Le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) vient de sortir une note sur l’évaluation de la cancérogénicité de la viande. Il y fait la synthèse de plus de 800 études sur le cancer chez l’homme de laquelle il ressort que la consommation de viande peut provoquer certains types de cancer. Sur cette base, l’Organisation mondiale pour la santé (OMS) classe comme «probablement cancérogène pour l’homme» la consommation de viande rouge et comme «cancérogène pour l’homme» la charcuterie.
Si la presse fait grand cas de cette information en la présentant comme « neuve », elle est pourtant la juste conclusion de nombreux travaux connus depuis longtemps réalisés par les spécialistes des cancers et les spécialistes d’une alimentation réellement de qualité. Elle vient en outre compléter l’ensemble des « casseroles » que traine l’industrie de la viande dont l’incidence de sa production sur le climat (émission d’oxydes d’azote et de C02), la grande consommation d’eau nécessaire pour sa production, la pollution de l’eau et des sols du fait de l’utilisation d’intrants chimiques (nitrates, pesticides…), etc…
Les oncologues considèrent quant à eux qu’une trop grande consommation de viande et de «produits carnés transformés» peut engendrer le cancer colorectal, de la prostate, des ovaires, voire du poumon. Dans un rapport publié récemment, l’Institut national du cancer ()(Inca) estimait convaincants les liens entre consommation de viande et de charcuterie et cancer colorectal.
Depuis de nombreuses années IEW informe la population sur cette question et interpelle les responsables politiques pour réorienter la consommation afin d’obtenir des améliorations tant de la santé des citoyens que de la qualité de l’environnement. En résumé, ce qui est constaté, c’est que ces nuisances sont le résultat des dérives d’une production industrielle centrée sur l’élevage intensif.
Est-il nécessaire de rappeler que 90% de la viande consommée est encore issue de cette filière dont l’objectif ultime est de rentabiliser la moindre calorie produite par une bête nourrie par des aliments à haute richesse énergétique (maïs, soja, farines animales) vendus au coût le plus bas. Comme le résumait Fabrice Nicolino, auteur de Bidoche : « Aujourd’hui, on peut dire que la viande a atteint la perfection industrielle, c’est une industrie mondialisée, qui appartient souvent à des fonds de pension ou des organismes financiers et qui pose les mêmes problèmes que l’économie financiarisée : la nécessité de dégager des taux de rentabilité de 8 à 10%… »
Il y a aussi la question des médicaments dont sont gavés les animaux d’élevage… Il est bien connu que leur pharmacopée est riche d’une quantité impressionnante de produits que l’on retrouve sous différentes formes et à différentes doses dans la viande : douvicides, anticcidiens, anthelminthiques, hormones, vaccins, neuroleptiques et antibiotiques. Ses substances sont autorisées, mais sur base du principe aujourd’hui complètement dépassé en toxicologie, mais encore majoritairement utilisé pour l’agréation des produits, le principe selon lequel « la dose fait le poison ». Sait-on comment l’oxytétracycline se mélange avec la gonadolibérine chez un poulet ? Comment le flubendazole se marie avec l’azapérone et les prostaglandines PGF2 dans la chair d’un porc ? Le thiabendazole avec le diazinon ou le décoquinate dans le sang d’une bonne vache charolaise ?[[En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2013/02/25/le-scandale-alimentaire-qui-s-annonce_1838402_3232.html#JjCfp7BE5xh8XudO.99]] Non.
Si l’on ajoute qu’à l’autre bout de la chaine, les supermarchés exercent une pression énorme pour écraser les prix, il n’est pas étonnant que l’on se trouve confronté à une viande dont la consommation comporte des risques pour la santé.
Mettre en culture des surfaces de plus en plus importantes aux quatre coins de la planète pour produire la nourriture de nos animaux eux-même de plus en plus nombreux est une logique meurtrière pour la survie des populations humaines, l’environnement et l’agriculture elle même.
En se battant à coup de chiffres de production annuelle de viande, de consommation moyenne ou de recommandations nutritionnelles, on s’écarte de ce que devrait être la solution : une production rémunératrice, environnementalement propre et socialement juste.
Heureusement, les solutions existent et se développent.
S’il est fastidieux de passer en revue ici les différents moyens pour pallier à ces dérives, on peut au moins pointer les domaines d’intervention : une modification radicale de notre système agricole en prenant en compte notamment les apports de l’agroécologie (voir aussi : L’agroécologie, une piste pour la Wallonie !, mais également « Agroécologie et droit à l’alimentation »), la souveraineté alimentaire et une réappropriation par les citoyens du système alimentaire à l’échelle locale, notamment grâce au développement de filières courtes. Il y a fort à parier que ces nouvelles pratiques modifient radicalement nos rapports à l’alimentation et aient un impact non négligeable sur nos modes de vie.
IEW a rédigé une position en la matière : Repenser notre agriculture et notre alimentation.
Reste à vaincre l’inertie du système actuel dont la force doit être mesurée à l’aune de l’ampleur des dégâts occasionnés… aujourd’hui « acceptés » comme une simple fatalité.
Alors, commençons par quelque chose de concret et accessible : Manger 2X moins de viande : indispensable ! Et simple….