Il y a un peu plus d’un an, en septembre 2015, les Nations Unies adoptaient à New York le Programme de développement durable à l’horizon 2030, dont les 17 Objectifs de développement durable (ODD), un programme ambitieux pour transformer notre monde afin que, dans 15 ans, il soit plus juste, plus durable et plus pacifique.
De nombreuses initiatives sont prises à tous les niveaux de pouvoir afin de mettre œuvre ce programme. La Wallonie a adopté en juillet dernier sa Stratégie wallonne de développement durable. Au niveau national, les entités fédérées préparent une Stratégie Nationale de développement durable afin de renforcer la collaboration entre les différents niveaux politiques en vue de la réalisation des ODD[[La Stratégie nationale de développement durable est actuellement soumise pour avis aux différents conseils consultatifs fédéral et régionaux.]] . Où en l’Union européenne dans la mise en œuvre ?
Où en est l’Europe en matière de DD ?
On pourrait croire à première vue que nos pays européens sont déjà bien placés pour atteindre les ODD, contrairement à beaucoup de pays « en développement » notamment. C’est oublier que l’Agenda 2030 de l’ONU va bien au-delà de l’agenda traditionnel Nord / Sud, où les pays riches viennent en aide aux plus pauvres. Il reconnaît plutôt que les modes de vie et les politiques non durables dans le Nord affectent directement les réalités sociales et environnementales dans le Sud. Nos pays riches ont en réalité une lourde dette écologique et sociale envers les pays du Sud : pensons seulement aux effets des changements climatiques dont nous sommes historiquement les principaux responsables et qui se font sentir de plein fouet dans les pays du Sud. Au-delà de la nécessité de réformer en profondeur les relations inéquitables que nous entretenons avec ces pays, l’Europe fait face également à d’importants défis internes. Le nombre de personnes exposées au risque de pauvreté dans l’UE a augmenté de 10 millions à 124 millions entre 2009 et 2013. Parallèlement, les inégalités de revenus ont augmenté, les salaires des 20% de la population les plus riches sont 5,1 fois supérieurs aux 20% les plus bas. Le taux de chômage est passé de 7,1% en 2008 à 10,9% en 2013. Le chômage massif et la forte pauvreté minent le fondement social de l’UE et déstabilise la vie politique en alimentant les votes contestataires pour les candidats aux extrêmes de l’échiquier politique (Trump outre-Atlantique). Le tableau n’est pas meilleur en matière de santé. Le nombre de personnes souffrant de maladies chroniques telles que le diabète, l’asthme et la démence est en constante augmentation. Pendant ce temps, la pollution de l’air est en train de devenir l’un des plus grands tueurs d’Europe[Source : L. Rijnhout (2016) [Is Europe ready for the 2030 Agenda for Sustainable Development? … not yet, p.2-3.]].
Les politiques DD en Europe
En juin 2006, le Conseil européen a adopté la stratégie de développement durable révisée qui fait l’objet d’un rapport de suivi bisannuel. Le développement durable figure également comme un objectif fondamental dans le Traité de Lisbonne. Ces bonnes intentions n’ont guère été suivies d’effet. Dans la pratique, le développement européen est guidé par la stratégie Europe 2020 qui vise la croissance économique et la compétitivité et n’inclut ni les enjeux Nord/Sud ni la reconnaissance des limites de notre planète. La révision de la stratégie DD prévue fin 2011 n’a d’ailleurs jamais eu lieu.
Les recommandations des ONG
Face à ce constat, les ONG européennes lancent ensemble un appel urgent pour que l’UE travaille à une stratégie ambitieuse pour la mise en œuvre de l’Agenda 2030[WWF (2016) « [Towards a sustainable European future »
Concord (2016) Sustainable Development.]]. Celle-ci viendrait compléter les efforts des États membres et démontrer la valeur ajoutée d’une action commune au niveau de l’UE. 2016-2017 est à cet égard un moment crucial pour l’UE. Plusieurs commissaires participent actuellement à la révision de leurs stratégies et politiques de base. Une stratégie globale de développement durable empêcherait ces politiques d’évoluer séparément et aiderait à la cohérence des politiques en faveur du développement durable, tant au sein de l’UE que dans les politiques extérieures de l’UE. Bien sûr, une stratégie efficace en matière de DD nécessitera des budgets pour soutenir sa mise en œuvre, des mécanismes de suivi et d’évaluation transparents et une participation à toutes les étapes de la société civile.