Un milliard pour maintenir en bon état pendant 12 ans l’ensemble du réseau ferroviaire belge ou 2 milliards pour construire une nouvelle jonction ferroviaire bruxelloise, chantier qui durera 10 ans ? La réponse devrait couler de source, non ?
Fin juillet, Infrabel, gestionnaire du réseau ferroviaire, annonce qu’une menace pèse sur plusieurs lignes faute de moyens budgétaires. Pour éviter la fermeture ou une rationalisation forte de 13 lignes, dont 12 en Wallonie, Infrabel estime qu’il lui faudrait un budget supplémentaire annuel de 82 millions €. Les investissements dans le port d’Anvers seraient également en péril. 684 trains de voyageurs et 103 trains de marchandises seraient impactés.
Deux mois plus tard, soit la semaine dernière, le gestionnaire propose la construction d’une deuxième jonction à Bruxelles pour un budget de 2 milliards environ, sans aucun plan de desserte justifiant cette extension de capacité.
La nécessité d’améliorer la desserte de Bruxelles et la robustesse dans l’exploitation de la traversée ferroviaire de la capitale est réelle. C’était d’ailleurs le thème du séminaire annuel qu’IEW a co-organisé avec TreinTramBus, Navtteurs.be et Test-Achats en juillet dernier. Et au cours de ce séminaire il a précisément été reconnu, par les acteurs présents dont Infrabel, la SNCB et les auteurs de l’étude Rail4Brussels qu’un projet de doublement de la jonction Nord-Midi n’était pas la première option à suivre.
Planifier un chantier colossal et coûteux au cœur de Bruxelles pour régler un problème de saturation qui ne se pose pas plus de 2 heures par jour est insensé ! D’autant que cette saturation est toute relative : les trains qui traversent la Jonction Nord-Midi sont nombreux mais rarement bondés. Des solutions alternatives pragmatiques sont connues, et d’ailleurs admises par Infrabel. Elles consistent en une meilleure répartition des trains dans la jonction (spécialisation des pertuis) et en une utilisation accrue des lignes adjacentes que sont la L26 et la L28. Quelques investissements ciblés seraient nécessaires pour réduire les cisaillements aux entrées de la jonction et améliorer la robustesse de l’exploitation de l’infrastructure existante.
Dans le contexte actuel d’urgence climatique reconnue par l’ensemble de la société, il est invraisemblable d’envisager de mettre à mal le maillage ferroviaire qui est un atout indéniable dont la Belgique doit se saisir pour respecter ses engagements. Il faut envisager le développement des chemins de fer comme l’ossature d’un réseau de transport public intégré, le train se combinant avec les autres modes de déplacement, offrant ainsi une solution globale de déplacements en ce compris les premiers et derniers kilomètres.