Le Plan Wallon des Déchets étant arrivé à échéance en 2010, la Région a lancé une série d’études en vue de mettre en place un nouveau Plan. Nouveau plan par ailleurs obligatoire du fait de la Directive 2008/98/CE (dite Directive cadre déchets), qui oblige les Etats membres à établir, en plus des plans de gestion des déchets (c’est-à-dire collecte, recyclage, élimination), des plans de prévention. Cette Directive met ainsi en avant le rôle clé de la prévention qui devient la première étape, obligatoire, avant d’envisager d’autres options (recyclage ou élimination). Autrement dit, ne peuvent être recyclés, valorisés énergétiquement ou éliminés que les déchets que l’on n’a pas réussi à ne pas produire…
Il y a encore du travail pour mettre en pratique cette hiérarchie. Ainsi, la première étude de la Région wallonne sur la prévention fait le bilan des années 1995 à 2008, années couvertes par la premier Plan Wallon des Déchets. La quantité d’ordures ménagères est restée stable sur cette période, mais cette stabilité masque des différences entre les flux. Ainsi, si la production de déchets tout-venant a bien diminué sur cette période, c’est au profit des collectes sélectives (PMC, papiers, verres etc). De plus, la production de déchets dits « fraction grossière » (correspondant aux déchets verts, encombrants, déchets inertes et déchets d’appareils électriques et électroniques) a explosé, révélant certainement une sous-estimation du gisement lors de la mise sur pied du Plan. Rappelons que les objectifs fixés prévoyaient de passer de 526 kg de déchets ménagers par habitant en 1995 à 445 kg en 2010, soit une diminution graduelle de 5,4 kg par an. En 2008 on était toujours à environ 525 kg par habitant. Pour résumer, les années 2000 nous ont permis de mieux trier nos déchets, de ne plus les accumuler dans la cave (meubles et équipement électriques) et de diminuer les dépôts sauvages, mais certainement pas de diminuer la quantité totale de déchets produite.
A la lumière de cette évaluation et sur base des ambitions de la Directive cadre déchets, on pourrait donc espérer une politique qui viserait enfin à réduire la production de déchets ménagers. En Région wallonne, les études préliminaires à l’élaboration du nouveau plan sont toujours en cours, mais les premiers résultats ne dégagent pas d’option ambitieuse. Ainsi, l’option « prévention poussée » permettrait de passer de 530 kg par habitant en 2008 à 496 kg par habitant en 2020, soit 2,8 kg par an en moyenne. Pourtant, des exemples montrent qu’il est possible d’être bien plus ambitieux : pourquoi, dans ces conditions, ne pas suivre le mouvement et travailler à changer les habitudes?
Ainsi la Flandre, depuis plusieurs années, a un objectif de prévention des déchets de 2% par an, soit environ 10 kg par habitant chaque année. Plus ambitieux encore, l’ACR+ (Association of cities and regions for recycling and sustainable resource management) mène depuis plusieurs années une campagne européenne de réduction des déchets avec l’objectif de réduire de 100 kg par habitant les quantités d’ordures ménagères produites. Pour atteindre ce potentiel, 4 flux ont été établis comme prioritaires: les déchets organiques, le papier, les emballages et le encombrants. Les mesures prioritaires? Compostage à domicile, prévention du gaspillage alimentaire, réduction des impressions papier, promotion des emballages réutilisables consignés, lutte contre le suremballage, réutilisation des encombrants… En tout, l’ACR+ estime que ces 100 kg de déchets évités correspondraient à une économie de plus de 160 kg de CO2 : la prévention des déchets, en évitant l’acte d’achat de produits non durables, permet en effet de fameuses économies en matières de ressources naturelles et aussi de lutter contre le changement climatique.
Nous avons donc tout à gagner à favoriser la prévention, la vraie, celle qui ne consiste pas seulement à trier ses déchets mais bien à revoir ses modes de consommation. Si la Wallonie cherche à garder l’étiquette de « bon élève » qu’on lui associe souvent en matière de déchets, il est temps de donner d’autres perspectives au futur Plan Wallon des Déchets et de l’enrichir notamment des pistes d’actions de l’ACR+. Pourquoi en effet réinventer l’eau chaude ?
Extrait de nIEWs 94, (du 9 au 23 juin),
la Lettre d’information de la Fédération.
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