Les négociations de Cancun se sont clôturées sur une note positive car le processus de négociation semble être remis en marche sans pour autant qu’un texte contraignant internationalement ai été l’objet d’un accord entre les participants. Ne devrions-nous pas nous inquiéter de ce que la politique climatique internationale veut mettre en place sous la forme du projet REDD+ (Reducing Emissions from Deforestation and Forest Dégradation)? Ce dernier confirme la volonté de lutter contre la déforestation en insistant tout particulièrement sur la conservation des forêts (voir le site REDD+). Qu’en est-il des crédits carbones ? Le système de compensation sera-t-il d’application dans ce programme ? Quels en seraient les conséquences ?
Compenser le carbone en plantant des arbres ne permet pas de solutionner la raréfaction de ressources fossiles qui prennent des milliers d’années pour se recomposer à partir de la décomposition végétale. Cette mesure permet juste de consommer impunément les énergies fossiles sans payer les conséquences mesurables en tonnes de carbone et leurs effets sur la santé et l’environnement. Aucune réduction des émissions n’est ainsi encouragée. Il est même question de mettre en place des mécanismes valorisant les déforestation évitées, en d’autres mots, la conservation des forêts existantes (voir communiqué de presse UN REDD). Ce sont les pays en voie de développement qui sont surtout visés ici.
Les effets rebonds sont faciles à prévoir. Comment limiter les cas comme celui de la Guyane qui demande des crédits carbones pour ne pas raser ses forêts une étude à l’appui ? Ou encore l’Indonésie qui veut faire passer rendre éligible ses champs de palmiers aux crédits carbone (lire sur Reuters) ? Et que dire des conséquences locales des projets d’entreprises ayant les moyens de payer des projets de reforestation de terrains de grande taille pour compenser d’autre part ce qu’ils émettent lors de la production de biens et de services ? Des expulsions ou encore l’interdiction des populations de fréquenter ces terrains ont été recensées dans une étude des Amis de la Terre.
Le journal en ligne Rue89 attire d’ailleurs l’attention des experts en signalant qu’Interpol a d’ailleurs tiré la sonnette d’alarme sur le site Planetark.org. Pour ce dernier le marché du carbone donne naissance à une criminalité basée sur la fraude, et cela surtout dans les pays en voie de développement comme le Libéria par exemple, où il est question de corruption pour obtenir des crédits carbone frauduleux. Le monde financier n’a pas manqué de s’approprier ce filon comme BNP Paribas qui achète des crédits d’émissions évitées à partir d’un projet de réduction de déforestation au Kenya. Un comble pour une banque qui s’est fait un bénéfice de 93% en 2009 grâce à, entre autre, l’achat de Fortis Banque, banque belge victime des crédits subprimes toxiques. Ce rachat a contribué pour 170 millions d’euros au bénéfice net de BNP au quatrième trimestre (voir les résultats de l’entreprise).
S’il y a un jour une crise des crédits carbone bidon, c’est surtout l’image de la politique climatique internationale qui en pâtira alors qu’il n’est pas du tout certain que ces mesures auront eu un quelconque impact positif sur la diminution des émissions de gaz à effet de serre. Qu’en est-il alors du marché du carbone pour financer REDD+? La référence aux mécanismes n’est pas claire dans le texte (cliquez ici) tout en laissant la possibilité de l’utiliser. En réalité, le texte postpose la décision sur ces matières en 2011 lors du COP 17 à Durban. Il convient dès lors d’être attentif et de suivre de près les négociations internationales cette année pour veiller à ce que des mécanismes adéquats soient mis en place.
En attendant, n’hésitez pas à découvrir le travail du WWF qui participe au FSC (Forest Stewardship Council) pour une gestion durable des forêts à partir d’un système de certification d’origine du bois et a lancé une campagne ‘Protège ma forêt‘ qui propose des gestes quotidiens pour diminuer notre impact individuel sur les forêts.