157, 216 ou 95 grammes ? Non, il ne s’agit pas de la quantité de farine nécessaire à l’élaboration de votre prochain gâteau dominical mais bien des émissions de CO2 émises – officiellement du moins – par votre voiture – si vous en possédez une – et ce, pour chaque kilomètre parcouru.
Depuis le scandale Volkswagen, les différences importantes entre les résultats obtenus en cycle de test et ceux émis sur route sont désormais connues et reconnues. Le VW Gate doit déboucher sur une réforme en profondeur des cycles de test (tant du CO2 que des polluants affectant la santé humaine), mais là n’est pas notre propos du jour.
Comment notre mobilité actuelle impacte-t-elle le climat ? Quels liens existent entre les émissions du secteur transport et les changements climatiques profonds qui sont déjà à l’œuvre ?
Un quart des émissions de CO2 attribuable au secteur transport
En Belgique, en 1990, le secteur des transports était responsable, hors émissions associées aux transports maritimes et aériens internationaux (communément appelées « soutes » ou « bunker fuels »), de 20,1 MtCO2, soit 17,2% des émissions totales du pays (hors bunker fuels). En 2011, les émissions grimpaient à 26,8 MtCO2, soit 26,0% des émissions totales de CO2 produites en Belgique !
Deux remarques découlent de ces observations. Premièrement, celles-ci sont globalement valables tant au niveau belge, européen que wallon. Comme l’indique l’Agence européenne de l’environnement, l’ensemble du secteur transport représente environ 24% des émissions totales de CO2 à l’échelle de l’Union (en ce compris, cette fois, le transport international par avion[[Notons cependant que le secteur aérien participe aux changements climatiques également par d’autres biais que le CO2 : http://www.iewonline.be/spip.php?article4094]] ou bateau). La route y tient une place largement prépondérante, comme l’exprime la figure 1.
Figure 1 : Part des émissions de CO2 du secteur transport à l’échelle européenne. Source : Agence européenne de l’environnement (EEA).
Une augmentation des émissions de plus de 33% depuis 1990
La responsabilité du secteur transport dans les émissions de GES est donc importante… Mais, deuxième observation, elle est aussi en forte augmentation ! Alors que d’autres secteurs ont amélioré leurs performances environnementalesL[[es émissions globales de la Belgique ont d’ailleurs, hors bunker fuels, diminué de 12,0% sur la même période.]] – notamment suite à la définition de normes plus strictes – le secteur transport a vu ses émissions… augmenter de 33,2% entre 1990 et 2010 !
Notons aussi que ces fameux « bunker fuels » (transport international maritime et aérien) sont particulièrement importants en Belgique : 4,3 MtCO2 pour l’aérien et 25,3 MtCO2 pour le maritime en 2011, en augmentation de 37,4% et 90,0% respectivement par rapport à 1990. A garder en tête au moment de prendre un billet d’avion – non taxé, pas plus que le kérosène d’ailleurs – ou de se fournir en denrées alimentaires issues de lointaines contrées…
Figure 2 : Evolution des émissions de CO2 en Wallonie par secteur d’activités. Sources : SPW – AWAC.
Comment expliquer cet emballement ?
Cette augmentation importante a de quoi étonner. En effet, pas un jour ne passe sans qu’une publicité ne vante les améliorations technologiques des nouvelles motorisations, capables, pour les plus performantes, de passer désormais sous la barre de 88 g de CO2 par km. Comment dès lors expliquer cet emballement ?
Grosso modo, deux explications sont possibles : soit le nombre de voitures en circulation – le fameux « parc automobile » – continue à augmenter, soit c’est le nombre de kilomètres parcourus qui suit la courbe ascendante et vient saper les efforts technologiques sur les véhicules pris isolément.
Si les émissions de chaque véhicule neuf sont globalement meilleures que celles de ses ancêtres, le parc automobile continue de s’accroître d’année en année (fig. 3). Car l’idée selon laquelle la bonne santé de l’économie se mesure aux nombre de véhicules vendus chaque année au Salon de l’Auto semble être bien installée dans les imaginaires de nos responsables politiques.
En parallèle, le nombre de kilomètres parcourus a tendance, et c’est une bonne chose, à stagner depuis quelques années. Et l’effet du prix du carburant est certainement la variable qui influence le plus cet élément. Est-ce seulement conjoncturel ? Pas si sûr, en tout cas, pas partout. Des études françaises réalisées par le CERTU par exemple montrent, pour la première fois depuis l’avènement de l’automobile dans les années 1950, une stagnation du nombre de kilomètres parcourus, du moins dans les villes « moyennes ». Une tendance de fond ? L’avenir nous le dira.
En tout cas, les efforts faits sur la technologie ne suffisent pas : il faut viser à réduire le parc automobile et à favoriser l’usage – raisonné et partagé, autant que possible – plutôt que la possession d’une voiture.
Figure 3 : Parc de voitures et kilométrage total des voitures belges (en milliards de km). Source : http://iew.be/spip.php?article4768
Une mobilité non soutenable
Notre mobilité est-elle dès lors soutenable ? La réponse est non, bien entendu. La figure 4 à elle seule devrait vous en convaincre.
Figure 4 : Evolution des émissions de CO2 du transport en Belgique entre 1990-2010 et réduction nécessaire. Calculs : IEW.