La 29ème COP (Conférence des Parties) aura lieu du 11 au 22 novembre 2024 à Bakou, Azerbaïdjan. Si la finance est toujours abordée aux COPs, celle-ci aura la particulière importance de la définition d’un nouvel objectif de financement international pour soutenir l’adaptation et la réduction des émissions.
CCNUCC & COP, késako ?
La Convention-Cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) est un accord international sur le climat conclu en 1992, qui détermine des obligations générales pour les Etats signataires. La Convention n’inclut pas d’objectifs chiffrés, mais définit un certain nombre de principes, d’objectifs et d’institutions (comme la COP par exemple). Son objectif ultime est de « stabiliser, […] les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique »1. Elle est, à ce jour, ratifiée par la quasi-totalité des pays du monde.
La Conférence des Parties, définie par la CCNUCC, est une réunion annuelle des Etats-Parties à la Convention pour faire le point sur l’avancement de la mise en œuvre de celle-ci, et qui pose le principe de la négociation permanente sur la réalisation de ses objectifs2. Depuis 2015, la mise en œuvre de l’Accord de Paris y est négociée et les règles de sa mise en œuvre sont affinées. C’est un peu la « grand messe » du climat, à laquelle assistent représentants des pays du monde, scientifiques, entreprises, ONGs, peuples autochtones, jeunes,… Des dizaines de milliers de personnes s’y retrouvent pour exprimer leur position et mettre, le temps de deux semaines, le climat à l’agenda international.
L’Accord de Paris
La COP 21 marque un tournant, celui de l’adoption du fameux Accord de Paris. Celui-ci pose les bases des futures négociations. À côté de son article le plus connu (viser à contenir « l’élévation de la température moyenne de la planète nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels » et poursuivre « l’action menée pour limiter l’élévation de la température à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels »3), l’Accord de Paris prévoit notamment que les Parties soumettent des contributions nationales déterminées (NDCs) tous les 5 ans, qui représentent les efforts de réduction d’émission que les pays sont prêts à faire. Ces contributions doivent présenter une progression dans le temps, mais n’ont pas de valeur contraignante. Les prochaines NDCs devant être rendues pour février 2025, la COP de Bakou jouera un rôle important pour motiver les pays à rendre des contributions ambitieuses. Enfin, l’Accord de Paris fournit également un cadre pour le soutien financier, technique et de renforcement des capacités aux pays qui en ont besoin4.
Trois enjeux de la COP 29
La définition d’un nouvel objectif de financement international
Le financement climatique international est essentiel pour aider les pays à faible revenu à réduire leurs émissions et à s’adapter au dérèglement climatique. Cette année, un nouvel objectif collectif quantifié de financement de la lutte contre le changement climatique (NCQG) pour l’après-2025 sera négocié. Cet objectif fait initialement son apparition dans l’Accord de Copenhague (COP 15) : « Dans l’optique de mesures concrètes d’atténuation et d’une mise en œuvre transparente, les pays développés adhèrent à l’objectif consistant à mobiliser ensemble 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 pour répondre aux besoins des pays en développement. »5.
Cette promesse n’a pas été tenue dans les temps, on estime que les 100 milliards ont été atteints en 2022. Mais de nombreux problèmes se posent quant à la répartition et à la qualité du financement (surutilisation de prêts, qui aggravent le fardeau de la dette dans de nombreux pays à faible revenu, financement qui n’atteint pas les bonnes cibles, atténuation surfinancée par rapport à l’adaptation…). La bonne utilisation de ces fonds et l’atteinte des promesses sont pourtant indispensables pour maintenir la confiance lors des négociations. Un nouvel objectif, bien plus ambitieux et financé principalement par les pays développés, devra être défini par les Parties pour renforcer le soutien aux pays à faible revenu dans leur réponse à un dérèglement climatique dont ils ne sont pas responsables et pour renforcer la confiance entre les parties. Ce sujet promet des discussions difficiles :
Qui va payer ? Qui fait aujourd’hui partie des pays qui ont la responsabilité de soutenir les pays à bas revenu ?
Comment ? Via des mécanismes institutionnels ou plutôt de marché ?
Quel montant ? Basé sur les besoins ou sur ce que les pays sont prêts à payer ?
L’atténuation
Le consensus des Emirats Arabes Unis ou Bilan mondial(accord de la COP 28) définissait des lignes de conduite en termes d’atténuation (réduction des émissions de gaz à effet de serre) :
- Tripler la capacité des énergies renouvelables au niveau mondial et doubler le taux annuel moyen mondial d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici à 2030.
- Accélérer les efforts en vue de l’élimination progressive de l’électricité produite à partir de charbon, lorsqu’on ne peut capter le CO2.
- Accélérer les efforts au niveau mondial pour mettre en place des systèmes énergétiques à zéro émission nette, en utilisant des combustibles à zéro ou à faible teneur en carbone bien avant le milieu du siècle ou d’ici là.
- Réaliser une transition vers l’abandon des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques, d’une manière juste, ordonnée et équitable en accélérant l’action au cours de cette décennie critique, de manière à parvenir à un niveau net zéro d’ici 2050, conformément aux données scientifiques.
- Supprimer progressivement les subventions inefficaces aux combustibles fossiles qui ne permettent pas de lutter contre la pauvreté énergétique ou d’assurer des transitions justes, dès que possible
Les Parties doivent soumettre leur NDC début 2025 (avec un horizon de 2035), et il faut absolument qu’elles tiennent compte de ces lignes de conduite (qui n’ont guère de force contraignante). L’Union Européenne, contrainte par sa Loi Climat, doit adopter en début d’année un objectif pour 2040. Elle doit se montrer ambitieuse (viser une diminution au-delà de -90%) et proposer des dates claires de sortie des énergies fossiles (le charbon en priorité). La Commission a proposé un objectif de 90%, mais le processus de négociation est loin d’être terminé.
Les marchés du carbone
Un autre hot topic de cette COP : l’article 6 de l’Accord de Paris pose un cadre permettant aux pays d’avoir recours à des échanges internationaux de droits d’émission et de s’engager dans un mécanisme de compensation carbone. Ce sujet va être d’importance durant cette COP car les règles permettant le développement de ces échanges vont y être négociées. Les risques liés à la compensation carbone sont aujourd’hui bien connus et une étude parue notamment l’année dernière dans la prestigieuse revue Science démontre que les projets de compensation actuels liés à la forêt surestiment fortement les émissions évitées7. Les Parties devront impérativement établir de solides garde-fous pour éviter les fausses réductions d’émissions, et exclure le secteur agricole (en raison du caractère non durable des crédits générés, de l’impact négatif sur les droits humains et le droit à l’alimentation). Ils devront également exiger une transparence totale et un accès clair à l’information. À la suite d’un accord durant la COP, on peut s’attendre à ce que de nombreux pays s’engagent dans cette voie pour développer leur NDC, avec le risque de masquer la nécessité absolue de réduire les émissions dans tous les secteurs le plus rapidement possible. ….
Pour aller plus loin : les recommandations de la Coalition climat pour la COP climat en Azerbaïdjan (COP 29)
Crédit image d’illustration : Adobe Stock
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- Article 2 de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (1992)
- Gemenne, F. (2021). Géopolitique du climat: les relations internationales dans un monde en surchauffe. Armand Colin.
- Article 2 de l’Accord de Paris https://unfccc.int/sites/default/files/french_paris_agreement.pdf
- https://unfccc.int/fr/a-propos-des-ndcs/l-accord-de-paris
- Accord de Copenhague https://unfccc.int/resource/docs/2009/cop15/fre/11a01f.pdf
- Conference of the Parties serving as the meeting of the Parties to the Paris Agreement. Fifth session. United Arab Emirates, 2023
- Jones, J. P., & Lewis, S. L. (2023). Forest carbon offsets are failing. Science, 381(6660), 830-831.