Le Ministre Philippe Henry a arrêté ce jeudi de nouvelles extensions aux zones vulnérables pour les nitrates. Ces extensions comblent les manquements épinglés par la Commission européenne autour du Pays de Herve, dans le Sud-Namurois et en Condroz. Plus de vingt ans après l’adoption de la Directive européenne sur les nitrates d’origine agricole, la Wallonie se trouve donc enfin en conformité avec le droit européen… Cet élargissement de la zone vulnérable n’aura cependant d’effet que s’il s’accompagne d’un renforcement significatif du Programme de gestion durable de l’azote en agriculture (PGDA).
Inter-Environnement Wallonie a contesté la qualité du PGDA en cours, considérant qu’il constituait une régression au regard du programme qui le précédait. La Cour des Comptes a pour sa part relevé des manquements importants, entre autres au niveau du contrôle de ce PGDA. Sa révision apparaît donc essentielle pour assurer l’amélioration de la qualité des eaux wallonnes. Il s’agira d’apporter des réponses concrètes à la nécessité de réduire, sur l’ensemble de la Wallonie, l’eutrophisation des eaux de surface. L’instauration de bandes enherbées en bordure de cours d’eau s’avère, en ce sens, incontournable. Nos voisins l’ont fait et une partie du monde agricole est d’ailleurs demandeur.
Les pratiques agricoles doivent évoluer pour limiter les pertes d’azotes dans l’environnement, lesquelles sont restées stables en Wallonie alors qu’elles ont été réduites de près de moitié en Flandre (pour atteindre le niveau wallon) en moins de 10 ans. Pour ce faire, le taux de contrôle annuel des reliquats azotés en fin de culture doit être adapté aux taux de dépassements constatés : de bons résultats amenant des taux de contrôle faible et inversement. Par ailleurs, les normes de reliquats azotés en fin de culture ne permettront pas de restaurer la qualité de l’eau. Elles sont en effet établies sur base des « bonnes pratiques agricoles » mais certaines cultures, telles celles de la pomme de terre ou du maïs, présentent des reliquats incompatibles avec cet objectif. Ces « bonnes pratiques » doivent donc évoluer pour atteindre des reliquats acceptables. Une adaptation de la fertilisation sur base d’analyse de sol au printemps, combinée à une limitation de la fertilisation permettrait par exemple de réduire significativement le niveau de ces reliquats.
La généralisation des cultures intermédiaires, piège à nitrate, devrait améliorer substantiellement les pertes de nitrates dans les eaux. Cette obligation d’interculture devrait donc s’imposer dans les situations les plus à risque telle la monoculture de maïs.
Comme le relève la Cour des Comptes, l’amélioration de la qualité de nos eaux souterraines passe par une amélioration des contrôles existants et l’instauration de contrôles systématiques pour les enjeux les plus importants (adéquation des capacités et des infrastructure de stockage d’effluent par exemple). Il faudra également s’assurer de la réalité des contrats d’épandage entre les exploitations excédentaires en effluents d’élevage et les exploitations disposant de capacité d’épandage.
Ces mesures ne sont pas nécessairement des contraintes pour le secteur agricole, une meilleure utilisation de l’azote et une récupération des « fuites » dans l’environnement améliore en effet l’efficience de l’agriculture. Affaire à suivre donc…