La Conférence de Rio de 1992 reconnaissait déjà que les indicateurs courants, comme le PIB, ne permettait pas d’évaluer la durabilité des sociétés et qu’il était nécessaire de développer de nouveaux indicateurs fiables et pertinents pour guider la transition vers un développement durable[P-M Boulanger, [Les indicateurs de développement durable : un défi scientifique, un enjeu démocratique, Iddri, 2004, p.5.]].
Une variété d’indicateurs de développement durable
Suite à la Conférence de Rio, de nombreux pays et régions ont commencé à développer des systèmes d’indicateurs à la fin des années ’90, avec des approches variées.[Voir par exemple l’analyse des expériences étrangères en matière d’indicateurs de développement durable dans [Indicateurs de développement durable. Approche méthodologique et proposition d’indicateurs dans le cadre de la 1ère Stratégie wallonne de développement durable, 2014]] L’approche la plus fréquemment utilisée est la réalisation de tableaux de bord qui sélectionnent un ensemble d’indicateurs. Ceux-ci sont structurés de différentes manières : piliers du développement durable (économie, social et environnement), thématiques (santé, éducation, logement,…), dimensions du développement durable (qualité de vie des générations actuelles, équité inter-générationnelle, équité intra-générationnelle), etc.
Ces tableaux de bord sont parfois liés à une stratégie de développement durable et mesurent alors plus spécifiquement les progrès réalisés dans les domaines visés par la stratégie.
A côté des tableaux de bord de toute sorte, il existe également des indices synthétiques. Un indice synthétique agrège un ensemble d’indicateurs individuels (souvent avec une pondération). Parmi les plus connus en matière de développement durable, il y a l’indice de Développement Humain proposé par le PNUD et l’empreinte écologique. Si les tableaux de bord se multiplient, les indices synthétiques ne font pas l’unanimité parmi les statisticiens. La question de la pondération, qui revient à donner un poids à chaque indicateurs individuels soulève beaucoup de questions… et de réticences. Dans un indice de développement durable structuré selon une approche par pilier, cela reviendrait à donner, par exemple, plus de poids au pilier économique qu’au pilier environnemental. Pourtant, comme le note Paul-Marie Boulanger[[P-M Boulanger, op.cit., p. 13]] « dans toutes décisions, qu’elles soient individuelles ou collectives, on procède sans cesse à des arbitrages – le plus souvent inconscients et implicites – entre aujourd’hui et demain, eux et nous, la croissance économique ou la protection de l’environnement, l’emploi ou la qualité de vie, etc. […] Et c’est précisément parce qu’elle nous force à mettre à l’agenda politique l’évaluation des arbitrages et des pondérations, dont est faite la vie sociale, que la construction d’indices synthétiques de développement durable est nécessaire ».
Les indicateurs de développement durable en Wallonie
En Wallonie, il existe plusieurs démarches en matière d’indicateurs de développement durable.
Le chapitre « diagnostique des acquis et des défis » de la deuxième Stratégie wallonne de développement durable comprend une trentaine d’indicateurs structurés selon les 4 dimensions : satisfaction des besoins aujourd’hui en Wallonie, ailleurs, à l’avenir et modes de production et de consommation.
L’évolution des indicateurs a été évaluée en fonction de leur taux de croissance annuel moyen : supérieur à 1%, entre 0 et 1%, en recul. Notons que l’utilisation d’un même seuil de classification pour tous les indicateurs est une démarche approximative. Par exemple, un taux de croissance annuel moyen de 1% des énergies renouvelables serait tout à fait insuffisant pour atteindre l’objectif européen mais serait pourtant signalé comme satisfaisant dans la Stratégie. Par ailleurs, un taux de croissance ne nous permet pas de savoir si on est proche ou non de l’objectif. Dans ce tableau de bord, 11 indicateurs sur 34 sont dans le rouge. C’est l’axe « à l’avenir » qui compte proportionnellement le plus d’indicateurs dans le rouge avec 5 indicateurs sur 11 en recul.
Un deuxième exercice en cours en Wallonie sont les indicateurs complémentaires au PIB développés par l’IWEPS. Un ensemble de 7 indices synthétiques dont les évolutions indiqueront la progression de la Wallonie vers le bien-être de tous dans un cadre de développement durable :
l’indice de situation sociale,
l’indice de bien-être,
l’empreinte écologique et la biocapacité,
l’indice de gouvernance en Wallonie,
l’indice de situation environnementale,
l’indice de situation économique,
l’indicateur des pressions sociales et économiques sur l’environnement.
Les trois derniers indices sont en cours de construction.
Deux bonnes pratiques sont à mettre en avant dans le cadre de cet exercice :
la mise sur pied d’un comité consultatif des utilisateurs de ces indicateurs qui se réunit à peu près une fois par an pour informer et recueillir l’avis de différents acteurs qui utilisent ces indicateurs, dont IEW.
la réalisation d’un site internet dédié très didactique et bien présenté qui explique la méthodologie de construction de ces indices et permet d’en explorer les différentes dimensions et indicateurs qui les composent.
Enfin, le Rapport wallon sur la mise en œuvre des objectifs de développement durable de l’ONU (ODD), adopté en avril 2017, contient 70 indicateurs pour évaluer où se situe la Wallonie dans son chemin pour atteindre les ODD à l’horizon 2030.