Monsieur Corentin de Salle publiait ce 27 octobre, sur le site de l’Itinera Institute, une opinion intitulée « L’archaïque conception cosmologique du WWF » dans laquelle il se livre à une critique virulente du dernier rapport « Planète vivante » du WWF.
Philosophe de formation, Monsieur de Salle excelle dans « l’art d’avoir toujours raison ». Il manie avec brio les règles de la dialectique éristique, ne négligeant aucune ficelle. Sans entrer dans une contre-argumentation point par point, il nous semble donc utile de relever ici quelques-uns des procédés utilisés par Monsieur de Salle.
D’entrée de jeu, le philosophe fait très fort : via le choix du titre, il élargit le contexte (ce qui permet de diluer le débat et d’utiliser plus d’arguments) et associe « l’adversaire » à une école de pensée archaïque. Tout en dénonçant le soi-disant manque de rigueur scientifique du WWF (« les constats de ce rapport sont contestables »), il avance péremptoirement que « les ressources naturelles s’accroissent avec l’accroissement de la population », affirmation sans fondement scientifique aucun qu’il justifie en citant … un économiste du XIXème siècle.
Dans une démonstration qui ne peut convaincre que le non spécialiste (et, malheureusement, sur ces matières pointues, les spécialistes sont rares), il induit ses propres conclusions du rapport du WWF en confondant intentionnellement diminution des populations et extinction des espèces, enchaîne des chiffres divers et conclut sur une référence à l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature). Mais outre que cette référence apparaît sans grande de signification en l’absence d’une contextualisation correcte, Monsieur de Salle néglige de relever que cette institution multiplie les signaux d’alarmes quant à l’état de la biodiversité (voir par exemple ici).
Le pourfendeur du rapport « Planète vivante noie le poisson » – vu le thème du débat, c’est de circonstance ! –, en mélangeant allégrement tout et son contraire : eau douce et eau potable, effets sanitaires de la combustion du bois dans des foyers domestiques et de la combustion des hydrocarbures fossiles dans des moteurs thermiques. Sans gêne aucune, il suggère aussi très adroitement que le WWF aurait des intentions – ou que ses recommandations auraient des conséquences – peu enviables : la généralisation des modes de vie des plus démunis. S’il n’était « abject » (pour reprendre un terme utilisé par Monsieur de Salle), son procédé serait tout simplement « grotesque » (idem).
Remarquons enfin que, comme la majorité des laudateurs de la technologie, Monsieur de Salle n’a aucune formation technique. Terminant son analyse sur une envolée lyrique relative à la possibilité de coloniser d’autres planètes que la Terre, notre philosophe verse dans une vision naïve de la conquête spatiale digne des bandes dessinées des années 1970. Il semble oublier que prétendument futuristes à l’époque, ces rêves de colonisations d’autres planètes se révèlent aujourd’hui simplement… archaïques.