L’intercommunale de développement économique Idelux, active dans la province de Luxembourg, a entrepris la certification Validéo de ses parcs d’activité économique. La démarche est de longue haleine, mais un premier parc de 6 hectares vient déjà de recevoir son certificat « développement durable », alors qu’il sort à peine de terre.
Le nouveau parc d’activité économique d’Idélux – l’heureux gagnant – se situe en retrait de la Route Nationale 4, à l’entrée ouest du village de Tenneville. Il porte le nom de PAE de Tenneville-La Roche. Dès 2007, un partenariat avait été mis sur pied entre Idélux et les communes de Tenneville et La Roche-en-Ardenne pour développer un parc d’activité économique au lieu-dit le Gris-Han, au sud du coude de la Nationale 4. A cet endroit, le plan de secteur prévoit une longue zone d’activité économique mixte en forme de triangle. Une scierie est installée sur une parcelle de sa moitié orientale, en pointe vers Tenneville ; le reste de la zone est exempt de constructions. Sur sa limite ouest, la zone jouxte un petit parc à conteneurs communal en pleine activité. L’adéquation au zonage du plan de secteur, impeccable, se trouve renforcée par le voisinage entre usages compatibles, un critère jugé essentiel en matière de développement durable.
En 2009, les premiers coups de pelle mécanique entamaient la terre du Gris-Han en arrière-plan, tandis que Marc Gauthier, bourgmestre de Tenneville, se réjouissait de deux initiatives liées au projet[[Leslie BOSENDORF, « Le parc économique va sortir de terre » dans L’Avenir Luxembourg, 8 septembre 2009.]] : « La Région wallonne a décidé l’implantation d’un hall relais sur cette zone. Ce bâtiment permettra à une entreprise qui débute de s’installer provisoirement. C’est la possibilité de louer un local sans prendre de risque. (…) Nous disposons d’un comité de concertation, qui peut donner son avis sur le schéma d’aménagement et sur le positionnement économique de la zone. Nous pouvons aussi donner notre avis quant aux activités dont nous n’approuvons pas la présence sur le site.» Des mesures qui viendront renforcer l’intérêt du parc au travers de la rigueur de sa gestion. Les pouvoirs locaux se rendent en effet de plus à l’évidence : minimiser les contraintes liées à l’aménagement du territoire et au respect de l’environnement ne mène à rien de bon. Il faut au contraire les assumer en pleine connaissance de cause, pour s’ouvrir à des solutions inédites et établir de nouveaux partenariats avec les investisseurs. Quant à la diversification de l’offre, elle s’avère capitale pour les personnes et les entreprises actives dans la province de Luxembourg[[Les Très Petites et Moyennes Entreprises (TPME) sont particulièrement demandeuses. Le vivier de main d’½uvre de la province est lui aussi demandeur, car il n’est pas suffisamment employé sur place. La variété d’entreprises ne correspond pas aux profils professionnels disponibles. Cette inadéquation entre qualifications, types de métiers et types d’entreprises peut être combattue en modifiant l’existant, c’est à dire en démultipliant les possibilités d’emploi. Pour cela, il faut que les parcs d’activité soient capables d’attirer et d’accueillir de nouvelles combinaisons d’entreprises. Une formule véritablement mixte, tant sur le plan de la taille des parcelles que sur les types d’activités autorisées, qui ouvrirait la porte à plus de services et de PME. La vigilance devra dans ce cas porter sur l’exclusion des commerces aux particuliers, toujours prêts à s’engouffrer dans ce genre de brèche.]]. Sans ce genre d’attention, elles risquent bien de perdre leur ardeur ou d’aller voir ailleurs.
Une première en Belgique
Le 15 décembre dernier, le PAE Tenneville-La Roche a reçu son certificat « développement durable » au terme d’une procédure qui constitue la toute première certification belge Validéo applicable à l’aménagement d’un parc d’activités. Le projet de parc a rencontré de manière satisfaisante les critères du référentiel de l’organisme Validéo, qui reprend presque mot pour mot les termes de l’article 1er du CWATUPE : parcimonie vis-à-vis des ressources, valorisation du site, respect de la qualité de la vie, économies d’énergie, accessibilité à tous les types d’usagers. Ces exigences tombent sous le sens pour beaucoup d’acteurs de l’aménagement du territoire, mais il est parfois malaisé de les mettre en ½uvre, tant que les partenaires ne se sont pas entendus sur les réalités et les possibilités que les termes recouvrent. La démarche de certification offre l’occasion de partager des objectifs vis-à-vis de l’environnement comme vis-à-vis du projet économique.
A l’instar de la norme HQE (Haute Qualité Environnementale) en France, de BREEAM (Building Research Establishment Environmental Assessment Method for buildings) en Grande-Bretagne, ou encore de LEED (Leadership in Energy and Environmental Design) aux Etats-Unis, Validéo vise l’efficacité sur le plan de la diminution des ressources utilisées par le secteur de la construction, tout en sensibilisant la société à ses responsabilités environnementales. Mais l’expertise « développement durable » de Validéo se veut plus large. Elle s’applique à la globalité d’une construction et de ses impacts. Ainsi, aux meilleures pratiques et aux meilleures techniques disponibles dans le domaine de la construction dite écologique, la firme belge a ajouté la notion de durée, ce qui est bien la moindre des choses en matière de développement durable… mais ne semble pas encore de mise dans les autres pays.
Pour prendre en compte la gestion des ressources et la maintenance sur toute la durée de vie du bâtiment, l’analyse s’appuie sur une synergie importante entre Validéo et deux organismes belges : BCCA (Belgian Construction Certification Association – organisme de certification) et SECO (Bureau de Contrôle Technique pour la Construction – organisme d’attestation). La déclaration de conformité, la décision de certification et de l’enregistrement sont la mission de BCCA. Les attestations et les audits sont réalisés par SECO, selon un suivi évolutif. Durant la phase de la conception du projet, les ingénieurs de SECO informent et motivent le candidat pour atteindre les performances maximales, en fonction de ses ambitions dans chacun des domaines couverts par Valideo.
Un référentiel adapté aux PAE
Dans le cas qui nous occupe, à la demande spécifique d’Idelux, les seize rubriques groupées en quatre thèmes du référentiel type de Validéo ont été adaptées par le bureau SECO à l’aménagement des parcs d’activité économique.
1. Site d’accueil du parc et aménagement, construction
Objectif : Estimer et contrôler l’impact sur le site et ses environs pour toute la durée de vie du parc d’activité économique
• Intégration : Valorisation du site d’accueil du parc, du bassin économique – Empreinte environnementale et aménagement urbanistique du site
• Chantier du parc d’activité : Gestion des nuisances sonores, visuelles, gestion des déchets, gestion de la circulation et des circuits de transport
• Matériaux, produits nécessaires à la réalisation du chantier : Limitation des quantités, utilisation rationnelle, prise en compte de la durabilité, du recyclage et de l’impact sur la santé
• Adaptabilité du plan du parc : Flexibilité dans l’usage, possibilité de faire évoluer les fonctions, de réaffecter des bâtiments.
2. Gestion
Objectif : Evaluer la consommation des ressources pendant l’exploitation du parc d’activité économique
• Energie : Limitation des besoins, recours aux énergies renouvelables, optimisation de l’efficience
• Eau : Limitation des besoins, utilisation des eaux pluviales, traitement des eaux usées
• Entretien & maintenance : Conception d’un programme d’entretien et de maintenance, mise en application et évaluation régulière
• Déchets en exploitation : Limitation des quantités, réduction des nuisances, prévoir des zones de stockage et d’enlèvement
3. Confort & santé
Objectif : Assurer un niveau de confort et de qualité de vie aux usagers du parc d’activité économique
• Confort visuel : Assurer un éclairage adapté à l’usage, utilisation de la lumière naturelle
• Confort Acoustique : Maîtrise des nuisances extérieures et intérieures, notamment causées par les équipements et infrastructures
• Santé : Qualité de l’air,(rayonnement, odeurs…), qualité de l’eau, qualité des espaces
• Hygrothermie : a été considérée sans objet pour les parcs d’activités économiques mixtes (concerne la maîtrise des températures et de l’hygroscopie, leur homogénéité dans l’espace et le temps)
4. Valeur sociale
Objectif : Lier le parc d’activité économique avec la communauté extérieure
• Lieu de vie : Aménagement des lieux favorisant les échanges, cadre soigné
• Mobilité : Transports en commun favorisés, recherche d’alternatives à la voiture individuelle
• Accessibilité : Accès au site et aux entreprises, en toute sécurité, pour tout type d’utilisateur, notamment les personnes à mobilité réduite
• Anti effraction : Protection vis-à-vis des intrusions
Illustration : Plan détaillé du PAE de Tenneville-La Roche. Le PAE occupe la moitié ouest du triangle prévu au plan de secteur 60/5. Le parc à conteneurs, absent du dessin, s’inscrit dans la courbe concave de la limite occidentale du parc. Document Idélux.
Le projet du PAE de Tenneville-La Roche brille particulièrement dans les matières suivantes : équilibre dans la gestion des terres sur chantier, éclairage public performant et de qualité, limitation des surfaces imperméabilisées, mise en place d’un réseau séparatif d’évacuation des eaux, limitation de l’impact de la circulation locale, réservation d’espaces de parkings privés suffisants pour éviter le stationnement sauvage, bonne intégration paysagère. Sur ce dernier point, le dessin du PAE est explicite et plus qu’illustratif : les noues, bassins, passerelles et sentiers seront réellement aménagés à l’endroit prévu, pour atteindre ensemble des objectifs d’égouttage et de liaison verte. Au-delà du parc, au nord-ouest, une zone Natura 2000 sera accessible par un cheminement accessible à tous, qui est lui aussi déjà tracé sur le plan.
Parmi les mesures que l’intercommunale Idélux entend mettre en route avec les futures entreprises du PAE Tenneville-La Roche, figure la « Charte urbanistique », déjà d’application depuis plusieurs années dans ses autres parcs. Ce contrat d’une vingtaine de pages, signé avec chaque entreprise, fixe un cadre global afin d’assurer la continuité de la démarche environnementale. Le jeu est dès lors très clair, car les interlocuteurs sont identifiés, les limites sont posées, dans un engagement réciproque. L’Intercommunale planche en ce moment sur une version synthétique de la charte, à présenter aux entrepreneurs en amont de leur décision. Destinée à faire gagner du temps sans perdre de vue les objectifs de conscientisation urbanistique et environnementale, elle sera illustrée et accompagnée d’une cartographie. Les chargés de mission d’Idélux constatent déjà à quel point un résumé et une bonne illustration permettent d’apaiser les quiproquos et de dynamiser la prospection pour ce parc très particulier.
Le PAE entre à présent dans sa phase de commercialisation, moment-clé pour la mise en correspondance des demandes des entreprises avec l’offre en terrains. Ici, les entrepreneurs se retrouvent non seulement face à des superficies disponibles, mais aussi face à un concept, en l’occurrence un label de qualité. Pour l’entrepreneur qui manque de temps, ce genre de certificat facilite la vie, puisqu’il remplace une recherche multicritères conduisant au choix ou au rejet d’une localisation donnée. Valideo se présente d’ailleurs sans ambages comme un investissement à court et à long terme : les économies d’énergie et de maintenance à l’exploitation assurent un retour financier rapide, tandis que la valeur de revente est augmentée par la démarche réussie de certification. Reste à l’intercommunale à implanter judicieusement les entreprises candidates, histoire de ne pas perdre en chemin les lauriers durement gagnés. Quant au processus de certification, il sera réitéré pour d’autres parcs, existants ou en projets, dans toute la province. Ce qui compte, au-delà des critères, c’est l’attitude, la volonté de mener à bien une démarche que l’on comprend et dont on est fier. Sur ce chapitre, Idelux a déjà prouvé sa compétence.
Illustration : Le parc naturel des Deux-Ourthes : vue aérienne de la zone de confluence. Copyright Marie-Eve Castermans.
En savoir plus
Une association regroupe les intercommunales de développement économique de Wallonie : Wallonie-Développement. Son site sert notamment de portail vers chaque site particulier des intercommunales, de porte-voix pour les actions communes et, bien évidemment, de vitrine consacrée à la valorisation de l’ensemble des parcs existants.
Le lien direct vers le site d’IDELUX, l’intercommunale de développement économique de la Province de Luxembourg : www.idelux-aive.be
Le PAE deTenneville-La Roche fait-il partie d’un plan prioritaire pour l’activité économique ? Non. La zone où va s’installer le PAE de Tenneville-La Roche étant une zone d’activité économique mixte entérinée de longue date par le plan de secteur, le PAE dont question ici ne relève d’aucun des deux plans prioritaires. Pour rencontrer les besoins toujours croissants de l’activité secondaire en terrains vierges, deux plans prioritaires ont été arrêtés en Wallonie, l’un en 2004, l’autre en novembre 2010. Ces PP1 et PP2 listent chacun des dizaines de sites et des centaines d’hectares que le Gouvernement wallon décide de consacrer à l’activité économique, sur des terrains dévolus à d’autres fonctions – essentiellement l’agriculture.
Pour aborder la législation en matière de construction durable : la voici telle qu’examinée par le prisme de Validéo.
Les parcs, ce n’est pas ce qui manque à Tenneville !
1. A tout seigneur tout honneur, le parc naturel des Deux-Ourthes, ou PNDO, qui fêtera ses dix ans ce dimanche 29 mai avec notamment une animation sur l’Observatoire Citoyen du Paysage : « paysages d’hier, d’aujourd’hui et de demain ». L’un des objectifs primordiaux du parc naturel est de restituer aux fonds de vallées leurs caractéristiques pour favoriser les échanges entre zones de grande biodiversité et richesse naturelle. Il s’étend sur plusieurs communes, dont Tenneville. L’absence de cartographie claire sur le site du parc est à déplorer ; elle est certainement dommageable à la fréquentation du parc naturel et à son respect. L’Office de Promotion du Tourisme de Wallonie et de Bruxelles, sur la page qu’il consacre à ce parc, publie un extrait de la carte Google, ce qui n’est guère mieux. Mais les choses pourraient changer, qui sait ?
2. Le Centre d’enfouissement technique (CET), que d’aucuns surnomment « parc à déchets », se trouve au nord du village de Tenneville, au lieu-dit Al Pisserotte. Il est prévu pour gérer les déchets ultimes produits dans la zone d’action d’Idélux, à savoir les encombrants non valorisables, les déchets résiduels collectés au domicile des citoyens et des déchets inertes. Il est équipé selon les exigences les plus récentes pour maîtriser les impacts sur l’eau, le sol et l’air : étanchéité multicouche ; gestion performante des eaux usées, valorisation du méthane sous forme d’énergie électrique et de chaleur. Avant d’être enfouis, les déchets sont « bio-séchés ». Ce traitement réduit le taux d’humidité et permet de composter les résidus de matières organiques encore présents dans les déchets collectés.
3. Le parc à containers, déjà cité dans cet article, est le voisin immédiat du futur parc d’activité économique Tenneville-La Roche.
=> Il serait probablement de la plus haute utilité de mettre en place sur tout le territoire communal des panneaux signalétiques guidant vers chacun des parcs, sans qu’aucune ambiguïté subsiste entre les quatre parcs. Mais un tel projet est coûteux et repose sur des concertations longues, où l’identité graphique a parfois du mal à admettre la primauté de l’efficacité de l’information « grand public ».
Extrait de nIEWs (n°93, du 26 mai au 9 juin),
la Lettre d’information de la Fédération.
Découvrez les autres articles en cliquant ici.