Il y a quelques semaines, la Fédération a obtenu les chiffres relatifs aux ventes des substances actives de pesticides en Belgique. Ces données communiquées en vertu du droit d’accès à l’information environnementale – une première européenne… – ont fait l’objet d’une analyse de laquelle il ressort que des matières dangereuses tant pour la santé que pour l’environnement continuent à être massivement vendues dans notre pays. Les volumes mis sur le marché ont même triplé voire quadruplé entre 1995 et 2008 !
En ce jour d’ouverture de la « Semaine sans pesticides », la Fédération, rejointe dans sa démarche par Nature & Progrès et le CARI (Centre apicole de recherche et d’information) appellent les pouvoirs publics à mettre en ½uvre des procédures indépendantes d’évaluations des risques et d’appliquer le principe de précaution (donc l’interdiction) pour toute substance suspectée dangereuse.
L’analyse par IEW, Nature & Progrès et le CARI des données relatives aux ventes en Belgique des substances actives des pesticides fait ressortir quatre éléments majeurs :
plusieurs substances actives appartenant à la catégorie des pesticides considérés par le Pesticide Action Network Europe (PAN EU) comme étant les plus dangereux pour la santé humaine sont toujours autorisés à la vente dans notre pays, sans qu’une diminution des quantités utilisées ne soit observable entre 1995 et 2008, tout au contraire. Ces substances sont le carbendazim (mutagène, toxique pour la reproduction), l’iprodione (cancérigènes), le captan (cancérigène) et la deltamethrine (perturbateur du système endocrinien) ;
trois pesticides – l’imidaclopride, le fipronil et la clothianidin – dont la nocivité pour les abeilles est avérée sont toujours présents sur le marché belge et même en forte hausse. Or, de nombreux apiculteurs d’Europe de l’Ouest ont subi ces dernières années le phénomène d’effondrement de leurs colonies d’abeilles (Colony Collapse Disorder – CDD – en anglais). Si les causes de ce phénomène continuent d’être investiguées, les scientifiques s’accordent sur une origine multi-factorielle au sein de laquelle l’exposition à des pesticides toxiques joue un rôle non-négligeable ;
le Rapport analytique de l’état de l’environnement wallon 2009 constate que « Les concentrations de glyphosate, matière active contenue dans certains herbicides totaux fréquemment utilisés par les particuliers, dépassaient en 2004 les normes de potabilité dans plus de 80% des sites de contrôles en Région wallonne. En outre, une augmentation des concentrations annuelles les plus élevées depuis 2003 dans la plupart des cours d’eau pour lesquels des données historiques sont disponibles a été observée. Cette situation préoccupante pose question, d’une part, quant à la persistance de la molécule dans l’environnement et, d’autre part, quant aux quantités et aux modalités d’application des herbicides contenant cette matière active ». L’analyse des chiffres de vente montre elle un quadruplement des quantités de glyphosate vendues dans notre pays entre 1995 et 2008.
plusieurs substances connues comme dangereuses restent en circulation dans notre pays. Il en va ainsi pour
- le 2,4D, un herbicide hautement toxique. Ce produit, qui a une phase gazeuse très importante, présente un risque d’autant plus important que, pulvérisé, il peut agir par inhalation ;
- le daminozide, aux effets cancérigènes avérés, dont les volumes vendus augmentent pourtant ;
- le diquat, un herbicide hautement toxique de la même famille que le paraquat… interdit en raison de sa toxicité et de ses effets cancérigènes. Les ventes de diquat sont en augmentation constante en dépit de son danger pour la santé et pour l’environnement.
Pour la Fédération Inter-Environnement Wallonie, Nature & Progrès et le CARI, ces éléments inquiétants démontrent l’inefficacité des procédures d’évaluation actuellement en vigueur.
Régulièrement, le site fytoweb, géré par l’administration fédérale, annonce des retraits d’agrégation ou des restrictions d’utilisation de substances actives du fait de leur dangerosité pour la santé et/ou de leur présence en quantités trop importantes. Pourtant, la démonstration est faite que plusieurs substances actives, dont les propriétés toxiques ou la persistance dans l’environnement sont bien connues et posent problème, restent autorisées dans notre pays. Les ONG appellent dès lors à la mise en ½uvre d’une évaluation des risques indépendante et à l’interdiction, conformément au principe de précaution, de toute substance suspecte.