Texte paru dans la newsletter du réseau Occupons Le Terrain (OLT)
Un citoyen nous a alertés récemment concernant un projet agrivoltaïque à l’entrée de la ville d’Ath, capitale du Pays Vert, et précisément sur une des dernières prairies alluviales de la Vallée de la Dendre. Cette prairie permanente (jamais pulvérisée), située entre la nationale 56 et le canal de la Dendre, jouxte la Ferme de Tenre, ancienne abbaye qui fait partie du Patrimoine Monumental de Belgique. C’est à cet endroit que le propriétaire de la prairie (un baron), un intermédiaire monnayant l’accès à la profession d’agriculteur pour le compte du premier, le promoteur EtherEnergy et IDETA ont décidé de placer 22.000 panneaux photovoltaïques. Des moutons seront présents et permettent aux protagonistes d’appeler cela un projet AGRIVOLTAIQUE. L’activité agricole est bien entendu secondaire et ceci au bénéfice d’une extrême rentabilité économique.
Le 19 janvier, IDETA (dont le Président n’est autre que le Bourgmestre de la Ville d’Ath), pour qui ce projet est un projet pilote, est venu présenter le projet aux riverains. Plus d’une heure de réunion et beaucoup de questions sont restées sans réponse (taille réelle du projet, puissance, type de panneaux, durée du bail, planning du projet, etc.).
Lors de cette réunion les riverains ont averti des problèmes potentiels et notamment ceux liés à la topographie et à l’humidité de la prairie dont certaines zones sont fréquemment inondées.
Ce projet demandera l’arrachage de peupliers et de haies d’aubépine, détruisant des habitats précieux pour la faune locale. Pourquoi ne pas utiliser ces terrains pour renforcer l’émergence de projets agroécologiques nourriciers présentant des débouchés locaux ? Pourquoi ne pas d’abord utiliser les surfaces artificielles présentes à Ath pour l’implantation de ces panneaux ?
Les riverains sont au début de leur combat. Un comité citoyen est en cours de formation et des contacts sont établis avec des associations qui apporteront leur aide.
Bien que ce projet soit présenté par l’IDETA comme un « projet pilote », il ne s’agit pas d’un cas isolé. L’association Ramur a d’ailleurs remporté récemment une victoire partielle contre un projet similaire à Namur, mais malheureusement, de trop nombreux projets de ce type voient le jour un peu partout en l’absence ou en dépit des mobilisations locales.
Après les projets de zonings et de lotissements, il s’agit donc d’une nouvelle menace qui pèse sur les terres agricoles, y compris celles qui ne sont pas identifiées comme constructibles au Plan de Secteur. En effet, l’implantation de panneaux photovoltaïques est autorisée en zone agricole pour autant qu’une activité agricole soit maintenue sur la parcelle ; d’où un pâturage par quelques moutons, dont la productivité est évidemment tout à fait négligeable par rapport à l’aspect énergétique du projet.
Ces projets menacent la biodiversité en artificialisant des terres qui n’auraient pas pu l’être autrement. Il s’agit d’une stratégie bien huilée pour tirer un profit maximum de zones qui ne sont normalement pas dédiées à l’industrie. Déjà en 1912, le botaniste Jean Massart s’interrogeait face à l’artificialisation des sols et à la fragmentation du réseau écologique : « Pourquoi l’utilisation du territoire doit-elle aller jusqu’aux plus extrêmes limites ? » Il se retournerait probablement dans sa tombe s’il voyait ce qui se passe aujourd’hui…
De plus, la production photovoltaïque entre en compétition directe avec la production agricole nourricière. En effet, les agriculteurs et agricultrices sont déjà confrontés à des difficultés croissantes pour accéder à des terres, en raison de l’urbanisation croissante qui se fait principalement au détriment des terres agricoles et de leur accaparement par certaines grandes entreprises telles que Colruyt. Les projets énergétiques aggravent ce problème en poussant les prix des terres agricoles à la hausse. En effet, la production d’énergie est beaucoup plus rentable financièrement que la production agricole ; les acteurs énergétiques peuvent donc mettre sur la table des sommes bien supérieures à celles que sont capables de mettre des acteurs du monde agricole pour l’achat ou la location de terres, sans mettre à mal leur viabilité financière.
Bien sûr, la production d’énergie photovoltaïque est nécessaire à la transition écologique, mais elle devrait se faire sur les surfaces déjà artificialisées : bâtiments, parkings, zonings, etc. Le potentiel reste énorme alors que le réseau électrique est déjà saturé par endroits lors des pics de production ; il n’est donc pas nécessaire d’empiéter sur des terres agricoles pour cela !
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