Alors que l’urgence climatique est considérée comme incontournable par tout politique sérieux en Belgique, les mesures à mettre en œuvre pour répondre à ce défi, elles, divisent. Une piste encore trop peu utilisée en ce sens dans notre pays est celle de la fiscalité. En effet, le produit des taxes environnementales (les taxes sur l’énergie, le transport ou la pollution) en Belgique est l’un des plus faibles d’Europe. Pour l’année 2011, 4,74% des recettes fiscales récoltées par l’État belge provenaient de cette fiscalité « verte », ce qui plaçait notre pays à la dernière position, loin derrière les États nordiques (8% en moyenne) ou notre voisin néerlandais (10,15%). Le verdissement de la fiscalité doit selon nous faire partie intégrante d’une grande réforme fiscale voulue par l’ensemble des partis francophones, dans le but de réduire les pollutions. La fiscalité utilisée comme instrument susceptible de modifier les comportements permettrait d’accroitre les marges de manœuvre des pouvoirs publics pour diminuer les impôts sur le travail ou réaliser les investissements indispensables dans des domaines tels que l’isolation du bâti, les énergies renouvelables ou encore la mobilité durable.
Ces recommandations ne sont pas des lubies portées uniquement par les associations environnementales mais sont également celles du Conseil de l’UE qui recommande à la Belgique d’« élaborer des propositions concrètes et définies dans le temps pour déplacer la charge fiscale du travail vers des assiettes fiscales ayant un effet de distorsion moins important sur la croissance, notamment en étudiant le potentiel de la fiscalité environnementale, par exemple en ce qui concerne le diesel, les combustibles de chauffage et l’utilisation privée des voitures de société » ou encore de l’OCDE qui conseille: « un recours plus large à la fiscalité environnementale. »
Analysons maintenant les réponses des partis politiques à la question que nous leur avons proposée :
Le parti promeut-il le développement d’une fiscalité environnementale, produisant un « signal-prix » sur les comportements nuisibles à l’environnement ?
En très résumé :
En détail (indispensable pour comprendre le résumé ci-dessus !)
Citations du programme qui répondent à la question
(…) mieux tenir compte de la pollution atmosphérique dans la fiscalité.
Le cdH propose de réduire de 10 milliards la fiscalité qui pèse sur le travail et les entreprises, ainsi que de soutenir les familles, tout en assurant l’équilibre des finances publiques par une taxation accrue des pollutions et de la spéculation, ainsi que par la suppression des intérêts notionnels et une lutte accrue contre la fraude fiscale.
Le cdH propose d’instaurer une taxation aux frontières de l’Europe des biens importés en provenance de pays ayant des normes humaines, sociales et environnementales inférieures aux normes européennes.
Commentaire d’IEW
Le cdH reste très flou dans les mesures concrètes qu’il tient à mettre en oeuvre en matière de fiscalité environnementale. Les principes sont énoncés, mais ne sont pas traduits en mesures concrètes et sont donc difficiles à évaluer.
Citations du programme qui répondent à la question
(…) la suppression des subsides dommageables pour l’environnement. Il s’agit de réaliser un inventaire des subsides, subventions et autres soutiens publics à des produits polluants ou de nature à favoriser des comportements polluants et de prévoir un phasing out des subsides les plus impactant au niveau environnemental.
Instaurer une taxation européenne du kérosène.
Commentaire d’IEW
À l’exception d’une taxe européenne sur le kérosène, Ecolo ne propose pas de mesure précise permettant d’envoyer un « signal-prix » en
matière de fiscalité environnementale.
Cependant, le phasing out d’un certain nombre de subsides dommageables à l’environnement qui ne sont malheureusement pas cités, peut envoyer ce « signal-prix » sans créer pour autant de nouvelles taxes.
Citations du programme qui répondent à la question
Opérer un glissement de la fiscalité du travail vers la fiscalité environnementale.
Ce glissement doit s’opérer par le biais de deux mesures :
harmoniser de manière progressive les accises sur l’essence et le diesel ;
aligner progressivement la fiscalité favorable aux voitures de société sur celle des salaires : dans un 1er temps, supprimer certains avantages tels que la carte carburant, augmenter les cotisations sociales « employés » uniquement sur cet avantage »
Taxer les produits polluants qui portent atteinte à l’environnement et à la santé. L’utilisation de produits de ce type n’est pas sans incidence sur l’environnement et la santé et représente un coût important à charge de la collectivité, notamment pour la dépollution des eaux. En Suède, la taxation a permis de réduire les risques sur l’écosystème et la biodiversité et a contribué à encourager les pratiques agricoles durables. Accompagnée d’autres politiques, cette mesure a permis de réduire de 65% l’utilisation des pesticides sur une période de 18 ans. Cet exemple nous invite à introduire une taxe sur les produits phytosanitaires (pesticides) qui représenterait une recette fiscale estimée à 32 millions d’euros.
Commentaire d’IEW
Le FDF a le programme le plus ambitieux en matière de fiscalité environnemental et a le mérite de faire preuve de transparence en annonçant les mesures qu’il compte mettre un oeuvre pour
augmenter la fiscalité environnementale. L’alignement des accises du diesel sur celle de l’essence, la fin de la fiscalité favorable aux véhicules de société ainsi que l’instauration d’une taxe sur les produits phytosanitaire sont des mesures réclamées de longue date par les associations environnementales.
Citations du programme qui répondent à la question
(…) instaurer un système fiscal fondé sur la capacité contributive des citoyens, sur une juste rétribution d’une exploitation transparente des ressources naturelles exploitées, donnant aux États les moyens de leurs missions.
Commentaire d’IEW
Les propositions du MR en matière fiscale visent exclusivement à une diminution de la pression fiscale globale sans aucune autre forme de compensation qui pourrait notamment venir de la
fiscalité environnementale. La seule proposition en matière de fiscalité environnementale est obscure ne peut être réalisée qu’au niveau européen voire mondial.
Citations du programme qui répondent à la question
(…) veiller à ce que toute mesure fiscale environnementale prenne en considération l’aspect « capacité contributive » des citoyens afin qu’ils ne soient pas pénalisés par ces mesures lorsque leurs moyens ne leur permettent pas de changer de comportement.
Commentaire d’IEW
À l’exception de la TMC, le parti socialiste n’émet aucune proposition en matière de fiscalité
permettant d’envoyer un « signal prix » sur les comportements dommageables à l’environnement. La seule évocation détournée à ce « signal-prix » insiste pour que les mesures en matière de fiscalité environnementale tiennent compte des revenus des citoyens.
Citations du programme qui répondent à la question
Nous ne croyons pas à la fiscalité verte qui « responsabiliserait » individuellement toute la population. Les écotaxes et les sacs-poubelle payants (souvent chers) ne sont pas efficaces. La fiscalité verte part en effet du principe que les citoyens doivent modifier individuellement leur attitude grâce à la cherté du prix payé pour un comportement polluant.
Commentaire d’IEW
Le PTB-GO s’oppose explicitement à toute fiscalité environnementale et à l’application du principe « pollueur-payeur ».
Vous pouvez retrouver l’analyse par IEW de la prise en compte d’autres questions environnementales dans les programmes de partis soit en consultant les 9 autres articles de cette niews (vous bénéficierez dans ce cas d’une mise en contexte de la mesure), soit à partir du communiqué de presse disponible ici.