« Pétro-roubles », guerre et mobilité

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Ce 08 janvier 2025, un courrier signé par 37 organisations internationales, européennes et nationales (dans 12 Etats européens), dont Canopea était envoyé à 56 grandes villes européennes. L’objectif : accélérer la mise en place de politiques de mobilité décarbonée pour limiter l’afflux de « pétro-roubles » vers la Russie et en limiter ainsi les moyens de financer sa guerre en Ukraine.

De nombreuses villes, en Europe et ailleurs, ont introduit, introduisent ou prévoient d’introduire des mesures visant à réduire le trafic motorisé afin de diminuer la pollution, apaiser les espaces publics et lutter contre les bouleversements climatiques. Ces mesures ont également un autre effet bénéfique : priver le gouvernement russe de ses « pétrole-roubles », lesquels lui permettent de poursuivre sa guerre d’agression en Ukraine. En effet, aujourd’hui, les revenus du gaz (pour un cinquième) et du pétrole (pour quatre cinquièmes) représentent environ 40% du budget de la Russie. Dès lors, toute diminution de la consommation de pétrole impacte directement les capacités de la Russie à financer sa guerre.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, et bien que l’Union européenne, les États-Unis et d’autres pays du G7 aient imposé un embargo sur le pétrole russe, le Kremlin a engrangé plus de 800 milliards d’euros de recettes grâce à ses exportations de combustibles fossiles. Cela a été rendu possible par l’augmentation de la demande mondiale de pétrole d’une part et par un respect tout relatif de l’embargo du fait d’une faille dans le dispositif. Cette faille dite « de raffinage » permet à la Russie d’expédier légalement ses produits pétroliers vers l’Europe et les États-Unis dès lors que lesdits produits ont été raffinés par des pays tiers tels que l’Inde et la Chine.

Comment résoudre le problème et limiter réellement l’afflux de « pétro-roubles » ? L’introduction de mesures d’embargo plus strictes aurait très certainement pour effet une augmentation du prix du baril, ce que tous les gouvernements souhaitent éviter. De plus, même si les membres du G71 et l’Union européenne cessaient complètement d’importer du pétrole russe (que ce soit directement ou indirectement), la Chine, l’Inde et d’autres pays pourraient augmenter la part de la Russie dans leurs importations de pétrole et réduire celle d’autres pays exportateurs. Lesquels se tourneraient donc vers le G7 et l’UE. Bref, les revenus des exportations de pétrole continueraient à alimenter le trésor russe.

Une baisse de la consommation de pétrole serait donc bien plus efficace. L’agence internationale à l’énergie (IEA) l’avait bien vu elle qui, en mars 2022, un peu moins d’un mois après le début de la guerre en Ukraine, publiait un plan en 10 points pour réduire la consommation de pétrole. Aujourd’hui, au niveau mondial, les transports absorbent environ la moitié de la production pétrolière. Pas étonnant, dès lors, que les 10 mesures visent à réduire la consommation de pétrole des transports. Les villes possèdent, en tout ou partie, les compétences pour mettre en place 5 des points de ce plan : journées sans voiture, développement des modes actifs et des transports en commun, circulation alternée (plaques paires les jours pairs, plaques impaires les jours impairs), promotion de l’autopartage, renforcement de la mobilité électrique.

Les 37 organisations signataires du courrier demandent dès lors aux autorités des villes européennes d’améliorer les politiques de mobilité urbaine et de sensibiliser les citoyens à ce problème largement ignoré. Il serait notamment bienvenu de mener des campagnes d’information expliquant le lien entre la consommation de carburant et la guerre en Ukraine avec son lot de destructions, de souffrances humaines, de migrations, de pénuries alimentaires et de dérèglements économiques.

S’agissant des villes, Canopea suggère une mesure additionnelle aux 10 mesures de l’IEA – dont les effets, toutefois, ne pourraient se marquer qu’à moyen terme : l’introduction de zones à faible danger (ZFD ou LDZ pour low danger zone) dans lesquelles ne pourraient circuler que les voitures les plus modestes, les plus raisonnables, de taille, masse et puissance limitées – bref, des LISA Cars.

Crédit image illustration : Adobe Stock

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  1. Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon et Royaume-Uni ↩︎