Ecolo et Groen! viennent de rendre publiques « 10 propositions pour réussir la transition écologique de notre économie et soutenir l’emploi ». Mise en question de notre système économique ou coup de pinceau vert ? Ni l’un, ni l’autre, mais un peu court affirme Christian Arnsperger qui vient récemment de proposer une note sur le même thème. Eléments du débat.
Alors que certains, à l’instar de la Vice-Première et Ministre des Affaires Sociales Laurette Onkelinx, plaident pour un grand pacte social, les Verts, eux, appellent à l’intégration de la dimension environnementale dans notre économie. Pour eux, un plan de relance ne peut en aucun cas faire fi de l’environnement et du bien-être. Voilà pourquoi ils prônent la transition écologique de notre économie.
La transition écologique en 10 propositions
Au menu de ce chantier qui ambitionne de «transformer notre économie en une économie plus verte et plus durable, moins lourde en CO2 et soutenant effectivement le maintien et le développement d’emplois de proximité de qualité», 10 propositions :
- construire avec les partenaires sociaux une stratégie pour réussir la transition écologique de l’économie belge ;
- mettre en place des indicateurs alternatifs au PIB ;
- développer des indicateurs et des stratégies afin de diminuer l’empreinte écologique des entreprises ;
- renforcer et réorienter les politiques de formation des travailleurs ;
- favoriser et soutenir les groupements d’entreprise ;
- soutenir la recherche et développement verte ;
- orienter les aides publiques en faveur des entreprises qui maintiennent ou créent de l’emploi et qui prennent en compte l’environnement ;
- soutenir la demande de biens écologiques, respectueux de l’environnement et des droits sociaux via les marchés publics ;
- isoler les bâtiments publics ;
- favoriser l’émergence d’initiatives d’économie sociale et solidaire.
Ainsi, les Verts entendent «saisir l’opportunité de la crise pour orienter notre économie vers davantage de durabilité et lui permettre de réussir la désormais incontournable transition écologique».
Un bon pas en avant mais…
A y regarder de plus près, les propositions avancées par Ecolo-Groen! (du moins les 8 premières) s’apparentent davantage à des mesures pro-capitalistes qu’à des véritables mesures de transition économique. C’est en tout cas l’analyse qu’en fait le chercheur Christian Arnsperger dans «Transition écologique et transition économique : Quels fondements pour la pensée ? Quelles tâches pour l’action ?».
Certes, le capitalisme dit «vert» est un moindre mal et devra être encouragé à court terme «mais jamais de telle sorte que les enjeux de la transition post-capitaliste soient étouffés» argumente Arnsperger. Il propose pour sa part la mise en place d’une «dynamique de transition à double détente» qui viserait, d’une part, à «gérer la transition du capitalisme gris vers un capitalisme vert» et, d’autre part, «à utiliser les moyens dégagés pour gérer la transition du capitalisme vert vers un post-capitalisme vert». C’est ainsi qu’Arnsperger appelle à «instrumentaliser maximalement le capitalisme vert pour le dépasser».
Ceci étant, cette «double détente» ne pourra se faire sans préalablement mettre en place un Ministère de la transition économique. Et de le doter de prérogatives à tout le moins comparables à celles du Ministère de l’économie et des finances.
Ainsi, la mise en place d’un Ministère de la transition économique est, pour Arnsperger, une condition sine qua non au passage à une société post-capitaliste. Ne fût-ce que pour accompagner, financer et encourager les initiatives citoyennes post-capitalistes (pensons notamment aux écovillages, groupes d’achats communs ou solidaires, quartiers alternatifs, etc.).
Un premier pas serait déjà de soutenir et de rendre viable des initiatives telles les villes et communautés en transition.
Quelques pistes pour amorcer l’après-capitalisme vert
Ancrés dans le court terme et reposant sur leurs électeurs, nul doute que nos hommes politiques devront s’armer de courage pour porter au-devant de la scène la transition économique, le passage à une société post-capitaliste.
C’est pourquoi Arnsperger propose, à court terme, de« focaliser le soutien public sur des expérimentations pour ainsi dire « illustratives » de ce qui pourra se généraliser plus tard». Et de proposer quelques pistes de réflexion concrètes parmi lesquelles :
- le soutien, dans le chef des communes, d’au moins un éco-quartier, du moins là où la demande citoyenne existe déjà ;
- la création d’un cadastre des terrains à réserver d’office aux projets d’éco-villages et d’habitat groupé alternatif ;
- la création d’un statut officiel d’«acteur de transition économique» géré par les communes ou les provinces ;
- le soutien à la mise en circulation de monnaies alternatives et localement enracinées ;
- l’intégration des notions d’économie, de psychologie et de philosophie liées à la transition économique à divers niveaux des programmes d’éducation.
A ce sujet, il est intéressant de mentionner la commune de Forest qui a élargi les compétences de son échevin du Travail à la transition économique. Celui-ci devient ainsi le premier échevin de la transition économique en Belgique. L’échevin forestois s’est d’ores et déjà très clairement prononcé en faveur de mesures publiques de soutien dédiées à la relocalisation de notre économie («Il faut créer de nouveaux emplois», La Libre Belgique). Il appelle ainsi à «créer de nouveaux emplois locaux adaptés aux qualités des chercheurs d’emploi (…). Comment ? En soutenant massivement la création de nouvelles entreprises d’économie sociale et en investissant dans un plan d’activation des entrepreneurs sociaux».
Ne manquez pas de poursuivre ce passionnant débat notamment en apportant vos contributions sur le site TRANSITIONS de Christian Aransperger.
Extrait de nIEWs (n°71, du 11 au 25 mars),
la Lettre d’information de la Fédération.
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