Il est nécessaire et possible d’avoir des logements et bâtiments qui n’amplifient plus la détérioration du climat. Ce chantier majeur touche à de nombreuses caractéristiques des bâtiments que nous utilisons – isolation thermique et système de chauffage, bien entendu, mais aussi accessibilité potentielle sans voiture, ou encore nombre de mètres carrés chauffés par personne.
Nous proposons ici en 8 points des orientations pour les systèmes de chauffage en Wallonie, dans une perspective qui tente d’allier le court et le long terme. L’importance absolue de réduire rapidement la consommation d’énergie des bâtiments ressort de toute discussion sur le chauffage. Les réseaux de chaleur ne sont pas discutés ici.
- Il faut sortir des énergies fossiles pour aller vers la neutralité carbone d’ici 2050. Les investissements dans le mazout et le gaz doivent donc être dès à présent réduits.
- Mazout : il faudrait dès à présent éviter/interdire le placement de nouvelles chaudières à mazout. Celles en fin de vie ne devraient pas être remplacées par de nouvelles chaudières à mazout, certainement pas pour les zones desservies par le réseau gaz (où il existe encore beaucoup de chaudières mazout). En 2022, le remplacement d’une chaudière à mazout par une petite chaudière à gaz peut encore être envisagé là où le réseau de gaz est disponible, sachant qu’il s’agit d’une solution non pérenne. Pompes à chaleur et/ou pellets sont préférables quand c’est possible, en complément des solutions visant à la réduction de consommation (rénovation, comportement…).
- Gaz : le gaz naturel doit progressivement reculer et disparaître, mais plus progressivement que le mazout. Le gaz « vert » ne sera pas disponible en quantité aussi importante que le gaz fossile aujourd’hui, et il devrait être réservé à des applications où il y a moins d’alternatives que le chauffage du bâti (ex. mobilité et industrie). Le réseau de gaz ne doit donc plus être développé. Même si ce n’est pas idéal, il reste possible en 2022 de remplacer certaines chaudières à mazout par des chaudières à gaz dans le bâti existant quand l’isolation n’est pas encore assez performante et que le réseau gaz est déjà présent.
- Pompes à chaleur (PAC) : les PAC constituent la voie majeure, sans doute la principale pour aller vers un bâti climatiquement neutre. Elles conviennent le mieux pour les bâtiments qui ont une isolation thermique suffisante. Cela doit devenir la norme pour les nouvelles constructions. Le nouveau bâti peut être prévu pour des PAC plus complexes (sol-eau par exemple). Pour la rénovation, de simples PAC air-air sont à envisager au moins pour une partie des besoins de chauffage, de manière à diminuer le recours aux énergies plus polluantes.
Un pilotage horaire efficace des PAC est essentiel. Il importe, en effet, d’éviter d’augmenter trop fortement la pointe de consommation d’électricité (en hiver en soirée). Vu l’inertie thermique des bâtiments, il est possible et plus pertinent de chauffer aux moments où l’électricité est moins demandée ou plus abondante. Associée à des panneaux photovoltaïques, il sera utile de faire fonctionner la PAC aux heures où les panneaux produisent. Par ailleurs, pour les PAC air-air, le rendement sera meilleur aux heures chaudes de la journée (400% de rendement à 7°C, 250% de rendement à -10°C), il peut donc être plus économique de chauffer un peu plus à ces heures-là, et de stocker l’énergie thermique dans la brique avant une nuit froide.
Cependant le tout aux PAC n’est sans doute pas envisageable à court terme pour une partie du bâti existant. A ce stade, le gaz ou le pellet ont des rôles complémentaires à jouer à ces PAC dans les bâtiments dont la performance énergétique n’est pas au top (en particulier pour les moments les plus froids de l’année).
- Pellets : malgré ses désavantages en termes de pollution de l’air et la nécessité d’une approche prudente sur la biomasse, le chauffage pellets peut jouer un rôle (en chauffage principal ou en complément), en particulier dans les zones non urbaines. Et les pellets pourraient garder un rôle partiel à long terme, dans une perspective de diversification et de résilience. Certains poêles à pellets sont prévus pour fonctionner sans électricité, ce qui est utile en cas de grosse panne électrique (si jamais il y a deux semaines de panne électrique à l’hiver 2045, il ne faut pas que toute la Wallonie meure de froid et qu’aucun lieu ne soit chauffable…). Ces poêles ont un rendement un peu moindre cependant. Il serait sans doute pertinent d’encourager les producteurs de poêles à concevoir des poêles « résilients » : efficacité maximale en temps normal (optimisés avec ventilateurs électriques), mais qui peuvent aussi fonctionner (en mode légèrement dégradé, par tirage naturel) le jour où il n’y a pas d’électricité. Ce type de poêle mixte n’est pas encore vraiment développé à notre connaissance.
- Le bois bûche est très polluant et peut affecter la santé (particules fines, etc.). Il y a vite un facteur 10 entre les émissions d’un poêle à bûches (même assez récent) et celles d’un poêle à pellets. Pour les anciens, c’est encore bien pire. Le seul avantage du bois bûche dans la transition est la résilience potentielle d’approvisionnement et de fonctionnement. Malgré son aspect chaleureux, nous ne le conseillons pas comme chauffage régulier. Les vieux poêles à bois peu efficaces sont à remplacer, par exemple par des pellets.
- En termes de rénovation énergétique : l’urgence principale est l’application de la stratégie de rénovation qui cible en priorité les rénovation des logements les moins efficients (PEB G). A cette logique, nous proposons d’ajouter un ciblage sur les maisons chauffées au mazout là où le réseau de gaz n’est pas disponible, dans une logique qui permettraient d’aller directement vers des systèmes de chauffages 100% non fossiles (PAC et/ou pellets).
- De manière pragmatique, il est pertinent de s’appuyer sur une vision qui envisage différents segments du bâti en fonction des caractéristiques suivantes :
- De manière pragmatique, il est pertinent de s’appuyer sur une vision qui envisage différents segments du bâti en fonction des caractéristiques suivantes :
- Niveau d’isolation actuel et futur atteignable pour le bâtiment
- Marge réaliste de transformation du bâtiment (neuf = marge maximale ; réno = marge intermédiaire variable ; bâtiment patrimonial ou classé = marge minimale)
- Type d’utilisation du bâtiment et de ses pièces (chauffage permanent, chauffage occasionnel). Par ex. une salle de bains peut ne nécessiter que 30 minutes de chauffage par jour, mais relativement rapide, contrairement à une chambre qui aura une température plus constante. Un bâtiment patrimonial inchauffable pourrait être affecté à un usage plus saisonnier.
- Présence ou non d’une infrastructure de livraison de gaz (question pertinente pour la politique à l’horizon 2030, moins après où il faudra réduire fortement le gaz partout)
- Milieu urbain ou rural (en lien avec la qualité de l’air : moins de combustion souhaitable en milieu urbain dense, donc moins de pellets là)
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