La « Semaine de la mobilité » qui se répète chaque année en septembre est l’occasion de pointer des problématiques majeures, comme le triste anniversaire du dieselgate, mais c’est aussi le moment d’oser des initiatives originales. Petit coup de projecteur sur le projet « Roue Libre » lancé à Marche-en-Famenne par le Pays de Famenne, le GAL Romana et la Ville au début de la semaine de la mobilité.
Le concept de « Roue Libre »
Des vélos disposés dans l’espace public sont mis à disposition des citoyens gratuitement pour leur permettre de se déplacer librement dans la ville. Pas de station, pas de caution, pas d’abonnement, pas d’accès à déverrouiller,… la volonté était de lever tous les freins à l’usage ! Peints en orange (une des couleurs du GAL Romana à l’initiative du projet) et labélisés par des autocollants, les vélos « Roue Libre » sont à la fois facilement identifiables, et plus difficilement dérobables. Au centre du concept : le partage. L’objectif poursuivi : la mise en selle.
La genèse du projet
Olivia Boever, pilote du projet au sein du GAL Romana, reconnaît avoir été inspirée par le service mis en place par Google sur son siège de Mountain View. Là-bas, des centaines de bicyclettes bigarrées aux couleurs du géant d’internet sont mises à disposition des employés pour faciliter leurs déplacements dans les dédalles de l’immense site de l’entreprise. Par ailleurs, on voit apparaître dans de nombreuses villes européennes et chez nous en Belgique, des services de vélos dits en libre-service comme à Bruxelles, Namur, … Ces services rencontrent un réel succès dans leur usage mais certaines difficultés au niveau de la gestion des flottes. Le souhait du GAL Romana était de proposer un service tout-à-fait libre et tout-à-fait partagé.
Récup, réinsertion et rencontre
Mon coup de cœur pour ce projet tient à plusieurs éléments, et le fait qu’il se déroule dans ma ville n’en est pas particulièrement un ; il est vrai que si cela avait eu lieu ailleurs, j’aurais pu passer à côté. Il m’a plu car il se base sur des valeurs qui me tiennent à cœur : le commun, le partage et la rencontre de l’autre. Au de-là du service de mobilité qui est proposé et qui apporte une réponse locale à de nombreux enjeux (congestion, pollution de l’air, réchauffement climatique, convivialité de l’espace public), il y a en amont d’autres objectifs qui sont rencontrés à travers ce projet. Premièrement, ces vélos étaient destinés à la ferraille. C’est donc un bel exemple de réutilisation pour réduire nos déchets. Une collecte des vélos a été organisée avec la collaboration des parcs à conteneurs de la région (Idelux et le BEP). Ensuite, ces vélos ont été remis en ordre dans le cadre d’un partenariat avec des entreprises d’insertion professionnelle. Ils ont été réparés par 3B-asbl (anciennement Compagnons de la Maison – à Marche-en-Famenne) et par l’entreprise sociale Calidipôles (Chaudfontaine). Enfin, la touche finale, c’est-à-dire la peinture des vélos, a été l’œuvre des bénéficiaires d’Andage, une association active auprès des personnes handicapées. Et il semble que toutes ces collaborations ont été l’occasion de belles rencontres, avec déjà de nouveaux projets en gestation.
Un bilan à tirer ?
Les vélos ont-ils été utilisés ? Oui, j’en ai été moi-même témoin. 30 vélos ont été mis à disposition et répartis sur 3 espaces publics bien connus des Marchois : la Place aux Foires, la place Roi Albert et le boulevard urbain. Les jours suivants, on en a aperçu un peu partout : sur le rack à vélos de la gare de Marche, aux arrêts de bus, devant des commerces,… Ils sont donc utilisés pour des déplacements dans la ville, et en complémentarité avec les transports publics. Bingo ! L’initiative a fait le buzz sur les réseaux sociaux avec beaucoup de messages d’encouragement pour un projet basé sur la confiance. Bravo d’avoir osé ! Les vélos sont-ils encore utilisés ? Très probablement, mais pas de manière aussi partagée que souhaité, semble-t-il. Effectivement, Olivia Boever nous informe que les 30 vélos Roue Libre ont disparu des radars du GAL. C’était attendu. Quelques échos leur sont revenus… certains en ont aperçu dans le garage d’un voisin, la police en a également signalé l’un ou l’autre. Est-ce un échec ? Ce n’est pas le point de vue adopté. Le premier objectif était la mise en selle, et ça c’est réussi. Ces vélos n’auront pas été partagés très longtemps mais s’ils sont encore utilisés, c’est déjà ça. Ils étaient destinés aux conteneurs, alors s’ils peuvent servir, tant mieux. Le pari de la confiance n’a pas vraiment marché ; c’est surtout cela qui est dommage. Mais le GAL Romana ne semble pas vouloir se laisser décourager si vite. Encore 40 vélos attendent leur résurrection. La remise en ordre des 30 premiers avait demandé un budget de 600€, c’est finalement un budget très raisonnable pour remettre en selle une trentaine de personnes (on l’espère !) et réaliser une belle campagne de promotion du vélo.
Alors, longue vie aux vélos Roue Libre !