Les questions climatiques et énergétiques sont les deux faces d’une même médaille. Copenhague signifiera – à l’heure d’écrire cette n-iew-s nous ne pouvons que l’espérer – des efforts de réduction d’émissions de gaz à effet de serre ambitieux. Pour y parvenir, il n’y a pas mille chemins : développement des énergies renouvelables et diminution de notre consommation d’énergie fossile[N’oublions pas la lutte contre la déforestation, enjeu extrêmement important au niveau mondial, mais moindre en Région wallonne.]]. Nos autorités y consacrent-elles suffisamment de moyens ?
Dans le secteur résidentiel, on a beaucoup parlé ces derniers mois des primes photovoltaïques. Et le Gouvernement wallon d’annoncer un nouveau régime de primes ‘énergie’ centré sur l’isolation pour le 1er mai 2010 – jour d’entrée en vigueur – enfin – de la directive PEB[[PEB : Performance Energétique des Bâtiments, entre autres le fameux K. Lire aussi « [Directive Performance énergétique des bâtiments. Où en est-on dans le processus décisionnel ? » et « Avis d’IEW sur l’Avant-projet de décret modifiant le Code wallon de l’Aménagement du territoire, de l’urbanisme et du patrimoine en vue de promouvoir la performance énergétique des bâtiments »]] [Lire aussi sur le sujets « [Quel avenir pour les primes énergie ? »]]. Des budgets conséquents seraient prévus – de l’ordre d’une centaine de millions d’euros annuellement. Par ailleurs, en 2008, l’Etat fédéral aura reversé près de 375 millions d’euros sous formes de réduction d’impôts pour les investissements économiseurs d’énergie. Des investissements qui auront un effet sur la facture énergétique annuelle de quelques centaines d’euros et ce, pendant de nombreuses années ! Cette dernière s’élevait en moyenne en 2007 à plus de 1 800 ¤ par ménage. Ce qui représente pour l’ensemble des ménages belges un montant de près de 8 milliards. Hélas, un euro investit une année (par exemple en 2009) ne veut pas dire un euro économisé cette même année mais bien un euro économisé sur plusieurs années, parfois sur plus de dix ans. Et si près de 50 000 ménages ont fait des travaux pour économiser l’énergie en Région wallonne l’an dernier, il n’en reste pas moins que leur logement peut encore être mieux isolé et mieux chauffé et qu’à ce rythme là, il faudra encore un demi-siècle pour parvenir à rénover et améliorer notablement l’état énergétique du logement wallon. Copenhague sera-t-il l’accélérateur et l’amplificateur des politiques décidées à Namur ?
Allons plus loin et comparons ce budget avec celui des routes et de l’aérien en Région wallonne. Nous savons que les nouveaux projets routiers provoquent un effet d’appel : au lieu de désengorger le réseau, les nouvelles routes arrivent rapidement à saturation. Mais elles ont entre-temps participé à l’augmentation de la charge de trafic. Des situations à éviter sous peine de ne pas atteindre les objectifs de réduction d’émissions dans le secteur du transport.
La précédente majorité régionale prévoyait de construire une autoroute à l’est de Liège. CHB : 12,5 km et un coût évalué entre 400 et 500 millions d’euros. Cette même majorité a inauguré la nouvelle aérogare de Charleroi (Gosselies). Coût : 200 millions d’euros. Enfin, toujours dans les cartons, le projet d’une gare ferroviaire souterraine liée à ce même aéroport et donc entièrement décentrée, estimée à 400 millions d’euros. Faut-il encore envisager de tels investissements ? Lueur d’espoir, nos dirigeants régionaux ont pris le train pour se rendre à Copenhague. Pas notre Ministre fédéral, mais, il est carolo ironisent certains.
Enfin, posons-nous la question des entreprises. Le mécanisme des quotas d’émissions est appelé à s’étendre et à se renforcer dans les années à venir. Sera-t-il un incitant suffisant pour améliorer l’efficacité énergétique des entreprises ? Nous pouvons en douter : le prix du carbone est aujourd’hui peu élevé[14¤ la tonne en moyenne en décembre 2009, alors qu’on estime que pour opérer de véritables changements, le prix de la tonne de carbone devrait avoisiner les 100¤.]], tout comme le prix de l’énergie. Dès lors, dans un contexte de crise économique, les entreprises ne rencontrent pas les conditions suffisantes pour procéder à des investissements économiseurs d’énergie. Ce qui signifie que suite au redémarrage de l’économie – auquel tous les décideurs politiques aspirent -, la demande en énergie repartira à la hausse. D’un autre côté, nous entrons dans un plateau de production des énergies fossiles[[Lire à ce sujet [le dossier paru dans la revue Imagine : « Energie, le nombril du monde »]] dont notre société reste malheureusement dépendante Dès lors, si la demande augmente, à production constante, les prix de l’énergie sont condamnés à nouveau à grimper et provoquer une nouvelle crise économique – les investissements économiseurs d’énergie n’ayant pas eu lieu. Une seule leçon : on ne peut compter sur les mécanismes actuels de marché pour faire évoluer durablement notre système de production. Le coût de l’énergie doit être maintenu haut pour favoriser le basculement de notre économie. Que cela passe par une taxe carbone ou un autre mécanisme, peu importe. Mais l’énergie ne peut – ne doit – plus être si bon marché. Des biens et services risquent de disparaître. Et des entreprises seront affectées. Mais est-il un représentant politique prêt à prononcer l’oraison funèbre ?
Bref, espérons que nos décideurs mettront à profit leur voyage à Copenhague pour nous revenir à la fois plus ambitieux, responsables et surtout plus soucieux des véritables enjeux auxquels nos sociétés vont devoir faire face.