Faire attention au paysage

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Sortir en plein air près de chez soi n’est pas interdit – du moins, pour le moment – tant que nous respectons les précautions imposées. La dangerosité de la contagion oblige chaque personne à garder ses distances et à réduire son champ d’action physique. Confinement, avec possibilité restreinte de promenade, voilà l’occasion d’observer les paysages et, ainsi, de mieux comprendre la 4e balise du Stop Béton : le paysage bâti et non bâti.

Pour rappel, les huit balises du Stop Béton sont :

  1. l’accessibilité piétonne et en transports en commun
  2. l’accessibilité aux cyclistes et aux PMR
  3. l’échelle humaine
  4. le paysage bâti et non bâti
  5. le réemploi des matériaux et la restauration des bâtiments
  6. les aménités existantes
  7. les activités économiques existantes
  8. la végétation et les espaces verts en place – les continuités entre espaces naturels

Trois nIEWs ont déjà expliqué les trois premières balises :

« Pourquoi marcher ? »

« Fini les coupures »

« Echelle humaine, en direct du Décodage à Herstal »

Nous voici arrivés à la quatrième balise, celle du paysage bâti et non bâti. L’échelle humaine était une notion ambiguë, très relative. Ici, on fait à nouveau dans le complexe et le subtil : qu’est-ce donc qu’un paysage ?

Le paysage, c’est ce qu’il y a dehors

Selon la Convention Européenne de Florence (2000, publiée au Moniteur Belge en 2004), dite « Convention des Paysages »,  le mot « paysage » désigne « une partie de territoire telle que perçue par les populations, dont le caractère résulte de l’action de facteurs naturels et/ou humains et de leurs interrelations ».

La Convention de Florence s’est donné pour objet « de promouvoir la protection, la gestion et l’aménagement des paysages, et d’organiser la coopération européenne dans ce domaine (…) La Convention s’applique à tout le territoire des Parties et porte sur les espaces naturels, ruraux, urbains et périurbains. Elle inclut les espaces terrestres, les eaux intérieures et maritimes. Elle concerne, tant les paysages pouvant être considérés comme remarquables, que les paysages du quotidien et les paysages dégradés. »

« Article 5. Mesures générales. Chaque Partie (= état membre, région) s’engage :

  1. a) à reconnaître juridiquement le paysage en tant que composante essentielle du cadre de vie des populations, expression de la diversité de leur patrimoine commun culturel et naturel, et fondement de leur identité ;
  2. b) à définir et à mettre en œuvre des politiques du paysage visant la protection, la gestion et l’aménagement des paysages par l’adoption des mesures particulières visées à l’article 6 ;
  3. c) à mettre en place des procédures de participation du public, des autorités locales et régionales, et des autres acteurs concernés par la conception et la réalisation des politiques du paysage mentionnées à l’alinéa b ci-dessus ;
  4. d) à intégrer le paysage dans les politiques d’aménagement du territoire, d’urbanisme et dans les politiques culturelle, environnementale, agricole, sociale et économique, ainsi que dans les autres politiques pouvant avoir un effet direct ou indirect sur le paysage. »

IEW s’est emparé à plusieurs reprises du sujet des paysages, avec notamment une nIEWs « Au secours, ça grouille de paysages ! » qui mettait le doigt sur le fait que le paysage est absolument partout : « Rien ne sert de paniquer, ce n’est pas parce que le paysage se met à être partout que nous allons perdre pied. L’enjeu ne réside pas dans le paysage lui-même, mais dans la manière de le prendre en compte. Il faut déplacer notre point d’attention et relâcher la pression exercée sur les paysages : ce sont d’abord des lieux où ont pris place des écosystèmes, qui ne demandent qu’à évoluer. Ce sont les 1001 faciès mouvants d’un territoire fini dont les limites usuelles sont administratives. Faut-il à tout prix donner des contours précis, figés, à ces étendues aux dimensions éminemment variables ? Faut-il proclamer que certains sont au-dessus du lot, et ne se soucier que d’eux ? Faut-il énumérer les ingrédients miracles qui rendent le paysage beau ? »

Non, car le paysage est par définition intégrateur et omnivore. Le paysage ne trie pas. Le paysage, c’est tout ce qu’il y a dehors.

Dans La Lettre des CCATM n°71, consacrée aux paysages avec un « S », l’article « Le lieu se confond avec le paysage » conforte ce positionnement : « S’habituer à penser que le paysage est partout et constitue bien plus qu’une belle image, voilà qui ne sera pas facile à certains. Cela s’avère pourtant indispensable si l’on veut aller vers une meilleure prise en compte des paysages dans tous les projets d’aménagement. »

Pourquoi « bâti et non bâti » ?

Vous vous souvenez du CWATUPE ? C’était le Code l’aménagement du territoire, de l’Urbanisme et du Patrimoine, remplacé par le Code de Développement Territorial, CoDT. A chaque fois que le paysage devait être pris en compte, c’est à dire dans pratiquement toutes les procédures, le CWATUPE parlait de « lignes de force du paysage ». Cette formule de « lignes de force » aux accents 1970, si vague qu’elle fût, servait très sérieusement de pivot aux raisonnements d’autorisation (ou de refus). Un projet devait soit respecter, soit structurer, soit recomposer les lignes de force du paysage. Outre le fait que n’importe quel projet, quoi qu’il fasse et quelle que soit sa forme, s’inscrivait nécessairement dans l’une de ces hypothèses, les « lignes de force du paysage » ont régulièrement posé des dilemmes lors de l’instruction des dossiers, notamment éoliens. Leur définition a fait l’objet de discussions juridiques et de publications didactiques.

Associer au paysage l’idée de « lignes de force », c’était courir le risque de le limiter à une réalité plate, en deux dimensions. Cela revenait à exclure les autres caractéristiques du paysage et, par conséquent, exclure les paysages eux-mêmes, faute de savoir comment les appréhender. Probablement, le paysage d’un poster aurait mieux fait l’affaire que nos paysages réels !

A la demande d’IEW et de ses associations membres, demande répétée tout au long de la révision du CWATUP en CoDT (révision portée par le Ministre Henry, en charge de l’aménagement du territoire de 2009 à 2014) et la transformation du CoDT de 2014 en CoDT de 2017 (révision portée par le Ministre Di Antonio, en charge de l’aménagement du territoire de 2014 à 2019), la formule des « lignes de force » a été supprimée dans pratiquement toutes ses occurrences. Le Code du Développement Territorial l’a remplacée par « paysage bâti et non bâti », formule plus inclusive qui sort de la logique étroite du dessin vu depuis une fenêtre.

La nouvelle formule, «  paysage bâti et non bâti », transpose beaucoup plus concrètement la définition des paysages au sens de la Convention de Florence. IEW restant IEW, cette victoire ne nous a pas empêchés d’émettre un avis critique sur le texte final du CoDT, portant sur les aspects de patrimoine, de parcimonie et de participation citoyenne.

Quel paysage ?

Une requête Google sur l’expression « paysage bâti et non bâti » vous donnera un échantillon des débats et recherches autour de ces termes, en francophonie. Tout le monde s’accorde sur un fait : Le paysage bâti et les parties encore non bâties s’expliquent l’un par l’autre. Il y a des régions du monde où l’on a d’un côté le paysage bâti : il y a des bâtiments, des structures construites par l’homme telles que routes, ponts, arrêts de bus, abris à vaches en tôle ondulée. Et de l’autre côté, on a le paysage non bâti : il n’y a pas de construction, juste de la végétation, des masses d’eau aux berges naturelles et des affleurements rocheux, à perte de vue. Mais chez nous, impossible de séparer les deux notions. L’expression « paysage bâti et non bâti » résout l’opposition en rassemblant les deux situations. Il y a toujours du paysage, des fois il contient des bâtiments, des fois pas, ça reste un paysage.

Confinement, avec possibilité restreinte de promenade

Cet abonné Twitter propose 10 lieux à visiter : chez soi, chez soi, chez soi, chez soi, chez soi, chez soi, chez soi, chez soi, chez soi et chez soi (@mikegalsworthy 10 places to visit – Home).

Alors, puisque nous voilà confinés et que nous avons – pour le moment – la possibilité de nous déplacer à proximité de notre lieu d’habitation, profitons-en pour découvrir les paysages bâtis et non bâtis qui nous entourent. La possibilité de promenade est assez restreinte, cela ne l’empêche pas d’être riche et variée. Tout dépend de votre perception. Le Décodage solitaire des rues de votre quartier va vous donner l’occasion de mieux connaître et de fréquenter plus, pour protéger mieux, non seulement votre paysage familier, mais tous les paysages. Vous aurez compris, chemin faisant, à quel point les choses ordinaires ont de l’importance. Vous préféreriez visiter Copenhague ou Bali ?  Soyez déjà bien contents qu’on ne soit pas enfermés en confinement total, comme c’est le cas en Italie ou en Espagne !

  1. Seul, à deux, ou plus ?

Tenons-nous au courant des précautions qui s’imposent et restons raisonnables dans nos sorties, notamment quant au moment et au nombre de personnes qui nous accompagnent, pour éviter qu’à notre tour nous devions, comme en France, voir les contrôles de nature policière envahir notre vie. Pour vous encourager à sortir marcher seul.e, notre association Tous à Pied a les mots qu’il faut : https://www.tousapied.be/articles/je-marche-seul-dixit-jean-jacques-goldman/

2. Sortir ou pas sortir ?

Pour s’aérer, faire fonctionner ses muscles, changer d’idées, se confronter un tant soi peu au réel, redevenir de bonne humeur, avoir l’impression que la journée est complète, tous les prétextes sont bons pour se porter volontaire pour les courses. Surtout, si l’on se dit que c’est peut-être la dernière fois avant que ce soit interdit. Alignez votre motivation sur les recommandations officielles en consultant régulièrement les mises à jour du site fédéral info-coronavirus.be/fr/

3. Changer d’itinéraire

Le paysage bâti et non bâti vient à votre rescousse quand vous devez marcher seul.e. Au lieu de faire cent fois le même itinéraire, il vous invite à aller jeter un œil là où vous n’aviez jamais été. Avant de retourner goûter au confort intime de vos quatre murs, allongez votre itinéraire de quelques centaines de mètre, d’un bon pas. Comme vous n’avez personne avec vous, pas besoin de négocier les changements de trajets ou de promettre que ça ne prendra que quelques minutes en plus. Pas besoin non plus de systématiquement tout explorer en une fois : laissez des tronçons et des rues inexplorés, pour la prochaine sortie.

4. Rester sur l’espace public

Il y en aura sans doute parmi nous pour trouver que fréquenter indéfiniment son propre jardin est plus intéressant et moins risqué que se lancer à la découverte de l’espace public du voisinage. Un séjour touristique forcé dans son propre quartier, c’est inédit pour beaucoup de gens, et c’est encore plus inédit à pied. Les circonstances particulières présentent une opportunité pour, par exemple, se rendre compte du confort ou de l’inconfort de l’espace public pour les piétons. Délaissez les parcs, qui ont le désavantage d’être très fréquentés et de ne pas toujours permettre l’écart souhaité entre personnes, et offrez-vous le calme des ruelles, avenues, impasses, ponts, boulevards, sentiers. Sans jamais sortir de l’espace public : aidez-vous d’une carte au besoin, et ouvrez l’œil pour les panneaux « propriété privée ».

Une fois le confinement terminé, j’ose parier que vous aurez pris goût à ces excursions et que vous les poursuivrez. Vous constaterez alors que l’espace public dans son ensemble est très peu fréquenté par les piétons et qu’il y a toujours des itinéraires de rechange si l’on veut croiser moins de monde. Il n’y a donc pas besoin de « chemins privés » pour être tranquilles…

En route pour un Décodage solitaire

Au lieu de rester enfermés comme le tigre qui s’étiole dans sa cage, nous arpentons les rues vides. Samuel Pepys circulait à Londres en 1665 pendant l’épidémie de la Grande Peste et voilà ce qu’il racontait, qui ressemble étrangement à ce que nous pourrions constater aujourd’hui : «But, ‘Lord!’ how sad a sight it is to see streets empty of people. Jealous of every door that one sees shut, lest it should be the plague, and about us two shops in three, if not more, generally shut up. » Mais au lieu d’être tristes, nous pouvons remercier silencieusement l’effort de chacun de suivre le mot d’ordre « Stay at home [provided you got one] », « Restez à la maison [en supposant que vous en ayez une] ».

S’intéresser pour mieux connaître

Sur le site The School of Life, orchestré par le philosophe Alain de Botton, une page récemment mise en ligne célèbre les vertus du cheminement dans les rues désertes : « Nous aurons aussi, en cours de route, appris à apprécier les plaisirs jusqu’ici peu claironnés, d’une ballade vespérale dans des rues familières, sans histoires et profondément aimables (…) Nous deviendrons des experts sur tout ce qui est extraordinaire et disponible au moindre coût dans l’ici-et-maintenant. » Mais Alain de Botton a -selon moi – écrit ailleurs ses meilleures pages sur la capacité à regarder autrement ce que nous croyons connaître. Dans « The Art of Travel » (L’art du voyage) publié en 2002, il explique comment John Ruskin poussait ses élèves à dessiner ce qu’ils voyaient dans la nature : « Pas pour faire d’un charpentier un artiste, mais pour le rendre plus heureux comme charpentier ». Dessiner dans le but de remarquer, dessiner pour apprendre à voir. Assez obsédé par les dérives du tourisme qui bourgeonne à  son époque, Ruskin ne se prive pas de semoncer les industriels qui dament les rives des lacs, percent des tunnels sous les montagnes, lancent des ponts sur la moindre vallée riante, au service d’une seule conception du loisir : masse et vitesse. A force de vouloir atteindre le paysage, ils le saccagent. Ushuaïa, sur TF1, en 1998 ? Non, Manchester, 1864.

L’appréciation du familier n’est pas une chose neuve du côté des arts plastiques, et l’origine ordinaire des sujets de vues de ville ou de villages n’a pas empêché leur succès international. J’en veux pour preuve deux exemples, le Dénombrement de Bethléem, de Pieter Bruegel (1566, conservé aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, à Bruxelles) et La Ruelle, de Johannes Vermeer de Delft (vers 1658, conservée au Rijksmuseum d’Amsterdam). Parmi la pléthore d’artistes plus récents qui photographient, peignent et dessinent les paysages qu’ils ont sous la main, Andrew Wyeth, qui a justement été mis en valeur il y a quelques jours sur twitter parce qu’il peignait ses environs :

Le paysage bâti et non bâti de Wallonie figure en star dans la séquence « Micro-trottoir » de Freddy Tougaux dans l’émission « Le Grand Cactus » : à chaque fois un village ou une ville, des jeux de mots et des passants qui résistent plus ou moins bien à l’interview. Le cinéma belge s’est lui aussi fourni dans le rayon « local », ce qui donne d’autant plus de sel au Micro-trottoir tourné à Lessines pour la Cérémonie des Magritte.

Vous avez envie voir la nature sauvage ? Rapprochez-vous de cette dent creuse…

… et essayez d’identifier quelques espèces végétales. Apercevez-vous des insectes ? Entendez-vous des oiseaux ?

Et si l’état de l’environnement commençait par son état près de chez vous ?

Fréquenter plus : voir comment ça va

Une fois qu’il aura (r)éveillé votre intérêt, le paysage bâti et non bâti de votre quartier va probablement vous interpeler dans les grandes largeurs. En marchant et en regardant, on compare, on pense. Pourquoi les portes d’entrée de ces maisons sont elles remplacées par d’énormes volets de garage ? Pourquoi  ce jardinet de devant est-t-il carrelé comme une salle de bain ? Pourquoi ici n’y a -t-il pas de trottoir, ni même d’accotement ? Pourquoi le coron est-il implanté un demi-mètre plus bas que la route ? Ce questionnement technique et typologique vous embarque dans une réflexion sur les enjeux et les choix de société. Tiens, là, vous ne vous ennuyez plus du tout !

Le paysage bâti, si vous l’utilisez comme le compagnon de vos pérégrinations, vous racontera l’urbanisation progressive du territoire. Il vous offrira un catalogue inépuisable de styles, d’époques, de matériaux et de couleurs. Il peut vous réconcilier avec l’architecture contemporaine. Le bâti existant vous apprendra à ne plus prendre pour argent comptant les affirmations sur les coûts assourdissants de l’isolation des maisons anciennes ou la soi-disant efficacité des immeubles-tours pour résoudre la problématique du manque de logements.

Et si la nécessité de construire plus de logements était démentie par le nombre de bâtiments ou d’étages vides que vous apercevez sur votre chemin ?

Et si on réutilisait cette énorme fabrique désaffectée, tant qu’elle a encore un toit et des vitres, au lieu de la laisser dériver à vau-l’eau ?

Et si l’utilité réelle de la voiture pour certains déplacements venait à être définitivement contredite par ces marches qui vous permettent de rejoindre des points que vous pensiez situés tellement loin de chez vous ?

Ce décor de façades et de jardins ne semble en tout cas pas avoir à se plaindre de votre passage paisible (après tout, vous exhalez moins de choses nocives qu’un Hummer). Et, une fois de retour à la maison, ce que vous avez vu vous habite, vous avez désormais plus d’images à mettre sur des concepts : le Décodage solitaire produit ses effets !

Pour protéger mieux

Le paysage bâti et non bâti a besoin de votre intérêt. Mieux connaître, fréquenter plus, peuvent vous amener à avoir envie de protéger et vous met en capacité de mieux protéger.

Ainsi que l’atteste le récent rapport dressé par IEW sur l’état de la biodiversité dans les communes wallonnes, « il serait profitable de favoriser une bonne connaissance du territoire de la commune. Cela peut passer par une appropriation d’outils tels que le plan de secteur, les fiches communales créées par la CPDT, les indicateurs locaux de l’IWEPS ou l’étude du réseau écologique pour les communes disposant d’un PCDN. Mais, il ne fait pas de doute que, pour connaître au mieux ce qui fonde son territoire, le moyen le plus solide est de l’arpenter, à pied ou en vélo, avec les acteurs de terrain : agriculteurs, forestiers, membres du contrat de rivière, grands propriétaires, associations, etc. »

Lors des rencontres organisées par IEW fin 2019 avec les communes, rencontres qui ont conduit à la réalisation de ce rapport, plusieurs participants ont, par exemple, indiqué qu’il n’y avait pas de surfaces boisées sur leur territoire communal alors qu’une recherche cartographique et au plan de secteur en indique. Quelques uns ont confié leur ignorance complète de ce que sont les sites Natura 2000, les sites de grand intérêt biologique (SGIB) ou encore les sablières. La majorité des participants ont admis méconnaître leur territoire. Tous les participants ont exprimé qu’une meilleure connaissance de leur territoire leur permettrait de concevoir une politique communale plus efficiente pour la biodiversité.

Du local au global, chaque geste compte. Comme l’explique Sonia Shah dans « Contre les pandémies, l’écologie », article paru sur le site du Monde Diplomatique, les maladies virales sont la conséquence de la disparition des habitats naturels, mais aussi de la création de nouveaux milieux favorables à un nombre très limité d’espèces. Et cela commence près de chez vous. Si vos promenades vous amènent le long d’un bassin d’orage, vous pourrez y observer facilement à quel point les moustiques y pullulent. Ce genre de milieu artificiel est favorable à des espèces dont les prédateurs ont disparu, suite à la destruction de leurs habitats : bosquets, veilles maisons, buissons, prés de fauche, haies anciennes, champs sans pesticides. Véritable emplâtre sur une jambe de bois, le bassin d’orage en béton ne peut à lui seul résoudre les problèmes d’intempéries ; pire, il crée de nouveaux problèmes écologiques dont il est grand temps de prendre toute la mesure.

Il est temps de ménager notre territoire

Dans les neufs valeurs-seuils de Rockström, qui sont les limites utilisées pour déterminer les dix-sept Objectifs du Développement Durable, la valeur-seuil de l’utilisation du sol (Land use) n’a pas encore été dépassée au niveau mondial. C’est étonnant. Il faut croire que le chiffre global bénéficie de la faible urbanisation du Sahara, de l’Atacama, de la Patagonie, du désert de Gobi ou du Groenland. Parce que, si on se contentait de globaliser les pays côtiers de l’Afrique occidentale avec Honk-Kong et la Belgique, la valeur-seuil serait déjà franchie, voire même pulvérisée.

Vous en doutez ? Regardez cette carte, réalisée par De Standaard, pour montrer la bétonisation du territoire de la Flandre et de Bruxelles, par année-clé : 1975, 1990, 2000, 2014.

Là, on peut vraiment dire que le paysage bâti a largement pris le pas sur le non bâti. A nous de faire en sorte que cela n’arrive pas en Wallonie. Stop Béton !

Pour aller plus loin

Quelques conseils de lecture

« Marcheur giratoire pratiquant régulièrement des tours de villes dont il suit les limites administratives, Olivier Bleys nous conte ici sa dernière aventure à pied, et dresse son autoportrait de marcheur urbain. » http://olivierbleys.com/livres/manifeste-de-la-marche/

 Ine Renson, journaliste au Standaard, publie régulièrement des articles sur le Stop Béton, l’artificialisation des sols et les solutions à mettre en route. Par exemple, « Hier blijft ruimtelijk afval gewoon staan », de janvier 2020, où elle interroge des acteurs de l’urbanisme flamand sur les bâtiments sans usage et la possibilité de les démolir.

Pour connaître les valeurs immobilières de toutes les communes, « Le dernier bon placement », un dossier Grands formats paru dans le Moustique du 26 février 2020.

« The Gentle Author » vous fait virtuellement visiter Londres sur son blog avec des photos magnifiques et des textes qui le sont tout autant. Par exemple, Hackney, entre ville dense et restes de ruralité : https://spitalfieldslife.com/2019/04/01/along-the-black-path/

Grilles de lectures, explications pas à pas du paysage rural et urbain : L’Atlas des Paysages, publié par la CPDT, est disponible en ligne. Par exemple, la Thiérache, à la frontière française du côté de Couvin : https://cpdt.wallonie.be/publications/atlas-des-paysages-de-wallonie/atlas-des-paysages-de-wallonie-5

Quelques exercices

Quand le confinement aura pris fin : des visites sur le terrain 

  • Les Décodages d’IEW, des formations en aménagement du territoire en journée, sur le terrain et gratuites, dont le succès grandit d’année en année. Le calendrier sera diffusé dès que le retour à la normale aura été autorisé en haut-lieu. Sont prévus cette année : Soignies, Leuze-en-Hainaut, Leuven et Rixensart.
  • A Charleroi : André et Béatrice Lierneux-Garny poursuivent leur collaboration avec la Maison du Tourisme de Charleroi pour faire visiter cités sociales, écoles, maisons d’artistes, quartiers, sites industriels. Un menu qui s’annonçait passionnant pour 2020 et sera certainement ajusté après le confinement. Pour tous renseignements : maison.tourisme@charleroi.be

Enfin, pour garder à l’esprit les consignes de sécurité et prendre connaissance de leur mise à jour quotidienne : consultez www.info-coronavirus.be, qui diffuse notamment le Point Presse du jour. Des vidéos très utiles pour ceux qui préfèrent voir et entendre plutôt que lire sur écran.

Prenez soin de vous, pensez à toutes celles et tous ceux qui nous aident à tenir le coup.


La crise du coronavirus nous interpelle toutes et tous et il convient de se concentrer sur l’urgence sanitaire et sociale. Mais pour nous, spécialistes des questions environnementales, la question des liens avec nos matières est également présente. Nous continuons donc à vous informer. N’hésitez pas à nous contacter pour toute collaboration utile sur nos matières. Prenez soin de vous et des autres.