Les particules ULTRAfines

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Les normes européennes ou les rapports de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur la qualité de l’air ne les mentionnent pas. Pourtant, les particules ultrafines (PUFs), de par leur très – très très – petite taille, ont des effets encore plus nocifs sur la santé que les particules dites fines. De fait, si celles-ci (PM10 et PM2.5) sont l’objet de nombreuses études et si elle sont réglementées dans l’Union Européenne, les particules ultrafines sont, elles, absentes de la législation.

Qu’est-ce qu’une particule (ultra)fine ?

Les particules fines – abréviées PM pour “Particulate Matter”, en anglais – sont de très petites molécules, solides ou liquides, qui circulent dans l’air que nous respirons. Elles sont classées en plusieurs catégories selon leur diamètre ; des « grosses » particules (ou PM 10) aux nanoparticules, en passant par les particules fines (ou PM 2.5) et les particules ultrafines (ou PM 0.1).

Plus les particules sont petites, plus leur masse est faible et plus leur durée de vie dans l’atmosphère est longue. Les particules ultrafines, au diamètre 500 à 700 fois plus petit que celui d’un cheveu, possèdent donc un temps de résidence et une capacité de dispersion dans l’atmosphère accrue par rapport aux particules de plus grande taille. Leur transport dans l’atmosphère est affecté par leur taille, mais aussi par les conditions environnementales telles que le vent, les variations de température, l’humidité, les précipitations, … 1 Le nombre de PM 0.1 présentes dans l’air diminue rapidement car celles-ci s’amalgament en particules plus grosses ou se dispersent très rapidement.

Le rapport surface/masse des particules ultrafines est plus élevé que celui des particules de taille plus importante. Ce qui permet aux PUFs de retenir davantage les polluants toxiques comme les gaz ou d’autres éléments potentiellement nocifs. Parmi ces composés nocifs, on retrouve différents composés chimiques et minéraux tels que des sulfates, des nitrates, des métaux lourds, du carbone élémentaire (Black Carbon) et organique.

La très petite taille des PUFs et leur poids infime fait qu’elles sont dominantes en nombre mais qu’elles contribuent peu à la masse. Jusqu’à présent, la législation européenne (voir plus bas) se base sur la masse des particules pour en déterminer les limites. Les PUFs sont donc aux abonnés absents dans les normes et directives européennes.

Ces différentes caractéristiques confèrent aux particules ultrafines un caractère encore plus pernicieux que celui de leurs grandes sœurs. Alors que les PM 2.5 et 10 s’arrêtent aux poumons – provoquant déjà bronchite, asthme, réactions inflammatoires, affections cardio-vasculaires, cancers, etc. – la très petite taille des PUFs leur permet de s’immiscer jusque dans le système sanguin et ainsi, d’atteindre les différents organes. Elles représentent donc une menace importante pour la santé humaine, surtout dans les grandes villes où les seuils de pollution sont souvent dépassés.

D’où viennent-elles ?

Les particules fines peuvent résulter de processus naturels tels que les feux de forêt, les éruptions volcaniques, les aérosols marins, l’érosion des sols, etc. Ou des processus de combustion liés à l’activité humaine : gaz, charbon, hydrocarbures, biomasse, etc. Combustibles utilisés dans l’industrie (centrales électriques, incinérateurs, etc.), le transport routier, maritime et aérien, et le chauffage domestique. Pour ce type de particules, nous parlerons de particules primaires.

Quant aux particules secondaires, elles sont le fruit de réactions chimiques entre plusieurs gaz comme les composés organiques volatils (COVs), l’ammoniac (NH3), l’acide nitrique (HNO3) et les dérivés soufrés liés aux émissions de dioxyde de soufre (SO2) dans des conditions météorologiques spécifiques 2. C’est dans cette catégorie que nous retrouvons les particules ultrafines.

En ville : le trafic automobile, premier responsable de la mauvaise qualité de l’air

Le transport routier est à l’origine de l’émission de nombreux polluants atmosphériques. Les gaz d’échappement résultant de la combustion de carburant (essence et diesel) vont produire du mono- et di- oxyde de carbone (CO et CO2), des oxydes d’azote (NOx), des particules fines et ultrafines, etc. Il engendre également des particules issues de l’usure des pneus et des plaquettes de frein, ainsi que de la chaussée (« Non-exhaust particles » ou particules dites « hors échappement ») 3. À celles-ci s’ajoutent les particules remise en suspension, c’est-à-dire les dépôts de particules sur les routes qui reprennent leur envol après le passage d’un véhicule.

En milieu urbain, où la circulation automobile est dense, la présence de particules fines et ultrafines est élevée. Le pic de concentration en particules fines émises par le trafic routier est situé le long des rues à fort trafic. On y retrouve des taux de particules plus de dix fois plus élevés que si l’on s’éloigne de la chaussée. Il faut s’éloigner d’environ 500 mètres pour revenir à des valeurs de fond.

Le type de particules rejetées dépend du carburant, des lubrifiants utilisés, des conditions thermodynamiques, de la technologie d’allumage, etc. Le poids du véhicule est aussi un facteur à prendre en considération: plus un véhicule est lourd, plus ses émissions en particules seront élevées 4. Les améliorations apportées à la technologie des moteurs et des carburants, ainsi que l’utilisation de convertisseurs catalytiques, ont réduit la masse des particules. Cependant, le nombre et la toxicité des PUFs ont augmenté 5.

Les comportements de conduite influent également sur les émissions de polluants : les trajets courts avec un moteur froid et les accélérations sont responsables de la majorité de la pollution urbaine.

Que propose la Commission européenne ?

Pour encadrer la problématique de la pollution de l’air générée par les véhicules à moteur thermique, l’Union européenne a mis en place différents outils législatifs, valables pour tous les États membres, réglementant la qualité de l’air et les émissions de polluants atmosphériques. Même si les particules ultrafines n’y sont pas mentionnées, faisons un rapide topo de leur contenu.

Premièrement, les normes Euro introduisent des exigences strictes sur les émissions de polluants atmosphériques des véhicules. Auparavant, les véhicules mis en vente sur le marché n’avaient qu’un test en laboratoire à passer pour mesurer les émissions. L’écart entre les mesures en laboratoire et la réalité était alors conséquent. Mais depuis septembre 2017, la Commission européenne a ajouté à ces mesures en laboratoire des essais d’émissions en conditions de conduite réelles (Real Driving Emissions ou RDE). Ces mesures sur route permettent de vérifier les émissions d’oxydes d’azote (NOx) et le nombre de particules émises à l’aide de systèmes portables de mesure des émissions (PEMS)6.

Deuxièmement, la Directive Qualité de l’air (Directive 2008/50/CE) détermine des valeurs limites de concentration (VLC) à court terme (journalier) ou à long terme (annuel) pour toute une liste de polluants de l’air. Parmi ces polluants, on retrouve les PM10 et les PM2.5. Toutefois, les limites de ces deux catégories de particules sont régulièrement dépassées par la majorité des Etats membres. Aussi, la Commission européenne n’a aucune exigence sur le nombre de points de mesure. Les mesures officielles font donc état de moyennes et non de la diversité des conditions locales. En outre, les limites fixées par la Directive européenne sont différentes de celles établies par l’OMS ; les seuils de cette dernière étant beaucoup plus stricts que ceux de l’Union européenne.

Mesurer les particules ultrafines

Pour pallier à ce manque de prise en compte des PUFs, Inter-environnement Wallonie développe un projet de science citoyenne. Des capteurs de PUFs seront utilisés afin de mesurer ces minuscules molécules dans la ville de Liège. Les données enregistrées permettront d’avoir une connaissance plus fine ( J) des taux de PUFs à l’échelle locale.

Nous vous tiendrons bien entendu au courant des résultats de ce travail en cours !


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  1. Moreno-Ríos, A. L., Tejeda-Benítez, L. P., & Bustillo-Lecompte, C. F. (2021). Sources, characteristics, toxicity, and control of ultrafine particles : An overview. Geoscience Frontiers.
  2. Fiche méthodologique sur les émissions de particules fines primaires è https://environnement.brussels/sites/default/files/user_files/see1112_fm_emipm10.pdf
  3. Renaud MARTIN. (2021, avril). Émissions routières des polluants atmosphériques. CEREMA. è https://m-url.eu/r-3uvx
  4. Sydbom, A., Blomberg, A., Parnia, S., Stenfors, N., Sandström, T., & Dahlén, S. E. (2001). Health effects of diesel exhaust emissions. European Respiratory Journal, 17(4), 733‑746.
  5. Schraufnagel, D. E. (2020). The health effects of ultrafine particles. Experimental & Molecular Medicine, 52(3), 311‑317.
  6. Fiche informative de la Commission européenne sur les émissions des voitures è https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/fr/MEMO_18_3646