A l’instar des moyens de nous déplacer, de nous nourrir ou de nous chauffer, les choix que nous portons en matière d’habitat et d’aménagement du territoire ont indéniablement un impact environnemental.
La localisation, la conception, ou encore l’objet même de ce qui sort de terre aujourd’hui sont non seulement des conséquences de choix sociaux et politiques en œuvre depuis de nombreuses années, mais participent aussi, lorsqu’ils sont peu ou pas appréhendés, à une dégradation de notre cadre de vie.
Les derniers conservateurs climato-sceptiques mis à part, la population semble avoir compris et admis la nécessité d’agir en faveur du climat. Et même si on peut regretter que ces messages soient principalement destinés au monde politique, et non pas à l’ensemble des citoyens (et donc à eux-mêmes), on peut déjà se réjouir que les liens entre climat, environnement et santé soient maintenant évidents.
En d’autres mots, nous sommes de plus en plus conscients de l’impact de nos modes de vie sur notre planète et sur la qualité de l’air qu’on y respire. Or, dans « modes de vie », on entend notamment, les moyens de nous chauffer, de nous éclairer, de nous déplacer, de nous nourrir….mais aussi de nous loger !
Et c’est souvent là que le bât blesse. L’impact environnemental de notre manière d’habiter et d’aménager notre territoire est loin, très loin, d’être une évidence pour tout le monde.
Pour ne prendre qu’un exemple, il paraît pourtant évident que d’un point de vue énergétique, de mobilité, ou encore de coûts pour la collectivité, la villa 4 façades loin de tout et de tous, ne peut être qu’un mauvais élève.
En y ajoutant la problématique de l’artificialisation des sols à laquelle ce type de construction participe activement[1], il est impératif de sensibiliser les citoyens sur leur impact environnemental lorsqu’ils posent de tels choix en matière de logement.
La célèbre mesure du Stop Beton contenue dans le projet de SDT[2] (Schéma de Développement du Territoire) devrait permettre, à terme, de voir se développer une nouvelle manière d’habiter : moins consommatrice de ressources (matériaux de construction, énergie, sol) et mieux localisée (proche des services, des transports en commun, des commerces).
À en juger par les choix des jurys de la dernière édition du concours d’architecture les Belgian Building Awards à l’occasion du salon Batibouw 2019, le secteur de la construction aurait d’ores et déjà anticipé ces évolutions. Les lauréats sont aussi bien des projets d’économie circulaire, d’agriculture urbaine, de rénovation et ré-emploi, que d’habitats communautaires.
De quoi se réjouir donc, même si au milieu des géants de l’immobilier, de plus petites entreprises, plus familiales, ont fait de l’auto-construction de villas 4 façades leur core-business. Ces dernières ont quelques années pour se réorienter vers de nouveaux modèles d’habitat.
Comme l’a déjà rappelé la Fédération à plusieurs occasions, la question de la formation aux métiers spécifiquement liés à la rénovation ou encore à l’utilisation de matériaux de construction issus de l’économie circulaire prend ici tout son sens.
Autre raison d’être optimiste : les projets lauréats de ce concours ne sont pas des projets sur plan mais bien des projets réels, sortis de terre et déjà occupés. Cela veut dire qu’au-delà de l’offre, il y a aussi une demande pour ce nouveau modèle de vivre, d’habiter ou de travailler.
Cependant notre enthousiasme n’est que de courte durée en constatant que la demande pour l’habitat individuel entouré de son lopin de terre reste soutenue chez nous. Face à cette résistance au changement, tout porte à croire que c’est aussi et surtout vers les jeunes générations que nous devons porter nos efforts de sensibilisation, d’éducation et de formation.
Changer les codes, les valeurs, les représentations. Du contenu des cours de géographie en secondaire à la formation des élus locaux en passant par une révision des outils fiscaux à disposition de la Région et des communes, les pistes d’action ne manquent pas.
Reste à voir si la volonté et le courage politique seront à la hauteur du changement de paradigme nécessaire en matière d’habitat.
Commentaire photo : Lauréat de la catégorie « New Way of Living » des Belgian Building Awards 2019 : Cohousing De Schilders, dans la commune de Gand du bureau d’architecture Havana. Huit logements s’emboîtent « verticalement » au-dessus d’espaces d’échanges au rez-de-chaussée pouvant également être privatisés pour certaines occasions. Pensé à partir d’une typologie classique à appartements, le projet parvient à maximiser la compacité et la densité tout en assurant un confort de vie acceptable. Crédit photo : site internet des Belgian Building Awards : https://www.belgianbuildingawards.be/fr/bba-awards/12/view/91
[1] « En 2018, les terrains artificialisés couvraient entre 1 790 et 2 672 km2, soit 11 à 16 % du territoire. Entre 1985 et 2018, les terrains artificialisés (sans les espaces non cadastrés) ont connu une croissance d’environ 530 km2, ce qui correspond à une artificialisation moyenne de 16,0 km2/an. Cette artificialisation s’est faite principalement au détriment des terres agricoles, avec, d’après des chiffres issus du cadastre, une perte de superficie de 578 km2 entre 1985 et 2018 (soit -6,2 % en 33 ans). » Extrait du site de l’IWEPWS sur l’artificialisation des sols en Wallonie. Source : https://www.iweps.be/indicateur-statistique/artificialisation-du-sol/
[2] Vous trouverez par ici l’avis d’IEW sur le SDT : https://www.canopea.be/avis-d-iew-sur-le-schema-de-developpement-du-territoire/