Lettre ouverte à madame Wilmès, première Ministre.
Madame la Première Ministre,
(Cette lettre ouverte est parue dans l’édition en ligne du journal le Soir)
En décembre 2019, nos quatre fédérations environnementales belges (Inter-Environnement Wallonie, Bond Beter Leefmilieu, BRAL et Inter-Environnement Bruxelles) ont appris de Madame la Ministre Marghem que leur financement fédéral pour l’année écoulée ne serait pas octroyé, alors que l’ensemble des activités prévues avaient été réalisées.
Une année de travail intense au service des questions environnementales et climatiques, menée d’ailleurs en bonne collaboration avec la Ministre elle-même et le SPF Environnement, se voyait ainsi sanctionnée par la perte sèche du subside pourtant dûment budgété.
Ce n’est pas tout : la Ministre vient de décider unilatéralement de geler la procédure de reconnaissance des coupoles environnementales. Ce faisant, elle interrompt une procédure qu’elle a elle-même lancée et à laquelle nos organisations ont répondu dans les formes. La Ministre se met ainsi en défaut par rapport à l’arrêté royal qu’elle a elle-même fait approuver en 2019. Elle rend ainsi impossible la poursuite du financement fédéral des coupoles environnementales en 2020, et potentiellement pour toute la législature dans le cadre légal existant. Décision lourde de conséquences.
« Il n’a jamais été dans mes intentions ni dans celles du gouvernement de supprimer définitivement les subventions des fédérations environnementales dont nous reconnaissons le travail important », affirmait ce 30 juin à la Chambre la Ministre Marghem, interpellée sur cette situation.
Ses décisions vont pourtant exactement dans le sens inverse : dans les faits, elle est en train de mettre fin à la poursuite d’un travail associatif dont la qualité est largement reconnue, sur les questions cruciales de l’environnement et du climat. Des licenciements vont devoir être signifiés.
Madame la Première Ministre, votre Ministre se retranche paradoxalement derrière le fait que le Gouvernement serait en affaires courantes. Cet argument est irrecevable au vu des pouvoirs de plein exercice dont votre Gouvernement dispose, comme vous l’avez vous-même affirmé lors de votre discours de politique générale, le 17 mars 2020.
Les sommes en jeu sont d’ailleurs symboliques pour l’Etat belge : moins de 200.000 euros par an pour les quatre fédérations. Un montant modeste, et pourtant indispensable pour abattre un travail considérable, réalisé avec compétence par des chargés de mission motivés et à l’expertise reconnue.
Se pose dès lors la question de la volonté politique.
Il n’est peut-être pas inutile de rappeler que nos fédérations environnementales jouent, comme d’autres acteurs de la société civile, un rôle important pour le bon fonctionnement de notre démocratie. Au-delà de leur rôle de sensibilisation auprès du grand public, elles représentent auprès des pouvoirs publics une multitude d’acteurs non lucratifs engagés dans la protection de l’environnement et ce sont elles qui amènent le point de vue environnemental dans les organes de consultation officiels. Parfois contre-pouvoir, souvent force de proposition, les fédérations d’associations environnementales ont leur place comme interlocutrices du gouvernement au même titre que les fédérations patronales et syndicales, même si leur poids est bien plus modeste.
Le gouvernement souhaite-t-il supprimer de manière structurelle la totalité des financements fédéraux aux fédérations environnementales ? Doit-on aujourd’hui se résoudre à ce qu’une Ministre se retranche derrière des arguments procéduriers – fort peu valides – pour lâcher le secteur environnemental et le priver des moyens nécessaires pour qu’il puisse jouer son rôle ?
Nous ne pouvons y croire.
C’est pourquoi nous nous adressons à vous, Madame la Première Ministre, en dernier recours.
Vous avez fait preuve de hauteur de vue et démontré votre capacité à tenir les rênes en pleine crise ces derniers mois. Nous espérons que vous prendrez le temps de faire de même pour débloquer ce dossier. Si une volonté politique existe, une solution pourra être trouvée rapidement.
Cosignataires :
Sylvie Meekers, Directrice générale, Inter-Environnement Wallonie
Danny Jacobs, Directeur général, Bond Beter Leefmilieu
Chloé Deligne, Co-présidente, Inter-Environnement Bruxelles
Raf Pauly, Coordinateur, BRAL