La grande question qui freine l’avancée de la recherche en matière de pesticides est assez simple : c ‘est celle de l’exposition. Que signifie être exposé aux pesticides ? Se promener à portée de pulvérisateur est-ce considéré comme une exposition pertinente ? Si l’on est riverain d’une parcelle agricole, manger les légumes de son jardin ? Boire l’eau du robinet si elle est contaminée ? Pour les agriculteurs, quelle manipulation expose plus qu’une autre ? Pulvériser un champ ou nettoyer une cuve ? Ranger les stocks de produits phytopharmaceutiques ? Les gants, le masque, la combinaison sont-ils protecteurs ? Et puis, de quelles molécules parle-t-on ? Lesquelles sont plus volatiles ? Plus persistantes dans l’environnement ?
L’Union Européenne mise désormais sur la «Precision Farming », l’Agriculture de Précision. Rapidement repris par les industries, ce concept a comme objectif de maîtriser les intrants à la goutte près, sans dérive, garantissant une contamination dans l’environnement minime. La solution miracle. GPS connecté à une smart-watch, un smart-tracteur, des données satellites et une smart-station météo, l’agronome est paré. La machine pourra désormais calculer la juste dilution, l’heure de pulvérisation, la vitesse du tracteur, et adapter les traitements selon les parcelles et les conditions météo.
La technique, toujours plus de technique pour (tenter de) maitriser les dérives des pesticides.
Les retours de terrains sont nombreux et éloquents, comme exposé dans la web-série de Phyto-victimes. Déboucher une buse (souvent en soufflant dedans), plonger dans une cuve pour la nettoyer, enfiler puis nettoyer ses combinaisons de protection… Ces fameux équipements de protection n’ont d’ailleurs pas tout résolu : masque à gaz, tablier en plastique épais, gants rembourrés, il faut être motivé, résolu et peu sensible à la chaleur pour s’équiper pour travailler en plein été. En plus, des chercheurs ont montré que certains produits traversent malgré tout ces plastiques et s’accumulent dessous. C’est ce qu’a révélé également le journal Le Monde dans une série d’articles parus récemment.
Coté résidentiel, il suffit de discuter avec quelques familles en zone rurale pour s’en rendre compte : les gouttelettes et granulés qui cognent aux vitres, la terrasse recouverte de produits. Une famille résidant à proximité de surface agricole témoigne : leur fils de 9 ans faisait du trampoline au fond du jardin lorsque la rampe du pulvérisateur, en faisant demi-tour, a manqué d’assommer le petit…
On est en droit de se demander si la Precision Farming résoudra ce genre d’incidents du quotidien… Elle contribuera à améliorer l’efficacité des processus, la pertinence des traitements et à individualiser les solutions, mais les solutions pensées hors-sols ne suffiront pas à maitriser de façon raisonnable les risques liées aux usages des pesticides.
Une solution existe pourtant, sans usage de pesticides : l’agriculture biologique. Sans être parfaite, il s’agit aujourd’hui de la seule solution contraignante avec un cahier des charges clair.
Parlons aussi « données », l’or noir du 21ème siècle. Ces données qui s’accumulent dans les logiciels et applications de gestion de parcelles. Année après année, intégrant les conditions météo, les intrants, les rendements, avec un soupçon d’intelligence artificielle, toutes ces informations permettraient à la recherche de faire un immense pas en avant.
Pourtant aujourd’hui, les propriétaires des informations issues de ces applications connectées restent les industries qui les développent. Alors que la recherche publique a véritablement besoin de ces données pour caractériser l’exposition des agriculteurs, des riverains, et de la biodiversité alentours. Mais aussi pour identifier les pratiques les plus favorables à l’environnement et les plus efficientes.
Canopea souhaite
Chez Canopea, nous plébiscitons la numérisation des données agricoles, mais d’accès libres et au service des autorités, de la recherche et du grand public. A l’image de la Californie qui, depuis les années 1970, tient un registre en ligne actualisé chaque année, répertoriant les usages de pesticides à travers le territoire. La recherche en termes de santé publique et de biodiversité qui découle de ces données servent de référence dans le monde scientifique.
En tant que Fédération, nous soutenons :
- La numérisation du secteur agricole, au moyen de logiciels uniformisés, permettant la collecte de données pour le secteur public
- Une transition massive vers l’agriculture biologique, y compris la création de filières dédiées, seule alternative actuelle disposant d’un cahier des charges strict.
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