Les périodes de chasse sont régies en Wallonie par des dates d’ouverture et de fermeture reprise dans un arrêté qui les fixe pour une durée de 5 ans. Face à la nécessité de réduire les surdensités de grand gibier, la période de chasse a été étendue en janvier, pour les années 2013 et 2014 en parfait accord avec les représentants du monde de la chasse. Le Ministre compétent a sollicité, comme il se doit, le Conseil Supérieur Wallon de la Chasse (CSWC) pour faire de même en janvier 2015. Les constats de l’administration qui justifient cette extension sont également partagés par le monde de la chasse [[Dans l’éditorial de la revue chasse & nature, le président du RSHCB affirme « Bien que le total des minima demandés par les plans de tir du DNF soit en baisse de 8% par rapport à l’an dernier, il semble que les objectifs minima en Cerf seront difficiles à réaliser en 2014« ]]. Les plans de tir minimaux en non-boisés sont loin d’être réalisés, il faut donc permettre aux chasseurs de les atteindre en prolongeant l’ouverture d’un mois.
Contre toute attente, l’avis remis au Ministre par les représentants des chasseurs s’oppose à cette prolongation !
Dans un avis remis en 2012, dans le même contexte de faible réalisation des plans de tir, le CSWC déclarait :
« Le Conseil se déclare favorable à la prolongation de la chasse en battue pour le sanglier et de la chasse à l’espèce cerf jusqu’au 31 janvier. Ces dispositions lui semblent en effet de nature à faciliter l’atteinte des objectifs fixés en matière de réduction des populations au cours des prochaines années. »
Un an plus tard, ce même Conseil justifiait cette prolongation par les arguments suivants, plus précis encore :
« Dans le but de donner la meilleure chance aux plans de tir d’être réalisés pour rétablir l’équilibre faune-flore, le Conseil propose que la chasse soit également permise en battue et ce pour les raisons suivantes :
les battues sont plus performantes que l’approche et l’affût dans l’optique de finir les plans de tir ;
les établissements agréés ont besoin d’un volume minimum pour fonctionner. Sans battue, la découpe des animaux tirés en janvier et leur écoulement sur le marché pourraient rencontrer des difficultés ;
la seule chasse à l’approche et à l’affût en janvier est très peu attractive pour les chasseurs. »
Dans l’avis qu’il vient de rendre au Ministre, alors que le contexte n’a pas changé par rapport aux deux années précédentes, le CSWC « demande que soit adopté un arrêté autorisant la chasse à tir à l’espèce cerf jusqu’au 31 janvier 2015, uniquement à l’approche et à l’affût, et ce y compris les dimanches. » Cet avis n’est aucunement étayé et les avis antérieurs de ce conseil démontrent que leurs membres sont parfaitement conscients que cette restriction, limitant au seul mode de chasse affût-approche, ne permettra pas d’améliorer la réalisation des plans de tir.
La non réalisation des plans de tir confortera dès lors les thèses développées par le Royal Saint-Hubert Club de Belgique, à savoir que l’estimation des populations utilisées pour établir les plans de tir surestime le niveau des populations. Et les conseils cynégétiques n’ayant pas atteint ces minima pourront certainement défendre cette même thèse s’ils souhaitent éviter les poursuites pour non réalisation desdits plans de tir. Voilà une manière bien peu responsable de faire corps.
Heureusement, cet avis n’est pas unanime. Un avis de minorité a également été transmis au Ministre : « cet avis minoritaire se calque sur le projet d’arrêté tel que soumis au Conseil, mais sans prévoir de suspension les dimanches du mois de janvier 2015 et en ne débutant cette prolongation de chasse aux espèces cerf et sanglier qu’au lundi 5 janvier 2015 (délai nécessaire à la communication et à la transmission de l’information au sein des chasseurs concernés). »
Cet avis minoritaire exprimé au sein du CSWC intègre les préoccupations du Conseil Supérieur Wallon des Forêts et de la Filière Bois qui suggérait dans un avis plus général « en cas d’organisation de nouvelles battues durant le mois de janvier, le Conseil insiste sur l’importance de laisser le temps nécessaire à l’indispensable information préalable des autres utilisateurs de la forêt. »
Il est regrettable de constater une telle incohérence dans l’avis d’un Conseil consultatif censé éclairer le Ministre. Cela révèle probablement davantage l’instrumentalisation qui est faite de ce Conseil par certains de ses membres, au détriment du monde de la chasse. Une telle instrumentalisation est possible puisqu’il s’agit d’un Conseil constitué à sa grande majorité de représentants de chasseurs. Il sera opportun de prendre en compte ce type de dérive dans la réforme de la fonction consultative associée à la ruralité et envisagée par ce Gouvernement.