L’Energiewende ou pourquoi j’aimerais être Allemande

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Après la catastrophe de Fukushima, le gouvernement allemand a décidé de fermer immédiatement les 8 plus vieux réacteurs nucléaires et de sortir définitivement du nucléaire en 2022.
Beaucoup y ont vu une réaction émotionnelle et exagérée d’Angela Merkel à la catastrophe nippone.
S’il est vrai que cette décision a surpris, elle s’inscrit pourtant dans la continuité de la politique de sortie du nucléaire et de développement des renouvelables menée depuis 2000. Fukushima n’a fait qu’accélérer le rythme de sortie du nucléaire qui bénéficie depuis longtemps d’un large soutien au sein de la population allemande (65% des Allemands y étaient favorables avant Fukushima 71% après).
La décision prise en juin 2011 dépasse la seule question de l’atome. L’Allemagne a en fait amorcé dès 2010 un vaste programme de transition énergétique, appelé l’Energiewende[[Sources sur l’Energiwende :

 http://www.bmu.de/en/topics/climate-energy/transformation-of-the-energy-system/

 http://energytransition.de/, http://www.wwf.de/fileadmin/fm-wwf/Publikationen PDF/Myths_and_facts_about_Germany_s_energy_transition.pdf,

 http://boell.org/downloads/Morris_Myths_about_German_energy.pdf ]] , littéralement le virage énergétique. Il s’agit d’une feuille de route pour assurer un approvisionnement énergétique fiable, économiquement viable et respectueux de l’environnement à long terme. L’Allemagne s’est fixé une série d’objectifs jusqu’en 2050 portant sur la consommation d’énergie, les émissions de gaz à effet de serre et la production d’énergie renouvelable, accompagnés d’un processus de monitoring annuel, d’un plan de financement solide, ainsi que de près de 180 mesures individuelles.
Notons que le premier pilier de l’Energiewende est la réduction de la consommation d’énergie sous ses différentes formes (électricité, chaleur dans les bâtiments et transport) avec pour cible une baisse de moitié de la consommation d’énergie primaire en 2050.

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Source : http://energytransition.de/

Les motivations sont tant environnementales et éthiques qu’économiques. Les Allemands sont en effet convaincus que la protection du climat et la transition énergétique représentent une opportunité économique, et non une contrainte, les risques résidant plutôt dans la poursuite du scénario business as usual. Les bénéfices attendus sont l’amélioration de la balance commerciale et de la sécurité énergétique, l’innovation technologique, le développement industriel, la création d’emplois,…. L’Allemagne ambitionne de devenir l’une des économies les plus performantes, les plus innovantes et les plus vertes au monde et de devenir un leader mondial dans les marchés du futur que sont les énergies renouvelable et l’efficacité énergétique. Pour Norbert Röttgen, ministre fédéral de l’Environnement « We want to achieve economic success with climate protection »[« Nous voulons atteindre la réussite économique grâce à la protection du climat » (traduction de l’auteur). [Discours du 7/12/12 au Sommet de l’ONU sur le climat à Durban]]

Pour cela, l’Allemagne peut s’appuyer sur l’expérience des deux dernières décennies : en dix ans seulement, la part d’électricité renouvelable en Allemagne est passée de 6% à 25%, une évolution que personne n’anticipait il y a seulement quelques années. Le secteur des renouvelables compte déjà 380 000 emplois, essentiellement dans des petites et des moyennes entreprises, soit plus que la production d’énergie conventionnelle.

Bien sûr la politique de soutien aux renouvelables à un coût, essentiellement supporté par les petits consommateurs étant donné les exemptions généreuses accordées aux entreprises électro-intensives. Ce coût est néanmoins à relativiser : la surtaxe pour le soutien aux renouvelables représente 3,6 cents/kWh soit environ un tiers de l’augmentation du prix de l’électricité depuis 2000 (25 cent/kWh aujourd’hui). Sur le marché de gros en revanche, la production renouvelable a fait baissé le prix de l’électricité[On estime que l’énergie solaire seule a fait baisser de 10% le prix de l’électricité vendue sur la bourse en 2011]], une baisse qui bénéficie essentiellement aux grands consommateurs et aux producteurs dont les marges ont augmenté de manière significative ces dernières années… Il reste que les ménages allemands paient le prix le plus élevé en Europe pour leur électricité, ce qui ne semble pas nécessairement poser un problème. [61% des Allemands sont prêts à payer leur électricité plus chère pour soutenir les renouvelables. C’est sans doute le prix à payer pour se positionner comme un pionnier dans le secteur des renouvelables.

C’est un fait, la transition énergétique bénéficie d’un large consensus auprès des industriels, des syndicats, des autorités locales[Lire par exemple « [The small-town energy revolution »]] et des citoyens. 90% des Allemands sont d’avis que la transition énergétique est importante ou très importante[[Enquête menée en juin 2012 par BDEW, une organisation représentant les fournisseurs d’électricité et d’eau.]]  !

Tout cela laisse rêveur… Surtout quand on pense aux attaques répétées chez nous contre les énergies renouvelables ces dernières semaines et aux querelles sanglantes de l’Olivier wallon sur le cadre éolien ou les certificats verts.
Moi, ça me donne envie de devenir allemande…

Cécile de Schoutheete

Anciennement: Développement durable & Énergie