Avec près de trois mois de retard sur les délais impartis, la Belgique vient de remettre aujourd’hui à la Commission européenne[[Le plan national d’allocation belge est en fait l’addition des trois plans régionaux. Même si ceux-ci ont été élaborés de manière séparée, plusieurs conclusions s’imposent pour le plan national dans son ensemble.]] son plan d’allocation des quotas d’émissions de CO2 pour la période 2008-2012. Ce plan détermine les règles selon lesquelles les entreprises belges participeront au système européen d’échange de droits d’émissions de CO2 ; il constitue un outil essentiel dans la lutte contre le réchauffement climatique mais aussi un levier important dans le processus de modernisation de notre économie. Malheureusement, le plan élaboré par les gouvernements régionaux et fédéral est plus une fuite qu’un projet. Il vise en effet à atteindre les objectifs fixés non par des mesures volontaristes sur notre territoire mais par l’achat à l’étranger de « droits de polluer ». Pour les associations de protection de l’environnement, cette stratégie est inacceptable. Elles demandent dès lors à la Commission européenne de forcer la Belgique à revoir sa copie.
En décembre 2005, la Commission européenne a publié à l’attention de ses États-membres des lignes directrices additionnelles concernant leur plan national d’allocation de quotas d’émissions de CO2. Dans ce document, la Belgique figure parmi les pays appelés à adopter des niveaux de quotas plus stricts pour leur deuxième plan d’allocation (le premier couvrait la période 2005-2007 et constituait un « coup d’essai ») car n’étant pas en bonne voie de respecter leurs engagements de Kyoto. Selon la Commission, l’effort ne saurait être réalisé uniquement par les ménages ou le secteur des transports, ni par l’achat à l’étranger de droits de polluer; l’industrie doit également y contribuer de manière significative sans quoi les chances de réussite seraient très compromises.
Force est de constater que le plan présenté par la Belgique ne répond pas à ces exigences. L’industrie dans son ensemble s’y voit en effet accorder le droit d’augmenter ses émissions tandis que l’effort imposé aux électriciens atteint à peine ce qui est déjà prévu en matière d’électricité verte et de centrales plus efficaces… Résultat: des quotas d’émissions correspondant grosso modo à un scénario « business as usual ». En Région wallonne, par exemple, les entreprises concernées par le système d’échange de droits d’émissions – qui génèrent plus de la moitié des émissions de CO2 au Sud du pays – reçoivent un volume annuel moyen de quotas supérieur de 10% aux émissions vérifiées en 2005.[L’avis complet d’IEW concernant le projet de Plan wallon d’allocation de quotas de CO2 pour la période 2008-2012 est disponible [ici.
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Ces niveaux de quotas sont loin d’être suffisants pour atteindre l’objectif de Kyoto ? Pas de problème pour nos gouvernants : la différence sera couverte par l’achat à l’étranger de droits de polluer. Le recours à ces « mécanismes de flexibilité » prévus par le Protocole de Kyoto devrait être tellement massif qu’entre la moitié et l’entièreté de « l’effort » (!) belge sera vraisemblablement couvert de cette manière!
En préférant cette fuite en avant à la mise en ½uvre d’une politique volontariste, nos décideurs privilégient les résultats à (très) court terme et font fi de la crédibilité du pays sur la scène internationale, du développement de nouvelles opportunités économiques créatrices d’emploi, de la préservation et l’amélioration de notre cadre de vie .
La Commission européenne doit à présent évaluer ce Plan. A l ‘heure où la problématique du réchauffement global apparaît de plus en plus préoccupante et alors que la Belgique figure parmi les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre par habitant au monde, les associations environnementales demandent aux autorités européennes d’exiger des gouvernements Belgique qu’ils revoient sérieusement leur copie. Pour les associations, une révision à la baisse de la masse globale des quotas octroyés doit constituer une condition sine qua non à l’adoption définitive du Plan.