, affectant cinq fois plus de personnes que toutes les autres sources sonores cumulées, soit plus de 210 millions de citoyens européens. Annuellement, se sont 50.000 décès et près de 250.000 malaises cardiaques qui sont imputables au bruit du trafic en Europe.
Porsche n’en est pas à son coup d’essai : en 2009, le constructeur automobile tentait déjà d’influencer l’organe de régulation qui travaille sur ces questions au sein des Nations Unies en proposant des normes qui auraient permis la mise en circulation de voitures dix fois plus bruyantes qu’actuellement. En juin de cette année, au cours d’une réunion au Parlement européen, Porsche suggérait que le coût du trafic routier devrait être pris en charge par les autorités locales qui devraient construire des barrières antibruit et redessiner les espaces urbains, solution préférables, aux yeux de l’industriel, à la construction de voitures moins bruyantes.
Ils seraient incompréhensible que les parlementaires européens votent le « compromise amendment » de Porsche qui constitue un véritable pied de nez à la démocratie.