La Commission européenne vient enfin de publier sa proposition de définition des nanomatériaux. Attendue depuis un temps plus que certain, elle ne constitue pourtant qu’un premier petit pas d’une politique sérieuse d’encadrement de ces matériaux peu connus…
La proposition de définition de la Commission, publiée ce 18 octobre,comporte quelques surprises. Ainsi, si l’avis du comité scientifique sur les risques émergents et nouvellement identifiés (SCENHIR) recommandait de considérer comme “nano” les matériaux dans lesquels moins de 0,15% de leurs constituants sont de taille inférieure à 100 nm, la definition de la Commission propose un seuil de 1%. La différence est conséquente – et illustre l’efficacité du lobbying industriel!
Cette définition est néanmoins bienvenue, et constitue un progrès important dans ce dossier controversé. Cependant, elle n’enlève rien à l’urgente nécessité de réaliser une évaluation des risques complète des nanomatériaux avant mise sur le marché – évaluation rarement effectuée jusqu’à présent.
Les nanos ont en effet quittés les laboratoires : ils sont d’ores et déjà présents dans plus de 1000 produits utilisés quotidiennement, dans des domaines aussi variés que l’alimentation, les cosmétiques, les textiles, les transports, etc. Pourtant, les protocoles d’évaluation de la toxicité et de l’écotoxicité sont loin d’être adaptés aux comportements spécifiques des nanomatériaux, et donc, nombre de questions sur leurs impacts sanitaires et environnementaux demeurent sans réponse. La maxime du règlement REACH “Pas de données, pas de marché” n’est donc pas appliquée aux nanos. Lequel règlement peine à les prendre en considération au point qu’à ce jour, aucune disposition spécifique aux nanomatériaux ne figure dans le texte.
Ces risques environnementaux et sanitaires (tant pour les consommateurs que pour les travailleurs!) ne pèsent guère dans la balance quand on connait l’ampleur des enjeux économiques concernés par les applications potentielles des nanomatériaux. Et si nombre de leurs applications prometteuses concernent des secteurs comme ceux de la médecine ou même de l’environnement, leur concrétisation se laisse quelque peu attendre, nous laissant le soin de nous débrouiller avec ces substances inconnues au sein de produit de consommation courante. Bien souvent on se pose d’ailleurs la question de l’utilité réelle de cette presence. Principe de précaution, où te caches-tu donc ?
Par delà la définitions, Les discussions à venir auront à considérer d’autres éléments: les règles d’étiquetage des produits contenant des nanos, les mesures à prendre pour limiter leur rejet dans l’environnement aussi bien en phase de test que de fabrication, d’utilisation et de fin de vie ainsi que les mesures spécifiques à la gestion des déchets. Et à un autre niveau, tout aussi indispensables on retrouve par exemple la question du financement et de l’encadrement de la recherche, ainsi que l’implication des citoyens dans la définition des besoins sociétaux auxquels l’innovation technologique pourrait – et devrait – répondre. Si un tel exercice avait été réalisé les chaussettes au nano-argent se seraient-elles retrouvées sur le marché ?
Pour en savoir plus :
Consultez ici et ici les articles du site santé-environnement.be