Le groupe SNCB, les sociétés régionales de transport (TEC, STIB, De Lijn), la Fédération belge de l’industrie automobile et du cycle (FEBIAC) et la fédération des entreprises de Belgique (FEB) viennent, au terme de deux journées de rencontre (« Mobilys – Rail meets Road » qui se sont tenues ces 10 et 11 mars), de signer un mémorandum commun. Selon les termes du communiqué de presse diffusé à l’occasion, il s’agissait pour chacune des parties de « mettre sur papier ses engagements en vue d’aboutir à des changements concrets ». Mais de quels changements est-il question ?
Partant du constat que, selon le Bureau Fédéral du Plan, les transports de marchandises et de personnes devraient, entre 2005 et 2030, augmenter de respectivement 47% et 22%, et prenant acte de cette évolution pressentie sans la remettre en question, le texte du mémorandum tente le grand écart schizophrénique auquel nous sommes malheureusement habitués. Il s’agit, selon les termes du mémorandum, de « concilier la croissance de la mobilité et la qualité de vie et le bien-être du citoyen ».
Il n’est donc aucunement question, ici, de maîtrise de la demande de mobilité, qui est pourtant reconnue comme le principal levier de toute politique de mobilité durable. A titre d’exemple, dans son avis-cadre pour une mobilité compatible avec le développement durable, le Conseil fédéral du développement durable (CFDD) estimait, en 2004, « que la gestion de la demande de transport doit être à la base d’une stratégie de mobilité durable, avec l’objectif de maîtriser la demande de mobilité et de rationaliser les moyens de la satisfaire ».
Outre les mesures proposées aux autorités, le mémorandum présente les engagements de l’industrie automobile, des chemins de fer, des sociétés régionales de transport public et de la fédération des entreprises de Belgique. Comme pour les fromages belges, on y trouve « un peu de tout ». Ainsi, au niveau des mesures proposées aux autorités, le texte se promène de l’encouragement fiscal au rajeunissement du parc automobile à la promotion des système de récupération de l’énergie lors du freinage en passant par l’éco-conduite, le télétravail et les « carburants alternatifs », beaucoup de déclarations de bonnes intentions et le « groupement de lignes de bus sur un axe afin d’améliorer l’utilisation de l’infrastructure routière » (ou pour faire de la place pour les voitures ?).
Certains s’interrogeront : mais que sont donc allées faire les sociétés de transport public dans cette galère ? On pourrait retourner la question : que fait donc la FEBIAC dans cette affaire, elle dont les intérêts immédiats (ceux qui motivent les actionnaires principaux qui pèsent dans les conseils d’administrations) sont en contradiction avec les objectifs environnementaux, comme viennent encore de le prouver les lobbys industriels en parvenant à affaiblir jusqu’à la caricature le Règlement européen fixant les limites d’émissions de CO2 des voitures ? (voir cette nIEWs et celle-ci).
Eh bien, très concrètement, l’industrie automobile s’engage à :
promouvoir les achats, déplacements et conduites plus économes en énergie (verra-t-on dès lors les voitures bas de gamme damer le pion aux 4X4 et grosses berlines dans les publicités ?) ;
proposer des formules vertes de « car-leasing » et « mobility leasing » (ce que fait déjà la SNCB avec l’initiative « Railease ») ;
diminuer la pollution associée à la production de véhicules ;
introduire des véhicules fonctionnant avec des carburants alternatifs (le mouvement est lancé et de tels véhicules font la une de tous les salons auto depuis quelques années déjà) ;
respecter la législation européenne, en introduisant sur le marché des véhicules qui satisfassent aux normes (ah bon, il y a moyen de faire autrement ?)
En fait, la motivation première de la FEBIAC est peut-être à rechercher dans quatre lettres. Quatre lettres absentes du titre du mémorandum et qui, (ré ?)intégrées, lui donnent une toute autre signification : W, A, S et H.
Alors, Greening ou Greenwashing Transport ? A chacun de se faire un avis. Mais reconnaissons que, quand ils parlent d’environnement, les lobbys de l’industrie automobile sont, actuellement (les choses peuvent changer : osons rêver !), aussi convaincants que Sylvester Stallone présentant une causerie sur la communication non-violente.