En septembre 2006, la Commission européenne présentait sa proposition de directive définissant un cadre pour la protection des sols. Cette directive a pour objectif de mettre en place une stratégie commune pour la protection et l’utilisation durable des sols. D’une ambition toute mesurée (voir notre nIEWs de l’époque), le projet de texte s’attachait à définir des objectifs, notamment en termes de fonctions à préserver, et y adjoignait des dispositions ciblant la gestion des risques, l’identification des sols contaminés et leur assainissement. Une des principales critiques émises par les environnementalistes tient au fait que la définition des objectifs concrets à atteindre était laissée à l’appréciation des Etats membres.
C’était encore trop pour 5 d’entre eux, qui ont créé, à la dernière minute, une situation de blocage lors du Conseil Environnement de décembre dernier. L’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas et le Royaume-Uni s’opposent fermement à toute directive, tandis que la France, du côté des contestataires mais favorable à l’idée d’un texte, propose de relancer les négociations dans le cadre de sa présidence de l’Union. Situation délicate que celle de jouer à la fois le rôle de minorité de blocage et celui de président.
La proposition de la France a été débattue en conférences des parties le 19 septembre dernier. Et le moins qu’on puisse dire c’est que les commentaires n’étaient pas très élogieux. Que la proposition ne puisse « même pas être qualifiée de directive » ou qu’elle « ne rencontre pas les critères propres à sa mise en application », est le reflet d’un malaise général face à un texte « vidé de sa substance ».
Le Bureau Européen de l’Environnement épingle principalement deux dangereuses modifications. Premièrement, disparition de l’obligation d’assainir un sol pollué selon une approche systématique commune. En lieu et place, chaque Etat membre serait amené à développer une stratégie nationale dans laquelle la liberté d’action est vaste, entre choisir de décontaminer, d’aménager ou de modifier l’affectation du sol. Deuxièmement, la proposition rend non obligatoire le fait d’identifier des zones à risque de dégradation. Cette disposition concerne les sols agricoles dont la perte de qualité liée à des pratiques non durables n’est plus à prouver. Lever cette obligation revient à se désintéresser de la problématique, alors qu’elle est liée à des enjeux de sécurité alimentaire à long terme.
Les observateurs voient clairement la marque des lobbys industriels et agricoles dans la proposition de la présidence française.
Malgré ces détricotages, la proposition n’a pas réussi à faire changer de position les 4 pays hostiles à l’idée d’un texte contraignant, ni à convaincre les 22 autres gouvernements, ceux-là même qui étaient prêts à adopter la directive l’année passée. Bref, une jolie foirade puisqu’il est très peu probable que le Conseil Environnement puisse maintenant s’accorder sur un texte avant l’année prochaine au plus tôt.