Ces derniers temps, la presse se fait régulièrement l’écho de tel constat, telle analyse, telle proposition concernant le secteur du transport de marchandises. Toutes ces informations créent ce qu’un mathématicien pourrait appeler un beau système d’équations à plusieurs inconnues, dont la résolution semble particulièrement ardue. De nombreuses inconnues, donc, mais une certitude : la croissance des émissions de gaz à effet de serre du secteur ne peut se poursuivre. Cette certitude implique d’activer au plus tôt tous les leviers visant à une diminution des émissions. Bref, à réorienter le fonctionnement de nos sociétés. Rien que ça.
Au niveau des constats, la situation ne change pas. La route se taille la part du lion et continue de grignoter des parts de marché. En 2005, 86% du transport de marchandises (exprimé en tonne.km, en incluant le transit international) était réalisé par route. 9,7% par voie ferrée (en léger recul depuis plus de dix ans) et 4,3% par voie navigable (en légère augmentation depuis plus de dix ans) [[source : rapport analytique sur l’état de l’environnement wallon 2006-2007, chapitre 2.4 les transports, http://environnement.wallonie.be/eew/rapportproblematique.aspx?id=TRANS)]]. Les éléments d’analyse sont légion. En tête, l’intensification des échanges internationaux, la logique du just in time, les délocalisations de la production, la livraison en porte-à -porte, … La situation réjouit bien évidemment les professionnels du secteur et de nombreux économistes (quand le PIB va, tout va…). Elle offre par ailleurs un bel objet de déprime à ceux qui se soucient tant soit peu d’environnement, les émissions de gaz à effet de serre du transport routier étant en phase d’explosion (augmentation d’un peu plus de 40% entre 1990 et 2004).
Mais les transporteurs ont eux aussi leurs petits soucis. Deux principalement. L’image négative que les « terroristes verts » veulent à tout prix leur coller. Et la croissance continue des problèmes de congestion. D’où un certain nombre de propositions, qui ne font cependant pas l’unanimité dans le secteur, les principales fédérations de transporteurs (au niveau d’un état et au niveau international) ne s’accordant pas toujours sur les options à développer ou la manière de communiquer.
Ainsi, en France, dans le cadre du fameux Grenelle de l’environnement, la fédération nationale des Transporteurs Routiers (FNTR) a communiqué sur le mode « soignons notre image ». En annonçant qu’elle était favorable à un abaissement de la vitesse autorisée sur autoroute à 80 km/h, la FNTR [source : [les propositions de la FNTR]] a déclenché les réactions courroucées. Dont celle de TLF (fédération des entreprises de transport et de logistique) qui s’est dressé contre une « idée improvisée, démagogique et isolée ». En Belgique, selon la presse, la FEBETRA (fédération royale belge des transporteurs et des prestataires de services logistiques) semble avoir assez mal accueilli la proposition également.
En matière de combat contre la congestion – ou du moins contre ses effets – les propositions sont légion également. Ainsi, ne suffit-il pas, pour un même salaire, que les chauffeurs travaillent plus longtemps ? Les délocalisations (du moins partielles) d’entreprises dans les pays de l’est sont de plus en plus nombreuses. Ou ne convient-il pas relever le poids maximum autorisé? La FNTR, outre sa sortie médiatique (peut-être destinée à distraire l’attention ?) propose de « généraliser la norme européenne de 44 tonnes ». Un vote au Parlement européen ouvre la porte aux « méga-trucks » de 60 tonnes sur certains itinéraires… (voir à ce propos l’avis de la fédération européenne Transport and Environment ).
Bref, les propositions fusent. Toutes, ou peu s’en faut, vont dans le même sens : il faudrait rendre possible la croissance attendue des transports routiers de marchandises. Soucieux de l’avenir, du devenir de la planète et de ses divers habitants, nous tentons de porter le message inverse. Il faut impérativement maîtriser la croissance de ce secteur. Message difficile à porter dans une Wallonie que certains ambitionnent de voir devenir « le » pôle logistique européen.