La directive européenne sur le bruit environnemental – dites END pour Environmental noise directive – a été adoptée en 2002. En fin d’année passée, la Commission Européenne a lancé une consultation publique pour évaluer la perception des citoyens quant à ses effets sur le terrain… En Wallonie, on ne peut que constater – et regretter –le peu de résultats atteints…
La directive européenne 2002/49/CE relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement a pour objectif de prévenir et réduire l’exposition au bruit. Elle impose aux États-membres une évaluation de l’exposition au bruit de population par la réalisation de cartographies acoustiques. Les priorités sont les grands axes routiers et ferroviaires, les grands aéroports et les grandes agglomérations. Des plans d’actions devaient ensuite être établis de manière à protéger les zones calmes et réduire les bruits excessifs. Elle a été transposée en Région wallonne par l’arrêté du Gouvernement wallon du 13 mai 2004 relatif à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement. Le détail des obligations de la directive sont repris dans notre vademecum sur les sources et impacts sanitaires du bruit des transports.
La Commission Européenne vient donc de lancer une consultation publique pour évaluer cette directive, mais cette fois dans le cadre du processus de « Better regulation ». Car une première évaluation de la directive a été réalisée en 2012, en vue de sa révision. Nous formulions alors déjà de nombreux commentaires (voir notamment cet article) pour renforcer la directive et améliorer son effectivité sur le terrain. Nulle trace aujourd’hui dans l’enquête publique en cours d’une quelconque volonté de perfectionner la directive, le questionnaire se clôturant par la question « Que se passerait il si la directive était révoquée ? »…
Considérant l’évaluation stricte de l’implémentation de la directive bruit environnemental en Wallonie, nous avons déjà fait part de notre analyse par le passé, dont nous reprenons ici les principaux éléments :
considérant la question spécifique des agglomérations, nous avons constaté un contournement de certaines obligations par la Wallonie. Ainsi, le rapport analytique de l’environnement wallon 2006-2007, estimait que les villes de Liège et Charleroi entraient dans la classe d’agglomération soumise à évaluation pour 2007 au sens de la directive END. Le Gouvernement Wallon de l’époque a estimé, sur base d’une densité de population supérieure à 1000 habitants/km², qu’aucune agglomération wallonne ne compte plus de 250.000 habitants. Eurostat, organisme officiel des statistiques européennes, préconise quant à lui d’utiliser une densité de 500 habitants par km² pour délimiter les agglomérations urbaines car au plus le critère de densité est élevé, au moins il se trouvera d’agglomérations pour le satisfaire. Notons que les cartographies des villes de Liège et Charleroi ont été adoptées par le gouvernement wallon au mois de décembre 2015 ;
de manière globale, force est de constater aujourd’hui que la Wallonie est largement en retard pour répondre aux obligations de la directive : seule la première vague de cartographie a été réalisée[[Plan Infrastructure 2016 – partie 3 page 59]]. Les premiers plans d’action n’ont toujours pas été soumis à consultation du publique. Nous attendons la publication de la seconde vague de cartographie, et les plans d’actions subséquents devraient être publiés dans la foulée. Nous accusons donc, en Wallonie, un retard conséquent.
Les applications concrètes permettant de concrétiser les objectifs de la directive restent balbutiantes : les revêtements anti-bruit font l’objet de recherches (Persuade, dont le Centre belge de recherches routières est leader), mais le maintien de leur propriété acoustique sur le long terme doit être vérifié. Leur sur-coût a été pointé du doigt dans une question parlementaire – se pose alors la question de la prise en compte des impacts bénéfiques pour la santé et la qualité de vie des riverains lorsque de tels aménagements sont réalisés. Le Plan infrastructure de la Wallonie nous permet de savoir que « la Note stratégique concernant la lutte contre le bruit fait état d’un montant de 600.000.000 € qui serait nécessaire pour mettre en œuvre le plan d’actions visant à traiter les différents sites identifiés conformément à la Directive européenne en la matière »[[Plan Infrastructure 2016 – partie 3, page 24]]. Et quelques pages plus loin, on peut lire « […] une première liste de 50 sites d’actions prioritaires a été établie afin de rester dans l’enveloppe de 40 000 000 € dévolue à ce silo. Toutefois, cela ne reflète pas du tout l’ensemble des besoins dont le montant total s’élève à environ 600 000 000 €.
Par ailleurs, le marché relatif à l’étude sur le réseau 3-6 millions de véhicules/an est en cours d’exécution. Les résultats de cette étude sont attendus pour mars 2016[[Plan Infrastructure 2016 – partie 3 page 59]]. »
Pour résumer : la volonté politique européenne pour continuer de progresser sur ce dossier est en berne, la tendance serait plutôt à la suppression de l’outil… Alors que plusieurs régions se sont montrées très bonnes élèves dans sa mise en œuvre, comme la Région Bruxellois et la Région d’Île de France. En Wallonie, la publication des cartographies et des plans d’actions permettra de faire avancer le dossier – avancée qui restera difficile au vu de l’ampleur des besoins et du manque de moyens disponibles pour les concrétiser !