IEW se positionne sur la biomasse-énergie

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Le Gouvernement wallon doit très prochainement adopter une stratégie « biomasse énergie ». Avec le cadre et le décret éolien, la réforme des certificats verts, le décret électricité ou encore le plan d’efficacité énergétique, cette stratégie constitue une nouvelle pièce d’un « puzzle» qui, une fois formé, devra donner une certaine vision du paysage énergétique wallon à court et à moyen terme.
Si les contours de ce paysage semblent encore flous, la Fédération Inter-Environnement Wallonie a défini, et défend, sa vision de la transition énergétique, où sobriété et efficacité devront permettre à terme un avenir 100% renouvelable.
Parmi les énergies renouvelables qui doivent composer notre mix énergétique actuel et futur, la biomasse-énergie occupe une place particulière. De nature variée et répartie sur toute la surface du globe, c’est une énergie stockable, valorisable par différentes voies et qui procure de l’énergie sous différents vecteurs (chaleur, électricité, carburants pour le transport). Elle peut également pallier l’intermittence d’autres énergies renouvelables. Pour tous ces atouts, la biomasse-énergie a indéniablement un rôle à jouer dans le cadre de la transition énergétique.
Cependant, une série de questions se posent quant au caractère durable de sa production, de son exploitation et de sa valorisation. Risque d’augmentation des émissions de gaz à effet de serre, déforestation, perte de biodiversité, volatilité des prix des denrées alimentaires… les nombreuses conséquences négatives d’un recours plus intense à la biomasse doivent inciter à la prudence[[Voir les nombreux articles que la Fédération a écrit sur le sujet, entre autres :

  • Principe de durabilité : notre consommation ne doit pas mettre en péril la possibilité, pour chaque être humain, d’un accès équitable aux ressources. Tout impact négatif sur le climat, la qualité de l’air, de l’eau, des sols et sur la biodiversité doit être évité. L’utilisation accrue de la biomasse énergie ne doit pas engendrer d’effets environnementaux et sociaux négatifs, directs et indirects, induits notamment par les changements d’affectation des sols (ILUC : Indirect land use change ). Le développement des filières biomasse-énergie doit bénéficier au développement économique local.
  • Principe de sobriété et d’efficacité : comme dans tous les secteurs, la réduction du gaspillage et le choix des voies de valorisation les plus efficientes, en fonction des finalités, doivent prévaloir.
  • Principe de hiérarchie des usages : il faut d’abord garantir le droit à l’alimentation pour tous. Utiliser ensuite la biomasse comme matière première. En troisième lieu, la biomasse peut être valorisée comme source d’énergie.

Pour garantir le respect de ces principes, la Fédération émet les recommandations suivantes :

  • La production et la mobilisation des ressources forestières doivent se faire dans le respect des écosystèmes forestiers et prendre en compte leurs fonctions marchandes et non marchandes. La valorisation énergétique doit s’appliquer en dernier recours et utiliser en priorité des produits non valorisés par ailleurs.
  • La production des ressources agricoles doit favoriser les pratiques agricoles et forestières durables qui offrent une plus-value environnementale par la production de biomasse-énergie. Le développement de cultures énergétiques ne peut s’envisager qu’après avoir écarté tous les risques potentiels pour le milieu et la biodiversité.
  • La valorisation de déchets et l’optimisation des flux doivent impérativement respecter l’échelle de Lansink[[Norme reconnue de gestion des déchets reposant sur la hiérarchie suivante : prévention, réutilisation, recyclage, valorisation énergétique, élimination]]. Toute dérogation à cette hiérarchisation doit être encadrée et justifiée par des analyses cycle de vie incontestables.
  • Le recours aux importations ne doit pas augmenter la pression sur la biomasse à l’échelle mondiale, mais diminuer celle-ci en respectant les limites imposées par la biocapacité de la planète.

La plupart des initiatives et mécanismes devraient idéalement être adoptés au niveau international pour viser cohérence, efficacité environnementale et respect des droits humains à l’échelle globale. Il importe que les différents niveaux de pouvoirs s’engagent pour :

  • Une certification de la biomasse plus crédible et plus large, basée sur des critères de durabilité stricts et complets, afin de couvrir les différents impacts à éviter ;
  • La mise en place d’une méthodologie précise et complète de comptabilisation des émissions de gaz à effet de serre.
  • L’instauration d’une limite supérieure à l’utilisation de la biomasse (tous secteurs confondus), basée sur une objectivation du potentiel de biomasse durable et sur la notion de biocapacité.

Par ailleurs, divers outils pourraient être mis en œuvre au niveau wallon, entre autres :

  • Un meilleur accès aux données pour permettre une évaluation actualisable du potentiel biomasse indigène.
  • Un comité transversal inter-administration chargé de remettre un avis sur les demandes de permis de sites et les demandes de certification d’intrants sur base de critères stricts tant au niveau de l’efficience que de la durabilité.
  • Une plateforme multisectorielle facilitant les synergies entre acteurs et les projets « win-win » cohérents sur le plan environnemental.
  • Un mécanisme de soutien différencié élargi à la production d’autres formes d’énergie que la seule électricité. Le niveau de soutien doit clairement orienter vers des voies de valorisation de la biomasse efficientes et durables, et favoriser les filières courtes et intégrées tout en permettant d’éviter les effets d’aubaines.

Télécharger la position biomasse-énergie dans son intégralité.

Gaëlle Warnant

Économie Circulaire