L’association européenne Transport & Environment (T&E) vient de lancer « Airport Tracker », un outil en ligne illustrant les émissions de CO2 générées par le trafic aérien au départ de 1.300 aéroports (ce qui représente 99% du transport de passagers). Le projet a été réalisé conjointement par T&E, International Council on Clean Transportation (ICCT) et Overseas Development Institute (ODI). Présentation.
« Airport Tracker » permet d’attester et de localiser de façon assez claire la responsabilité du secteur en matière climatique et, plus spécifiquement, de couper l’herbe sous le pied de ceux qui vantent les mérites d’aéroport « verts » ou « durables » sur base de certaines initiatives, certes louables, mais très annexes par rapport au « core business » d’un aéroport : faire voler des avions.
Les émissions de CO2 calculées concernent les vols « passagers » au départ de ces aéroports en se basant sur l’année 2019. L’outil sera probablement adapté dans le futur pour permettre de visualiser les émissions de CO2 liées au transport aérien de marchandises. Si celui-ci émet moins que le transport de passagers (sauf pour certains aéroports en particulier – comme celui de Liège par exemple), il connaît une croissance accélérée liée à la crise sanitaire mais que l’OACI estime pérenne dans les prochaines décennies 1.
Comme expliqué dans le rapport qui accompagne l’Airport Tracker, et illustré dans le graphe ci-dessous, outre le transport de marchandise, l’outil ne tient pas compte des émissions de CO2 liées à d’autres aspects tels que par exemple, le chauffage des locaux, le transport de passagers pour accéder aux aéroports concernés, etc. Celles-ci seront peut-être rajoutées à l’outil dans un deuxième temps.
A titre d’exemple, voici ce que produit l’Airport Tracker actuellement pour les aéroports en Belgique (ici, Zaventem) :
Injustice climatique
Sur le plan global, l’outil permet de pointer sur une carte du monde les aéroports les plus impactants en termes d’émissions via le transport de passagers. Sans surprise, l’hémisphère Nord et, plus précisément, l’Europe, l’Amérique du Nord et l’Asie du Sud-Est remportent la palme, ce qui souligne encore une fois l’injustice en matière d’accès à cette forme de mobilité et le fait qu’en la matière, ce sont ces régions qui portent la plus lourde responsabilité.
L’outil illustre également les disparités entre les aéroports : comme souligné dans les conclusions du rapport qui l’accompagne, 20 aéroports (c’est-à-dire 1,5 % du total) génèrent 27% des émissions et près de deux tiers d’entre-elles émanent de seulement 100 aéroports (7,7% du total), également localisés dans les régions susmentionnées.
Des disparités importantes se manifestent également au sein des continents : 42% des émissions liées au transport de passagers émanent de 10 des 346 aéroports européens analysés (ce qui correspond à 0,3%). Et près de la moitié de ces gros émetteurs (4 sur 10) se situent dans deux pays : l’Angleterre et l’Allemagne.
Traiter un tiers de l’impact climatique du secteur via un shift modal
L’outil permet en outre de visualiser l’intensité d’émissions pour les aéroports et différents types de vols au départ de ces aéroports, par kilomètre/passager (quantité de CO2 produite, en grammes, par passager et kilomètre parcouru), ce qui met en lumière les aéroports les plus impactants à cet égard (dont une bonne proportion sont localisés aux Etats-Unis), et d’identifier la part des émissions qui pourraient être réduites via un shift modal (transfert du transport aérien vers un transport ferroviaire), sachant qu’un tiers de l’impact climatique du secteur au niveau global est lié à des vols de courte distance (moins de 1.500 km). En conclusion, même s’il n’est pas encore tout à fait complet, l’Airport Tracker et la documentation qui le sous-tend permettent d’objectiver l’impact du transport aérien sur les changements climatiques et de pointer l’injustice climatique entre différents pays et régions du monde. Ils procurent des informations utiles dans le cadre des discussions à propos de projets d’extension d’aéroports ou de construction de nouvelles infrastructures aéroportuaires, ainsi que des données précieuses par rapport au potentiel de shift modal (de l’avion vers le train), globalement, par région/pays et par aéroport.
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